(Cour de cassation, 1ère chambre civile, arrêt du 14 avril 2016)
Une patiente subit, en urgence, au sein d’une clinique, une césarienne à 31 semaines et demie d’aménorrhée, alors qu’elle présentait un hématome rétroplacentaire. L’enfant naît en état de souffrance fœtale subaiguë et de détresse respiratoire et conserve d’importantes séquelles.
Une expertise est ordonnée en référé. Plusieurs pièces manquent au dossier médical relatif à l’hospitalisation. La mère reproche au gynécologue-obstétricien exerçant à titre libéral, ayant suivi la grossesse et réalisé l’accouchement, de n’avoir pas, au vu de ses symptômes, diagnostiqué l’hématome rétroplacentaire et procéder plus tôt à une césarienne. La Cour d’appel de Paris a débouté la patiente en prenant en considération les conclusions du rapport d’expertise judiciaire et en retenant que le diagnostic de l’hématome rétroplacentaire était difficile compte tenu du fait que la patiente n’en présentait aucun symptôme. Celle-ci a été admise à l’hôpital après voir signalé avoir perdu du liquide vraisemblablement amniotique, sans jamais se plaindre de douleurs abdominales. Les examens médicaux n’ont révélé aucun signe d’albuminie et d’hypertension. Le rythme cardiaque du fœtus a été régulièrement surveillé. C’est lorsque l’état de la patiente a évolué et qu’elle a présenté des saignements importants et la présentation par le fœtus d’une tachycardie modérée que le médecin a pris la décision de pratiquer une césarienne. Dans ces conditions, et en l’absence des enregistrements du rythme cardiaque du fœtus qui, seuls, auraient permis de caractériser une faute du praticien qui aurait négligé un rythme anormal mettant en évidence une souffrance fœtale, il est établi que si le diagnostic posé par le médecin, qui a privilégié l’hypothèse d’un risque d’accouchement prématuré, s’est avéré erroné a posteriori, l’existence d’un hématome rétroplacentaire important a été révélée lors de la césarienne.
Mais la patiente n’apporte pas la preuve qu’il lui incombe que le médecin aurait commis une faute en ne se donnant pas les moyens d’établir le bon diagnostic entre le 30 avril et le 4 mai 1994 au matin, date à laquelle il a été décidé de pratiquer une césarienne, étant rappelé que, selon les experts, cet hématome était particulièrement difficile à déceler et qu’en 1994 la prise en charge des grands prématurés n’était pas aussi performante qu’à l’heure actuelle et incitait les obstétriciens à retarder au maximum l’accouchement.
La Cour d’appel de Paris avait donc jugé qu’en l’absence de faute prouvée, la responsabilité du gynécologue-obstétricien n’avait pas à être retenue pour les dommages subis par l’enfant à sa naissance.
Sur pourvoi en cassation de la mère, la 1ère chambre civile de la Cour de cassation, par cet arrêt du 14 avril 2016, confirme qu’en l’absence de faute imputée au praticien dans la conservation du dossier médical, seule de nature à inverser la charge de la preuve, la Cour d’appel a correctement déduit de ses constatations que l’existence d’une faute du gynécologue-obstétricien n’était pas établie.