Une seule dose de vaccin contre l’HPV (Cervarix ou Gardasil) est aussi efficace que deux doses pour la prévention de l’infection HPV.
C’est ce que vient de démontrer une étude publiée ce mois-ci dans le NEJM (1). Kreimer et al. ont ainsi mené une étude randomisée contrôlée en double aveugle au Costa Rica. Un total de 20.330 jeunes filles âgées de 12 à 16 ans y ont été randomisées. Après exclusion de 868 participantes, 4880 ont recu une seule dose de vaccin bivalent (Cervarix), 4880 deux doses (M0-M6) de vaccin bivalent (Cervarix), 4851 une seule dose de vaccin nonavalent (Gardasil), et 4851 deux doses (M0-M6) de vaccin nonavalent (Gardasil). Les jeunes filles ont été suivies régulièrement pendant 5 ans après l’inclusion avec notamment des test HPV tous les 6 mois une fois qu’elles avaient dépassé l’âge de 15 ans. Ce test était fait qu’elles aient ou non déclaré avoir eu des rapports sexuels. Au final, les auteurs n’ont pas trouvé, sur la période d’étude, de différence de taux d’infection incidente et persistante (au moins 6 mois) d’HPV 16 ou 18 selon que les patientes aient eu une seule ou deux doses de vaccin. Ainsi, la différence de taux d’HPV16 ou 18 entre une et deux doses de vaccin bivalent était de −0,13 infections pour 100 participantes (IC 95 %, −0,45 à 0,15 ; P < 0,001 pour la non-infériorité), ce qui signifie que pour 100 participantes ayant reçu une seule dose du vaccin, il y avait 0,13 infection à l’HPV 16 ou 18 de moins dans les 5 ans suivant la vaccination que chez celles ayant reçu deux doses. La différence de taux d’infection par HPV 16 ou 18 entre une et deux doses du vaccin nonavalent était de 0,21 infection pour 100 participantes (IC95 %, −0,09 à 0,51 ; P < 0,001 pour la non-infériorité), ce qui signifie que 100 participantes ayant reçu une seule dose ont eu 0,21 infection supplémentaires dans les 5 ans suivant la vaccination par rapport à celles ayant reçu deux doses.
Les auteurs ont par la suite comparé les taux d’infection (à m54 et m60 de l’inclusion) de ces participantes à ceux d’une population contrôle non randomisée sélectionnée spécialement pour l’étude (3005 femmes de 16 à 21 ans non vaccinées, avec tests HPV à M0 et M6 de l’inclusion, l’étude ayant été faite sur 2990 femmes au final). En ce qui concerne l'efficacité des vaccins dans la prévention de l'infection par le HPV16 ou le HPV18 persistant au moins 6 mois, l'efficacité d'une seule dose du vaccin bivalent était de 98,2 % (IC à 95 %, 96,1 à 99,6), celle de deux doses du vaccin bivalent était de 97,8 % (IC à 95 %, 95,6 à 99,3), celle d'une seule dose du vaccin nonavalent était de 97,0 % (IC à 95 %, 94,3 à 99,1) et celle de deux doses du vaccin nonavalent était de 98,5 % (IC à 95 %, 96,7 à 99,7).
Parmi les limites de l’étude, on peut soulever que les analyses n’aient été présentées qu’en per protocole et non en intention de traiter. Une limite majeure, rapportées par les auteurs eux-mêmes, est que la période de suivi n’a finalement concerné que 5 ans après l’inclusion (pour certaines jeunes filles vaccinées à 12 ans dans l’étude). Il n’est donc pas possible d’avoir de certitude quant à l’efficacité du vaccin une dose sur une période plus prolongée, ni d’ailleurs sur la prévention des lésions de haut grade ou les cancers liés à l’HPV.
Ces résultats sont cependant encourageants et viennent confirmer ceux de plusieurs études, notamment une prospective menée en Inde dont l’objectif était de comparer les efficacités de une, deux ou trois doses de vaccin quadrivalent contre l’HPV (2). D’après les auteurs, l’efficacité du vaccin pour prévenir la persistance d’une infection HPV 16 et/ou 18, avec un suivi médian de 9 ans, était identique selon que les patientes aient reçu une seule dose (efficacité 95,4%, IC95 : 85,0-99,9), deux doses (efficacité 93,1 %, IC95 : 77,3-99,8) ou trois doses (efficacité 93,3%, IC95 : 77,5-99,7) du vaccin quadrivalent. Ces données avaient par la suite été confirmées avec un recul de 10 ans après vaccination (3). Ces résultats concordaient sans surprise aussi avec ceux d’autres études publiées en novembre 2024 et menées notamment en Afrique du Sud (4), et en Thaïlande (5).
Aussi, l’OMS avait émis il y a un an une note précisant qu’un nouveau vaccin contre le papillomavirus, Cecolin®, avait été pré qualifié pour une prescription à dose unique (6-7). Cette note venait confirmer un premier avis de l’OMS émis en avril 2022 et déjà en faveur d’une vaccination à une dose. L'OMS estimait que l'adoption d’un schéma à dose unique avait ainsi permis de vacciner au moins 6 millions de filles supplémentaires en 2023. Ces chiffres avaient permis au Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l'OMS de déclarer « que l’ajout d’une nouvelle option pour un calendrier de vaccination anti-HPV à une dose, avait permis de faire un pas de plus vers l'élimination du cancer du col de l'utérus ». Le Dr Kate O'Brien, directrice du département Vaccination, vaccins et produits biologiques de l'OMS, avait quant à elle précisé que « compte tenu des difficultés persistantes d'approvisionnement, l'ajout d'un vaccin unidose permettrait aux différents pays de disposer d'un plus grand choix de vaccins pour vacciner davantage de jeunes filles. »
Il convient tout de même de préciser que ces résultats encourageants de la vaccination à une dose doivent être confirmés par des études sur la prévention contre les lésions infiltrantes. En attendant, on rappelle qu’en France, la vaccination est recommandée et remboursée avec le Gardasil9® pour toutes les jeunes filles et pour tous les garçons âgés de 11 à 14 ans révolus (deux injections à M0, M6) (8). Par ailleurs, dans le cadre du rattrapage vaccinal, la vaccination est recommandée et remboursée pour les deux sexes entre 15 et 26 ans révolus (trois injections à M0, M2 et M6). On précise que toute nouvelle vaccination doit être initiée avec le vaccin Gardasil 9®. Les vaccins ne sont pas interchangeables et toute vaccination initiée avec le Cervarix® doit être menée à son terme avec le même vaccin.
1) Kreimer AR, et al. Noninferiority of One HPV Vaccine Dose to Two Doses. N Engl J Med. 2025 Dec 3. PMID: 41337735.
2) Basu P, et al. Vaccine efficacy against persistent human papillomavirus (HPV) 16/18 infection at 10 years after one, two, and three doses of quadrivalent HPV vaccine in girls in India: a multicentre, prospective, cohort study. Lancet Oncol. 2021 Nov;22(11):1518-1529.
3) Joshi S, et al. Evaluation of immune response to single dose of quadrivalent HPV vaccine at 10-year post-vaccination. Vaccine. 2023 Jan 4;41(1):236-245.
4) Delany-Moretlwe S, et al. Impact of single-dose HPV vaccination on HPV 16 and 18 prevalence in South African adolescent girls with and without HIV. J Natl Cancer Inst Monogr. 2024 Nov 1;2024(67):337-345.
5) Jiamsiri S, et al. Community intervention of a single-dose or 2-dose regimen of bivalent human papillomavirus vaccine in schoolgirls in Thailand: vaccine effectiveness 2 years and 4 years after vaccination. J Natl Cancer Inst Monogr. 2024 Nov 1;2024(67):346-357.
6) https://www.who.int/news/item/04-10-2024-who-adds-an-hpv-vaccine-for-si…
7) Anderer S. WHO Approves Another HPV Vaccine for Single-Dose Use. JAMA. 2024 Nov 8.
8) https://sante.gouv.fr/prevention-en-sante/preserver-sa-sante/vaccinatio…
