Quelles sont les performances diagnostiques de la colposcopie et les facteurs qui l’influencent ?

Commentaire de l’article : Valls et al. Performance of standardised colposcopy to detect cervical precancer and cancer for triage of women testing positive for human papillomavirus: results from the ESTAMPA multicentric screening study. Lancet Reg Health Am. 2023(20);26:100593. 

La connaissance des performances diagnostiques de la colposcopie est essentielle. Elle permet d’apprécier les forces et limites de l’outil clé du diagnostic des lésions précancéreuses du col utérin dans les programmes de dépistage actuels. A ce jour, on retient deux publications qui avaient évalué cette question. La première, la méta-analyse de Mitchell et al. Publiée en 1998 avait conclu à une sensibilité de la colposcopie à faire le diagnostic d’une lésion intraépithéliale de haut grade (LIEHG) du col utérin de 85 % pour une spécificité de 69 %.1 La seconde, un essai prospectif publié en 2008 par Cantor et al., avait conclu à une sensibilité de la colposcopie réalisée après un test de dépistage anormal pour le diagnostic des LIEHG de 71,4 % pour une spécificité de 81,3 %.2 Cette dernière étude avait surtout montré que les performances diagnostiques de la colposcopie étaient très inférieures lorsqu’elle était réalisée comme test de dépistage, à savoir sans être guidée par le résultat d’un test de dépistage anormal préalable (sensibilité de 28,6 % et spécificité de 87,7 %).

Cette récente publication a été réalisée à partir des données d’un large essai prospectif multicentrique sud-américain qui avait pour but d’évaluer les performances du dépistage par test HPV et les différentes méthodes de triage des patientes ayant un test HPV positif.3,4  Au total, sur les 42502 patientes initialement incluses dans cet essai entre 2012 et 2021, 5985 (14,1 %) ont eu un test HPV positif et 4499 ont été incluses dans l’étude.3 L’âge médian des patientes était de 46 ans. Un diagnostic de LIEHG a été fait dans 916 (20,3 %) cas et de cancer dans 53 (1,2 %) cas. Cette publication confirme les bonnes performances de la colposcopie pour le diagnostic d’une LIEHG lorsqu’elle est utilisée comme test diagnostique dans une population de patientes ayant un test de dépistage anormal (sensibilité de 90,4 % et spécificité de 50,1 %). Elle met aussi en avant les limites de celle-ci lorsqu’elle est utilisée chez des populations plus âgées, principalement du fait des modifications associées à l’atrophie post-ménopausique. Ainsi, sa sensibilité pour le diagnostic des CIN3+ est de 91,2 % lorsqu’elle est réalisée chez des patientes de 30 à 49 ans et baisse à 77 % chez des femmes plus âgées (50-65 ans). Elle illustre également l’impact de la position de la limite interne de la zone de transformation (aussi appelée ligne de jonction pavimento-cylindrique). La sensibilité de la colposcopie pour le diagnostic des CIN3+ est de 93,8 % et 93,6 % pour les jonctions de type 1 et 2, respectivement, et diminue à 75,8 % pour les types 3. Ce résultat suggère que les performances de la colposcopie sont équivalentes à partir du moment où la jonction est visualisée en totalité, sans réelle distinction entre les types 1 et 2.

Rappelons enfin que lorsque l’on parle des performances diagnostiques de la colposcopie, on exclue les performances des prélèvements cervicaux (biopsie ou curetage de l’endocol). Ce terme ne désigne que les capacités visuelles de la colposcopie à prédire la présence d’une lésion histologique. Les résultats montrent que si les performances diagnostiques de la colposcopie sont bonnes, elles restent limitées et seule l’analyse histologique apporte une certitude diagnostique. Il reste donc essentiel que le compte-rendu de la colposcopie ne propose pas un diagnostic histologique basé sur l’interprétation d’images colposcopiques mais bien une interprétation d’un tableau colposcopique. C’est ce que propose la nouvelle classification des images colposcopiques en classant les différents tableaux colposcopiques en col normal, anomalies mineures (TAG1), anomalies majeures (TAG2) et suspicion de cancer (TAG3).5 Retenons bien qu’une TAG1 ne signifie pas lésion de bas grade (LIEBG) mais probabilité importante de LIEBG et faible de LIEHG alors que TAG 2 signifie une probabilité importante de LIEHG.

BIBLIOGRAPHIE

1. Mitchell, M. F., Schottenfeld, D., Tortolero-Luna, G., Cantor, S. B. & Richards-Kortum, R. Colposcopy for the diagnosis of squamous intraepithelial lesions: a meta-analysis. Obstet Gynecol 91, 626–631 (1998).

2. Cantor, S. B. et al. Accuracy of colposcopy in the diagnostic setting compared with the screening setting. Obstet Gynecol 111, 7–14 (2008).

3. Valls, J. et al. Performance of standardised colposcopy to detect cervical precancer and cancer for triage of women testing positive for human papillomavirus: results from the ESTAMPA multicentric screening study. Lancet Glob Health 11, e350–e360 (2023).

4. Almonte, M. et al. Multicentric study of cervical cancer screening with human papillomavirus testing and assessment of triage methods in Latin America: the ESTAMPA screening study protocol. BMJ Open 10, e035796 (2020).

5. Mergui, J.-L., Gondry, J., Hocquemiller, R. & Carcopino, X. [Revision of the French colposcopic terminology]. Gynecol Obstet Fertil Senol 51, 239–248 (2023).