La colposcopie est-elle un outil performant pour le suivi post-thérapeutique ?

Lecture critique de l’article : Heinonen et al. Role of colposcopy after treatment for cervical intraepithelial neoplasia. Cancers.  2020;12(6):1683.

En désignant le test HPV comme l’examen clé du suivi post-thérapeutique des lésions intraépithéliales du col de l’utérus, les nouvelles recommandations ont totalement délaissé la cytologie mais aussi la colposcopie systématique [1]. Si la cytologie n’a plus aucune indication pour la surveillance des femmes traitées, la colposcopie n’est plus utilisée que pour le diagnostic des récidives chez les femmes ayant un test HPV positif. Une telle recommandation est basée sur les preuves d’une colposcopie ayant des performances limitées et non adaptées à la surveillance de ces femmes ayant un col cicatriciel.

Cette étude prospective Finlandaise apporte de nouveaux éléments à l’évaluation de la colposcopie comme test de suivi [2]. Au total, 419 patientes ayant été traitées pour une lésion intraépithéliale de haut grade par résection à l’anse diathermique (RAD) ont été incluses. Elles étaient suivies par un test HPV réalisé à 6 mois du traitement. En même temps que le test HPV, toutes ces patientes avaient un examen cytologique et une colposcopie. Elles étaient ensuite vues tous les 6 mois pour une surveillance globale de 24 mois. Lors de la colposcopie, une biopsie dirigée était réalisée en cas d’anomalie faisant suspecter une récidive. Lorsque la colposcopie était jugée normale, des biopsies systématiques étaient réalisées de manière aléatoire. Au total, une récidive a été diagnostiquée chez seulement 10 femmes (2,4 %). Cinq d’entre elles ont été diagnostiquées à la visite du 6e mois, et les 5 restantes à la visite du 12e mois. Les données de la colposcopie étaient disponibles pour 407/419 (97,1 %) patientes. Un faux positif de la colposcopie a été observé chez 11 (2,7 %) patientes pour lesquelles une récidive a été suspectée mais dont la biopsie cervicale était négative. La colposcopie à 6 mois a été jugée normale chez 396 femmes (97,3 %), mais une lésion intraépithéliale de haut grade a été diagnostiqué à la biopsie systématique chez 9 (2,3 %) d’entre elles. Au final, les performances de la colposcopie utilisée comme test de guérison à 6 mois étaient très limitées (sensibilité : 0 %, spécificité : 97 %, VPP : 0 %, VPN : 98 %). Les performances de la colposcopie ont été comparées à celles de la cytologie, du test HPV et des marges. Sans surprise, le test HPV était de très loin, le test de validation du succès thérapeutique le plus performant (sensibilité : 100 %, spécificité : 85 %, VPP : 12 %, VPN : 100 %).

Cette étude illustre parfaitement les limites de la colposcopie utilisée comme test de suivi post-thérapeutique. Les raisons évoquées sont multiples : subjectivité de l’examen, remaniement cicatriciel du col perturbant la lecture colposcopique de celui-ci, accessibilité de la jonction en post-thérapeutique... Alors que doit-on retenir de ces résultats ? Tout d’abord qu’avec une VPN de 100 %, le test HPV est de très loin le meilleur test pour valider le succès du traitement d’une lésion intraépithéliale de haut grade du col de l’utérus. Avec trop de fausses alertes et de faux négatifs, les performances de la colposcopie ne permettent pas d’indiquer sa pratique systématique dans cette indication. Utilisé comme tel, cet examen expose à la morbidité des fausses alertes et ne permet pas d’éliminer une récidive. Comme pour le dépistage primaire, la colposcopie ne doit pas être utilisée seule et ne doit être pratiquée qu’à visée diagnostique chez des patientes préalablement sélectionnées. Son indication doit rester limitée aux patientes ayant un test HPV positif. Un test HPV négatif permet de garantir le succès thérapeutique ; chez ces patientes la colposcopie est inutile.

Pour en savoir plus

[1]  INCa. Surveillance post-thérapeutique des lésions intraépithéliales du col de l’utérus 2019. https://www.e-cancer.fr/Expertises-et-publications/Catalogue-des-public…

[2]  Heinonen A, Jakobsson M, Kiviharju M, Virtanen S, Aro K, Kyrgiou M, et al. Role of Colposcopy after Treatment for Cervical Intraepithelial Neoplasia. Cancers 2020;12. https://doi.org/10.3390/cancers12061683.

 

 
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