COVID et sperme : quels risques en Assistance Médicale à la Procréation (AMP) ?

Les effets du COVID-19 sur la fertilité masculine et féminine restent incertains.

Durant la période de pandémie et au plus fort de la crise, la grande majorité des Centres d’AMP dans le monde ont arrêté toute activité.

Depuis 3 mois, de nombreux articles sont parus, analysant les risques de transmission materno-fœtale, la présence de virus ou de récepteurs viraux au niveau du liquide folliculaire, des sécrétions vaginales, et chez l’homme au niveau testiculaire et du liquide séminal.

Chez l’homme, les principales études ont été menées chez des patients infectés par le COVID :

  • soit par recherche de la co-expression ACE2 (récepteur cellulaire pour la protéine S de SARS-COV-2) et du récepteur TMPRSS2, qui permet l’amorçage de la protéine S, optimisant l’entrée de SARS-COV-2 dans la cellule,
  • soit par recherche directe de l’ARN viral par PCR dans le liquide séminal.

 

L’étude WANG Z. avait préalablement porté sur l’analyse transcriptomique de cellules testiculaires et montré la présence de récepteurs ACR2 au niveau des cellules de LEYDIG, de SERTOLI et des spermatogonies dans le testicule humain. Cette protéine est une cible potentielle d’entrée du virus SARS-COV au niveau tissulaire. Cette analyse pouvait laisser craindre une atteinte virale au niveau du tractus génital masculin.

 

L’étude de FENG Pan et coll. (Université de WUHAN, Chine et Center For Male Reproductive Medicine Cornel University – NEW YORK, USA) (fertil.steril. avril 2020) a évalué la présence du virus dans le sperme et le profil d’expression au niveau testiculaire de ACE2 et TMPRSS.

Cette étude a été menée chez 34 patients ayant une infection à COVID-19. L’âge moyen des hommes était de 37 ans, avec un BMI de 25 kg/m². Le délai médian entre le diagnostic de l’infection et le recueil de sperme était de 31 jours. Sur 34 patients, 6 ont présenté une « sensibilité scrotale » notée en cours d’infection. L’étude n’a pas retrouvé la présence de virus au niveau du sperme.

Quant à l’étude tissulaire, au niveau testiculaire, sur 6.490 échantillons cellulaires examinés, seulement 4 cellules ont présenté la co-expression des récepteurs cellulaires ACE2 et TMPRSS2.

D’après les auteurs, ces données sont rassurantes quant au risque de contamination virale au niveau du sperme et au risque de présence au niveau testiculaire d’une pénétration virale du COV-19.

L’étude de CI SONG et coll. (Département de Médecine de la Reproduction et d’Epidémiologie de NANGING et Hôpital de WUHAN, Chine) (Bio. Reprod. Avril 2020) s’est basée sur les analyses bio-informatiques récentes selon lesquelles l’angiotensin-converting enzym 2 (ACE2), cible du COV-19, pourrait être augmentée au niveau testiculaire. Les auteurs ont analysé les risques de transmission virale sexuelle d’origine masculine en recherchant la présence de l’ARN viral au niveau du sperme de 12 hommes atteints du COVID et au niveau testiculaire chez un patient décédé d’une infection de COV-19.

Cette étude a été menée entre le 31 janvier et 30 avril 2020.

La confirmation de l’atteinte virale a été faite à partir de recherche par PCR  (prélèvements nasaux pharyngés) de l’ARN viral et des tests sérologiques.

L’âge des patients variait entre 22 et 38 ans, l’étude tissulaire testiculaire a été réalisée après autorisation de la famille chez un patient âgé de 67 ans décédé.

Chez les autres patients, les auteurs ne notaient pas de syndrome de dépression respiratoire majeur.

Tous les patients ont bénéficié d’un traitement antiviral, 7 patients ont bénéficié d’une association à une antibiothérapie, 3 à une association à l’Interféron.

Résultat

Les auteurs n’ont pas retrouvé de présence de virus (ARN viral par PCR) au niveau du sperme chez les 13 échantillons étudiés.

L’étude histologique testiculaire chez le patient décédé a été négative, tant en termes de présence virale qu’en termes d’expression de l’ACE2.

Les auteurs notent les limitations de leur étude :

  • faible échantillon de cas rapportés,
  • les tests ont été réalisés à distance de l’épisode d’infection,
  • ils notent qu’une étude significative devrait porter également en phase d’incubation et au mieux en phase aigue.

Cette étude rapporte néanmoins des données rassurantes, même si des phénomènes d’orchite concomitante à l’infection virale ont été rapportés, probablement liés au syndrome fébrile et à des mécanismes d’auto-immunité.

Conclusion

Même si des études laissent planer un risque sur la possibilité de présence virale au niveau testiculaire ou spermatique, à ce jour, les études sont rassurantes mais n’excluent pas les mesures de précaution à prendre chez des patients infectés, notamment un délai de prise en charge en cas d’assistance médicale à la procréation, et la réalisation chez l’homme de recherches virales par PCR et sérologie.

Des recommandations de l’AFU (Association Française d’Urologie) en termes d’assistance médicale à la procréation seront prochainement publiées.

 
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