Actualisation à 9 ans de l’ACOSOG Z0011 (curage axillaire versus abstention en cas de ganglion sentinelle métastatique)

Curage axillaire après ganglion sentinelle métastatique : suite et fin

Du 3 au 7 juin 2016, à Chicago, s'est tenu le plus grand congrès international sur le cancer (ASCO). Cette 52ème édition a réuni comme chaque année plus de 30 000 personnes impliquées dans le domaine de la cancérologie. L’immunothérapie s'est retrouvée à nouveau au cœur des présentations. Pour autant, les progrès de l’immunothérapie n’empêchent pas ceux d’autres modalités thérapeutiques plus conventionnelles. Ainsi, Giuliano, à l’origine en 1993 de la biopsie du ganglion sentinelle (GS) dans le cancer du sein, a présenté les résultats à plus de 9 ans de l’essai ACOSOG-Z0011 dont la publication des premiers résultats à 6 ans en 2011 avait bousculé nos « certitudes » en remettant en cause les bénéfices du curage axillaire (CA). Cette étude randomisée de phase 3, multicentrique avait comparé le CA complémentaire en cas d’envahissement métastatique « limité » du GS à l’abstention. Cette étude qui devait initialement recruter environ 1900 patientes a en définitive inclus seulement 891 patientes ayant un cancer du sein initialement classé N0 avec un envahissement macro ou micrométastatique du GS. A 6,3 ans la survie globale (SG) et la survie sans récidive (SSR) étaient comparables dans les 2 groupes. Il n’y avait pas plus de récidive régionales (RR) dans le groupe abstention que dans le groupe CA complémentaire (0,5 vs 0,9%) qui d’ailleurs n’avait que seulement 27% d’envahissement ganglionnaire dit « non sentinelle ». La publication de ces résultats en 2011 avait fait l’objet de nombreuses critiques méthodologiques. Ainsi, le nombre de patientes incluses était très inférieur (<50%) à celui calculé comme nécessaire initialement (891 inclues et 856 évaluables sur 1900 planifiées). De plus, le recul avait été considéré comme insuffisant et les champs d’irradiation délivrés aux patientes non spécifiés dans la publication.

En plénière à l’ASCO Giuliano confirme à 9,3 ans les résultats précédents. Ainsi, le taux de RR était de 1,5% après GS seul contre 0,5% après CA complémentaire (non différent statistiquement). La SG et la SSR n’étaient pas non plus statistiquement différentes entre les deux groupes. En analyse multivariée, la présence de macrométastase(s) dans les GS n’avait pas d’impact négatif statistiquement sur le taux de RR. De même, l’absence de CA ainsi que la présence de macrométastases n’étaient pas des facteurs péjoratifs en analyse multivariée pour la SG. Giuliano conclut, que, après un suivi à long terme, la biopsie du GS seule permet un excellent contrôle loco-régional comparable au curage axillaire complémentaire en cas de GS métastatique pour des patientes sélectionnées (« critères ACOSOG » : traitement conservateur du sein et radiothérapie du sein et traitement systémique [hormonothérapie ou chimiothérapie] et moins de 3 GS métastatique).

Cette actualisation à près de 10 ans de cette étude lève la critique du recul insuffisant souligné par les défenseurs du CA.

Il n’y a désormais plus de raison scientifiquement valable à poursuivre systématiquement la pratique du CA en cas de GS métastatique quelque soit la taille de la métastase, comme recommandé déjà depuis quelques années par les principales sociétés savantes étrangères. Par ailleurs, cette abstention légitime de CA complémentaire doit conduire en parallèle à renforcer la qualité de l’exploration radiologique du creux axillaire, ce qui permet d’exclure les patientes avec des envahissements ganglionnaires métastatiques multiples.