Augmentation du risque de fausse couches chez les patientes ayant de l’endométriose

L’endométriose, pathologie inflammatoire dont la physiopathologie reste mal élucidée, est source de douleurs pelviennes et d’infertilité (1). Elle affecte 10 à 15% des femmes en âge de procréer. L’endométriose a un impact sur la fertilité à 3 niveaux: la cavité abdominopelvienne, l’ovaire et l’utérus (1). Jusqu’alors, il existait un débat sur le lien possible entre endométriose et sur-risque de fausses couches. Les rares études sur le sujet étaient peu précises et contradictoires (2, 3, 4). Cette nouvelle étude épidémiologique, menée à Paris à l’hôpital Cochin, dans le service du Pr Chapron, ne laisse plus de place au doute.

L’étude de Santulli et al. est une étude retrospective réalisée à l’Hôpital Cochin entre 2004 et 2014, regroupant 750 patientes ayant déjà été enceintes. Toutes ces patientes avaient subi une opération gynécologique bénigne et avaient répondu à un questionnaire préopératoire. En fonction des constatations per opératoires, les patientes avaient été séparées en 2 groupes “endométriose” et “témoin”: 284 patientes étaient endométriosiques, les 466 autres étant indemnes de la maladie.

 

Quel était le bilan de cette analyse?

L’équipe du Dr Pietro Santulli a analysé 478 grossesses pour le groupe “endométriose” et 964 pour le groupe “contrôle”. Sur les 478 grossesses du groupe “endométriose”, 139 avaient abouti à une fausse couche (soit 29%) contre 187 (soit 19.4%) dans le groupe “contrôle”. Cette différence était significative et montrait donc un sur-risque de fausse couche au premier trimestre.

Dans cette étude, on observait certains facteurs de confusion tels un antécédent dinfertilité. Après analyse du groupe “jamais d’infertilité” et du groupe “au moins un épisode d’infertilité par le passé”, le taux de fausses couches était de 20%, chez les patientes endométriosiques versus 12% (p=0.003) dans le premier groupe et 53 % versus 30% (p=0.001) dans le second groupe.

En regardant le phénotype des patientes ayant de l’endométriose, il y avait un taux plus élevé de fausses couches chez celles ayant de l’endométriose superficielle ou OSE (37.9%) comparés au groupe OMA (kyste endométriosique) (26.9%) et DIE (endométriose profonde) (27.2%).

L’endométriose superficielle ou OSE se caractérise par la présence d’implants adhérents à la surface du péritoine; l’OMA correspond au kyste endométriosique à paroi épaisse et contenu hématique; l’endométriose profonde ou DIE, quant à elle, se définit par la pénétration de la lésion au moins 5 mm sous le péritoine, ou par l’envahissement de la musculeuse de l’organe cibe.

Cette étude ne concernait que des patientes opérées chirurgicalement. Dans le groupe contrôle, certaines pathologies pouvaient expliquer un taux plus élevé de fausses couches: fibromes, kystes ovariens, pathologies tubaires.

Il existe donc un sur-risque de fausse couche précoce au premier trimestre de grossesse en cas d’endométriose. Cette étude ouvre les portes du futur et devrait susciter un grand nombre d’autres études sur l’impact de l’endométriose en cas de grossesse. Actuellement, une étude nationale Endobst, dirigé par le Dr Louis Marcellin est en cours en France et vise à étudier l’impact de l’endométriose sur différents paramètres de la grossesse (dont les risques de prématurité) et inversement… En effet, on s’est rendu compte que la grossesse peut améliorer les symptômes des femmes endométriosiques.

 

Pour en savoir plus:

  1. de Ziegler D, Borghese B, Chapron C. Endometriosis and infertility: pathophysiology and management. Lancet 2010; 376: 730-8
  2.  Vercellini P, Parazzini F, Pietropaolo G, Cipriani S, Frattaruolo MP, Fedele L. Pregnancy outcome in women with peritoneal, ovarian and rectovaginal endometriosis: a retrospective cohort study. BJOG 2012; 119: 1538-1543
  3. Sinaii N, Plumb K, Cotton L, Lambert A, Kennedy S, Zondervan K, Stratton P. Differences in characteristics among 1000 women with endometriosis based on extent of disease. Fertil Steril 2008; 89: 538-545
  4. Matalliotakis I, Cakmak H, Dermitzaki D, Zervoudis S, Goumenou A, Fragouli Y. Increased rate of endometriosis and spontaneous abortion in      an in vitro fertilization program: no correlation with epidemiological factors. Gyneco; Endocrinol 2008; 24: 194-198

 
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