Traitement de l’infertilité : discrimination entre H et F ?

Pas de prise en charge après 43 ans pour les femmes, mais absence de limite d’âge concernant la prise en charge des traitements masculins de l’infertilité :

une discrimination prohibée par la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme ?...

(Cour de cassation, arrêt du 21 janvier 2016)

   Comme fréquemment dans les rubriques de jurisprudence sur la prise en charge des traitements de l’infertilité, une femme ayant dépassé son 43ème anniversaire demande auprès de sa CPAM la prise en charge d’une fécondation in vitro réalisée avec succès en Espagne.

   L’état du droit (notamment articles R. 332-4 et L. 162-I-7 du code de la Sécurité sociale) est fréquemment rapporté dans cette rubrique, compte tenu de l’évolution de la jurisprudence française.

   En l’espèce, un argument intéressant était soulevé à l’appui du pourvoi, qui conduit la Cour de cassation a cassé l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Caen le 10 janvier 2014 :

« Vu l’article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

« Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’après un premier refus en avril 2010, Mme X…, née en 1964, a demandé auprès de la caisse primaire d’assurance maladie de l’Orne (la caisse) la prise en charge d’une fécondation in vitro réalisée avec succès en Espagne en octobre 2010 ; que la caisse ayant rejeté sa demande, Mme X… a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale ;

« Attendu que pour accueillir ce recours, l’arrêt relève que la caisse fonde en cause d’appel, les deux refus de prise en charge sur le fait non contesté que Mme X… avait dépassé l’âge de 43 ans et qu’en conséquence les soins envisagés ne figuraient pas parmi ceux dont la prise en charge est prévue par la réglementation française, mais que l’organisme social n’invoque aucune raison objective permettant à la cour de justifier la différence de traitement instaurée par ces dispositions entre les femmes, selon qu’elles aient plus ou moins de 43 ans ; que, de même, la caisse qui ne conteste pas que la prise en charge des traitements masculins de l’infertilité n’est enfermée dans aucune limite sans en donner une raison objective, ne met pas la cour en mesure d’écarter l’existence sur ce point d’une discrimination entre homme et femme ; que l’article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, auquel Mme X… se réfère expressément, dispose sous le titre de discrimination que : « La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation » ; que dès lors rien ne vient justifier la limite de la quarante-troisième année imposée par la règlementation française aux femmes candidates à une procréation médicalement assistée ;

« Qu’en statuant ainsi, sans préciser celui des droits et libertés garantis par la Convention et par ses protocoles faisant l’objet de la discrimination qu’elle entendait relever au regard des exigences du texte susvisé, la cour d’appel a violé ce dernier ;

« Par ces motifs, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres moyens des pourvois ;

« Casse et annule, en toutes ses dispositions, l’arrêt n° RG 11/02273 rendu le 10 janvier 2014, entre les parties, par la cour d’appel de Caen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Rouen. »

Les motifs du pourvoi sont consultables sur legifrance.fr.

 
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