Chirurgie gynécologique robotique : quel bilan ? quel avenir ?

Plus de 10 ans après l’arrivée des robots chirurgicaux dans nos blocs opératoires, où en sommes-nous aujourd’hui ?

Décriée par certains, portée aux nues par d’autres, la chirurgie robotique est-elle la révolution chirurgicale initialement annoncée ? 

A-t-on vraiment besoin d’un robot pour faire de la chirurgie gynécologique mini-invasive ?

La réponse à ces questions doit être nuancée et il est intéressant de se pencher sur le bilan de plusieurs années de son utilisation. Ce bilan est d’autant plus intéressant, que la chirurgie gynécologique est aujourd’hui la première spécialité dans le monde à utiliser la chirurgie robotique, devant la chirurgie urologique. Celle-ci en était pourtant jusqu’à 2016 la première utilisatrice.

Avec une progression de 18 % en 2019, le nombre d’interventions robotiques réalisées chaque année dans le monde est en constante augmentation, essentiellement du fait de la chirurgie gynécologique. En comparaison, le nombre d’interventions robotiques en urologie stagne maintenant depuis près de 5 ans.

Les avantages du robot sont maintenant bien connus : ergonomie améliorée pour le chirurgien, précision visuelle augmentée avec vision 3D magnifiée, contrôle direct par le chirurgien de 3 bras opératoires et de la caméra et possibilité de la fluorescence pour le repérage des ganglions sentinelles.

A ceci s’ajoute l’arrivée de modèles de robots plus récents dont l’ergonomie et la facilité d’installation et d’utilisation ont encore été augmentés. Initialement décrit comme un défaut majeur du robot, les temps d’installation et opératoire, sont en fait comparables à ceux de la laparoscopie conventionnelle, dès lors que l’équipe chirurgicale a acquis l’expérience de cette technologie.

La courbe d’apprentissage de la chirurgie robotique est d’ailleurs un de ses énormes avantages. En comparaison à la chirurgie laparoscopique conventionnelle, la chirurgie robotique offre une courbe d’apprentissage extrêmement rapide expliquant d’ailleurs son succès aux USA où de nombreux chirurgiens ont pu accéder à la chirurgie mini-invasive grâce à cette technologie, passant directement de la laparotomie à la chirurgie laparoscopique robotique sans être passé par l’apprentissage de la laparoscopie conventionnelle. Ce point a d’ailleurs été souligné dans le rapport de l’académie nationale de chirurgie publié en 2020 sur l’état des lieux en France de la chirurgie robotique. Celui-ci constatait la perte du leadership de la France en chirurgie mini-invasive au profit des USA, pourtant très en retard il y a 10 ans. L’utilisation massive de la chirurgie robotique par les chirurgiens gynécologues américains est la cause de ce renversement.  Du fait de courbes d’apprentissages extrêmement rapides, pour la même indication opératoire, le robot permet de diminuer significativement les laparotomies au profit de la voie d’abord mini-invasive. En France, nous ne faisons pas encore assez profiter nos patientes de cet avantage et pourrions encore baisser le nombre de laparotomies réalisées chaque année. A titre d’exemple, pour l’année 2017, les données du PMSI montrent que près d’un quart des hystérectomies pour pathologies bénignes étaient encore réalisées par laparotomie dans notre pays. Ce taux était de 38 % pour le cancer de l’endomètre, pour lequel la chirurgie laparoscopique est pourtant recommandée en première intention. Dans son rapport de 2020, l’académie nationale de chirurgie estimait que chaque année, ce sont plus de 6000 patientes qui pourraient éviter une laparotomie pour une hystérectomie si un accès aux plateformes robotiques était satisfaisant pour les gynécologues français.

Les indications actuelles de la chirurgie robotique en gynécologie sont l’hystérectomie pour pathologie bénigne, la chirurgie des cancers gynécologiques pelviens et en particulier du cancer de l’endomètre, la promontofixation et la myomectomie. Si le bénéfice par rapport à la laparotomie n’est plus discuté, le robot apporte également des bénéfices par rapport à la cœlioscopie conventionnelle. Certes un chirurgien expérimenté en cœlioscopie n’a pas besoin d’un robot chirurgical pour réaliser ces gestes, mais celui-ci apporte des bénéfices réels pour la patiente. Utilisé pour l’hystérectomie bénigne et la chirurgie du cancer de l’endomètre, en comparaison avec la cœlioscopie, le robot permet de diminuer le saignement per opératoire et le recours à la transfusion, de diminuer les complications per opératoires, de diminuer la durée d’hospitalisation et de réduire la probabilité d’une laparoconversion. Enfin, la chirurgie robotique est particulièrement adaptée à la chirurgie de l’obèse qu’elle facilite.

Combinée à la préparation préopératoire de la patiente, à l’optimisation des techniques d’analgésie, à l’utilisation de systèmes d’insufflation basse pression, à la lutte contre l’hypothermie per opératoire, la chirurgie robotique contribue à la réhabilitation améliorée après chirurgie (RAC).

Elle participe ainsi la diminution de la morbidité opératoire et au raccourcissant des durées d’hospitalisation.

L’explosion des coûts engendrés par la chirurgie robotique reste aujourd’hui le principal frein à son utilisation. Si l’optimisation du geste et la mise en place de programmes de RAC permettent de diminuer en contrepartie les couts en réduisant les durées de séjour, seuls des volumes opératoires importants et une optimisation de l’utilisation du robot par les équipes permettent de balancer le surcout qu’il engendre. La problématique du cout est amenée de toutes façons à évoluer rapidement. La diminution par deux du prix des consommables en est déjà la preuve. L’arrivée sur le marché de concurrents et la diffusion de cette technologie fera inévitablement baisser encore les couts et permettra l’extension de cette technologie.

 
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