Les conditions du don de gamètes en France : cadre juridique et pratique

Introduction

Le don de gamètes (ovocytes ou spermatozoïdes) constitue un acte de solidarité permettant à de nombreux couples ou personnes seules d’accéder à la parentalité par assistance médicale à la procréation. Encadré par la loi de bioéthique, ce don obéit à des conditions strictes, à la fois médicales et juridiques, visant à garantir la sécurité, la gratuité et l’éthique du processus. Depuis la révision de la loi de bioéthique du 2 août 2021, le dispositif a évolué en profondeur, notamment avec la levée de l’anonymat du don pour l’enfant à naître.
Cet article propose une synthèse des conditions actuelles du don de gamètes en France, destinée aux médecins et sages-femmes impliqués dans l’information et la prise en charge des donneurs et des receveurs.

Le cadre légal du don de gamètes

Principes fondamentaux

Le don de gamètes en France repose sur trois principes : volontariat, anonymat (entre donneur et receveur) et gratuité. Le donneur ne peut recevoir qu’une indemnisation correspondant aux frais engagés (transport, perte de revenus, etc.), mais aucune rémunération directe.

Les donneurs et le couple receveur ou la femme non mariée receveuse ne connaissent pas leurs identités respectives.

Le don est encadré par le Code de la santé publique (articles L. 1244-1 à L. 1244-8) et supervisé par l’Agence de la biomédecine, qui agrée les centres de don et assure la traçabilité des gamètes.

Levée de l’anonymat entre le donneur et l’enfant : un changement majeur

Depuis le 1er septembre 2022, tout nouveau don de gamètes implique la possibilité, pour les enfants issus de ce don, d’accéder à la majorité à l’identité et aux données non identifiantes du donneur (âge, caractéristiques physiques, situation familiale, motivations du don). Le donneur doit donc consentir explicitement à cette transmission d’informations.

Les dons antérieurs à cette date demeurent soumis à l’ancien régime d’anonymat, sauf si le donneur choisit de lever cet anonymat en déposant son consentement auprès de la Commission d’accès aux données non identifiantes et à l’identité des donneurs (Cadece).

Don dirigé

Depuis la loi de 2021, il est désormais possible de donner ses gamètes à une personne désignée (don dirigé), sous réserve que la procédure respecte les principes de gratuité et de non-patrimonialité, et que les donneurs et receveurs soient pris en charge dans un même centre autorisé.

Conditions pour donner ses gamètes

Critères d’éligibilité

Le don est ouvert à toute personne majeure en bonne santé. Les critères varient selon le type de gamètes :

  • Don de spermatozoïdes :
    Hommes âgés de 18 à 44 ans révolus.
    Aucun antécédent notable personnel ou familial connu à risque.
    Absence de contre-indication médicale suite au bilan de santé.

  • Don d’ovocytes :
    Femmes âgées de 18 à 37 ans révolus.
    Aucun antécédent notable personnel ou familial connu à risque.
    Absence de contre-indication médicale suite au bilan de santé.

Le don peut être réalisé quelle que soit la situation familiale, y compris par des personnes ayant déjà eu des enfants, mais également par celles n’en ayant pas encore eu.

Consentement et délai de réflexion

Le consentement du donneur doit être recueilli par écrit (pour la réalisation du don et la transmission de son identité à sa descendance), après information exhaustive sur les conséquences médicales et juridiques du don.
Le donneur peut retirer son consentement à tout moment avant l’utilisation des gamètes.
Le consentement du conjoint ou de la conjointe n’est plus nécessaire pour donner ses gamètes (depuis septembre 2022).

Aspects médicaux et cliniques du don

Le parcours du donneur de spermatozoïdes comprend :

  • Consultation d’information et de consentement, avec recueil d’un premier échantillon (pour évaluation).

  • Bilan de santé afin d’évaluer l’absence de risque et de contre-indication au don (examen clinique, caryotype, bilan biologique et spermogramme).

  • Entretien avec un psychologue (discuter du rapport au don).

  • Collecte des échantillons, réalisée par plusieurs dons espacés dans le temps. En général 4 à 5 recueils sont proposés.

  • Mise en quarantaine des paillettes pendant six mois, suivie d’un contrôle sérologique avant mise à disposition.

Le parcours de la donneuse d’ovocytes comprend :

  • Consultations d’information et de consentement

  • Bilan de santé afin d’évaluer l’absence de risque et de contre-indication au don (examen clinique, caryotype, bilan biologique et échographie pelvienne).

  • Entretien avec un psychologue (discuter du rapport au don).

  • Stimulation ovarienne, identique à celle d’une FIV, avec surveillance échographique et hormonale.

  • Ponction ovocytaire sous anesthésie (le plus souvent générale ou locale).

  • Repos post-procédure et suivi médical : évaluation des effets indésirables (syndrome d’hyperstimulation, douleurs, etc.).

  • Les ovocytes sont ensuite mis en fécondation ou vitrifiés selon le protocole du centre.

Rôle du praticien

Les gynécologues, biologistes, et sages-femmes jouent un rôle clé dans :

  • l’information initiale des donneurs potentiels, notamment lors de consultations de contraception ou de suivi de fertilité

  • l’orientation vers les centres de don agréés

  • la surveillance clinique et la prévention des complications liées à la stimulation ou à la ponction ovocytaire

  • la coordination interdisciplinaire avec les biologistes, psychologues et coordinateurs du CECOS (Centre d'Etude et de Conservation des Œufs et du Sperme humain) .

Conclusion

Le don de gamètes en France repose sur un équilibre délicat entre altruisme, sécurité médicale et respect du droit des personnes issues du don. La levée de l’anonymat marque une évolution éthique majeure, transformant la relation entre le donneur, l’enfant, et le système de santé. Dans ce contexte, les gynécologues et sages-femmes occupent une position essentielle pour accompagner les donneurs et maintenir la confiance dans un dispositif fondé sur la transparence et la solidarité.
 

Sources

  • Loi n°2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique

  • Décret n°2022-1187 du 25 août 2022 relatif au don de gamètes

  • Code de la santé publique, articles L.1244-1 à L.1244-8

  • Agence de la biomédecine, Guide du don de gamètes, 2024

  • Merck, Nouvelle loi de bioéthique & parcours en AMP, 2023

 

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