Utilisation de contraception hormonale et risque d’endométriose : résultats d’une étude de cohorte suédoise

En Europe, la latence au diagnostic dans endométriose est en moyenne de 6 à 8 ans. A ce jour, il n’existe pas de programme de dépistage ou de biomarqueurs de la maladie facilement accessibles. Des outils diagnostiques à partir d’algorithmes utilisant l’intelligence artificielle permettent une nouvelle approche de dépistage.

La première ligne thérapeutique fait appel à la contraception hormonale (CH), soit estroprogestative (COP) soit progestative seule (CP) en utilisant alors l’atrophie du tissu endométrial avec une maitrise, au moins partielle, de l’inflammation et les lésions.

La thérapeutique hormonale est souvent prescrite avant même d’avoir un besoin contraceptif chez des jeunes adolescentes pour traiter une dysménorrhée souvent invalidante. Il est vraisemblable que 2/3 des adolescentes souffrant de dysménorrhée pourrait avoir de l’endométriose et sûrement plus encore chez celles dont les douleurs pelviennes deviennent chroniques et/ou persistantes sous traitement.

Les études antérieures avaient montré que ces douleurs pelviennes résistantes aux traitements hormonaux, et aux diverses thérapies antalgiques, pourraient correspondre à des lésions d’endométriose chez 50 à 65 % de ces adolescentes.
 

Une toute nouvelle étude vient de paraître dans le BJOG pour tenter de faire le point sur les relations entre l’endométriose et l’utilisation d’une contraception hormonale.

Le but de cette étude suédoise est de déterminer si l’utilisation précoce d’une contraception hormonale et/ou l’impossibilité de trouver une moyen thérapeutique efficace pourraient être des signaux d’alarme en faveur d’une endométriose. Les auteurs ont voulu aussi rechercher si l’utilisation une contraception hormonale pourrait réduire le risque d’endométriose.

Les auteurs suédois ont utilisé des registres nationaux répertoriant pour les uns les pathologies, pour les autres les prescriptions thérapeutiques ou des données socio-démographiques.

Dans cette cohorte rétrospective, les auteurs ont pu inclure 720 805 femmes âgées de 12 à 27 ans entre 2005 et 2017. La prescription d’une CH a pu être analysée avec précision dans cette population.

Un diagnostic d’endométriose a été posé chez 3268 femmes, ce qui correspond à une incidence de 4,95 pour 10 000 personnes années. La moyenne d’âge de la cohorte était de 17 ans et 6 mois et le diagnostic d’endométriose en moyenne à l’âge de 21,2 ans +/ -3 ans.

Les femmes atteintes d’endométriose avaient certaines particularités comparativement aux femmes indemnes:

  •  plus souvent nées dans les pays nordiques avec un bon niveau d’éducation,
  •  deux fois plus souvent mariées et mères,
  • utilisation de CH avant le diagnostic majoré : 89,3 % contre 67 %
  • utilisation de CH avant l’âge de 15 ans X 3 : 9,1 % vs 3,8 %
  • plus grand nombre de CH testées : plus de trois différentes CH associé à une augmentation du risque d’avoir un diagnostic ultérieur d’endométriose X 2 (HR 2,31 IC à 95 % : 1,71 à 3,12)
  • début de la CH plus jeune : particulièrement chez les filles âgées de 12 à 14 ans (HR 2,53 IC à 95 % : 2,21 à 2,90)
  • plus de risque d’avoir une dysménorrhée et une infertilité : 39,3 % et 6,9 % respectivement
  • dépression 2 X plus fréquente : 14,3 % vs 7,3  %

Une plus longue durée de CH était associée à une diminution du risque d’endométriose en particulier pour plus de cinq ans d’utilisation (HR 0,48 IC à 95 %. 0,43 à 0,54) sans différence notable selon le type COP ou CP.

Pour conclure, les auteurs invitent à considérer comme véritables signaux d’alarme en faveur d’une endométriose : - l’initiation très jeune d’une contraception hormonale - l’essai de plus de 3 contraceptions différentes -l’échec d’une hormonothérapie.

Bien sûr, de nombreux biais existent :

  • cette étude s’appuie sur des registres et il est toujours difficile d’établir une relation de causalité entre les observations retrouvées.
  • concernant les prescriptions, il est établi que l’adhésion des jeunes patientes aux traitements est toujours sujette à caution
  • l’étude a suivi des femmes de 12 à 27 ans alors que le diagnostic d’endométriose est habituellement plus tardif, autour de la trentaine.

Dans cette cohorte, la longue durée d’utilisation de la CH est associée à un moindre risque d’endométriose. La CH pourrait ainsi diminuer la croissance de lésion d’endométriose par divers mécanismes. Une récente étude a montré que le traitement hormonal diminue le diamètre des endométriomes alors qu’une augmentation de leur taille progressive est observée en l’absence de thérapeutique. Les progestatifs pourraient, quant à eux, avoir un effet direct sur la propagation des cellules endométriales, prévenir l’angiogenèse influençant l’activité métabolique des tissus et moduler la réponse auto-immune.

Pour une adolescente, la dysménorrhée peut conduire un absentéisme scolaire répété durant les règles et altérer la qualité de vie avec une influence néfaste sur la santé mentale et physique. La prise en charge précoce est donc une importante nécessité dans le but de soulager les jeunes patientes.

 

  1. Orben C, Olovsson M, Tydén T, Sundstrom-Poromaa I. Endometriosis risk and hormonal contraceptive usage: a nationwide cohort study. BJOG 2024;141:1352-59
  2. Niu Su-Mei, Kong De-Xiu, Li C et all. Letter to the editor. Influence of hormonal contraceptive usage on risk of endometriosis. BJOG 2025;0:1-2

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