Lien entre ovariectomie bilatérale en préménopause et la survenue de syndrome parkinsonien et de maladie de Parkinson ?

L'association entre ovariectomie bilatérale en préménopause et la survenue de syndrome parkinsonien ou de maladie de Parkinson est actuellement controversée.

L’objectif des auteurs de ce nouvel article est d’évaluer si les femmes qui ont eu une ovariectomie bilatérale avant leur ménopause avaient un risque majoré de développer un syndrome parkinsonien ou une maladie de Parkinson, si ce risque variait en fonction de l'âge des femmes au moment de l'acte chirurgical et si la prise d’un traitement hormonal substitutif dans les suites opératoires le modifiait.

Cet article est basé sur les données de deux études de cohorte indépendantes, les « Mayo Clinic Cohort Study of Oophorectomy and Aging » 1 et 2, basées sur le système des données de santé du « Rochester Epidemiology Project ».

L’échantillon est composé de 5499 femmes du comté d'Olmsted dans le Minnesota parmi lesquelles 2750 femmes ont eu une ovariectomie bilatérale pour une indication bénigne avant la ménopause spontanée entre le 1er janvier 1950 et le 31 décembre 2007 (cohorte d'ovariectomie), et 2749 femmes appariées sur l’âge qui n'ont pas eu d'ovariectomie (cohorte de référence). Les femmes ayant un syndrome parkinsonien induit par les médicaments étaient exclues de l’étude. Les données ont été analysées du 1er mars au 30 avril 2022. La date de l'ovariectomie était considérée comme la date index pour les deux groupes.

Parmi les 5499 participantes (âge médian de 45 ans et intervalle interquartile [IIQ] de 40-48 ans), 2750 femmes ont eu une ovariectomie bilatérale à un âge médian de 45 ans (IIQ de 40-48 ans), et 2 749 femmes ayant un âge médian de 45 ans (IIQ de 40-48 ans) à la date index ont été incluses dans l’étude.

L'ovariectomie bilatérale était associée à un risque majoré de syndrome parkinsonien de façon globale (hazard ratio [HR] de 1,59 ; IC à 95 % de 1,02-2,46) et tout particulièrement chez les femmes âgées de moins de 43 ans au moment de l'ovariectomie (HR de 7,67 ; IC à 95 % de 1,77-33,27).

L'ovariectomie bilatérale était également associée à un risque majoré de maladie de Parkinson chez les femmes âgées de moins de 43 ans au moment de l'ovariectomie (HR de 5,00 ; IC à 95 % de 1,10-22,70).

Parmi les femmes ayant eu une ovariectomie avant l'âge de 45 ans, le risque de développer un syndrome parkinsonien ou une maladie de Parkinson semblait légèrement plus faible chez les femmes ayant reçu un traitement hormonal de ménopause après l'intervention et jusqu’à l’âge de 50 ans que chez celles n’ayant pas eu de traitement bien que les différences ne soient pas significatives (HR de 1,72 [IC 95 % 0,54-5,53] contre 2,05 [IC 95 %, 0,80-5,23] pour le syndrome parkinsonien ; HR de 1,53 [IC 95 %, 0,29-8,23] contre 2,75 [IC 95 %, 0,84-9,04] pour la maladie de Parkinson).

Les auteurs ont proposé trois explications possibles pour l'association entre ovariectomie bilatérale et survenue de syndrome parkinsonien ou de maladie de Parkinson :

  • la 1ère hypothèse est l’existence d’un effet de confusion majeur des variants génétiques et des facteurs de risque comportementaux et environnementaux qui peuvent augmenter de façon indépendante à la fois le risque de syndrome parkinsonien (ou de maladie de Parkinson) et de symptômes gynécologiques conduisant à une ovariectomie bilatérale.
  • la 2ème hypothèse est que l'ovariectomie bilatérale peut être associée au vieillissement cérébral et au risque de syndrome parkinsonien ou de maladie de Parkinson. Cette association peut être médiée par la privation soudaine et complète d'estrogènes ou d'une autre hormone ovarienne, entrainant une accélération du vieillissement biologique du cerveau. Les résultats de cette étude ont appuyé l'hypothèse selon laquelle l'âge plus jeune au moment de l'ovariectomie était associé au développement de syndrome parkinsonien. Cependant, la taille de l’échantillon était insuffisante pour détecter une réduction significative du risque pour les femmes ayant eu un traitement hormonal de ménopause après la chirurgie et jusqu'à l'âge de 50 ans.
  • la 3ème hypothèse est qu’il existe à la fois un effet de confusion et un effet négatif de l'ovariectomie bilatérale sur le risque de syndrome parkinsonien ou de maladie de Parkinson en étant partiellement impliquée dans un enchainement d'événements indésirables.

Dans cet article, les femmes ayant eu une ovariectomie bilatérale avant l'âge de 43 ans avaient un risque accru de développer un syndrome parkinsonien et une maladie de Parkinson par rapport aux femmes n'ayant pas eu d'ovariectomie bilatérale. Ces résultats suggèrent qu'une réduction de la pratique de l'ovariectomie bilatérale prophylactique chez les femmes en avant la ménopause n’ayant pas un risque majeur de cancer de l'ovaire pourrait diminuer, entre autres, le risque de survenue de syndrome parkinsonien et de maladie de Parkinson.

 

Rocca WA, Smith CY, Gazzuola Rocca L, Savica R, Mielke MM. Association of Premenopausal Bilateral Oophorectomy With Parkinsonism and Parkinson Disease. JAMA Network Open. 2022;5(10):e2238663.