Céphalée du Post-Partum

La survenue d’une céphalée après un accouchement n’est pas une situation exceptionnelle. Plus d’une femme sur 10 vont développer ce symptôme dans les semaines qui suivent la naissance de leur enfant. Les céphalées s’observent principalement dans le premier mois avec un pic durant la première semaine. Les facteurs de risque sont la notion d’une céphalée préexistante, la multiparité et l’âge. Plus d’un tiers des parturientes ayant un antécédent de  céphalée vont avoir une récidive dans le mois qui suit l’accouchement. Les céphalées de tension et la migraine représentent les principales causes de ce symptôme mais ces 2 étiologies ne doivent pas être banalisées et faire oublier les causes secondaires dont le diagnostic nécessite une prise en charge adaptée. Dans ce contexte, le recours à un spécialiste et/ou à une imagerie cérébrale sera d’une aide précieuse pour éliminer les causes secondaires de céphalées, permettre un diagnostic précis et une prise en charge adaptée.    

Les céphalées post-brèche dure-mériennes représentent la première des causes de céphalées secondaires dans le contexte du postpartum.  Lors de la pose d’une analgésie péridurale, le risque de la survenue d’une brèche est faible, inférieure à 1%. La brèche peut passer inaperçue lors de la pose de la péridurale. Le diagnostic doit donc évoqué devant toute céphalée après la réalisation d’une anesthésie neuraxiale. Après une brèche dure-mérienne, la survenue d’une céphalée n’est pas obligatoire mais va toucher une majorité de patientes. Elle survient habituellement précocement (dans les 48 premières heures), avec un caractère postural (majoration lors de l’orthostatisme et cède en décubitus). Les céphalées sont habituellement sévères, bilatérales et accompagnées par des nausées et des  vomissements. Elle peut s’accompagner de signes neurologiques notamment visuels (diplopie liée à une atteinte de la sixième paire crânienne) et auditifs (hypoacousie, acouphènes). Les céphalées ne doivent pas être banalisées et un traitement efficace doit être mis en place car elles peuvent conduire à la survenue d’un hématome cérébral ou à une chronicisation ayant un impact sur la qualité de vie des patientes. En cas de tableau peu typique, une imagerie doit être réalisée afin d’éliminer d’autres étiologies. Le traitement actuel de référence repose principalement sur la réalisation d’un blood patch qui nécessite parfois d’être répétée.  Des traitements  prophylactiques peuvent être proposées comme la réalisation d’un blood patch en salle de naissance si un cathéter péridural a été mis place ou l’injection d’ACTH. Il est à noter que l’hyperhydratation n’est plus recommandée.

Une céphalée aigue peut survenir en post-partum dans un contexte d’hypertension. Elle s’accompagne souvent d’autres signes en plus de l’hypertension artérielle : œdème des membres inférieurs, protéinurie, reflexes ostéo-tendineux vifs voire d’une barre épigastrique, troubles visuels. Le risque de convulsions ne doit pas être négligé. La mesure de la pression artérielle et la recherche d’une protéinurie sont de réalisation simple et nécessitent d’être accomplies lors d’une céphalée car ces examens permettront d’orienter vers le diagnostic de préeclampsie. L’imagerie cérébrale peut mettre en évidence un PRES syndrome (syndrome d’encéphalite postérieure réversible) notamment s’il existe cliniquement des signes neurologiques centraux (visuels). Le traitement repose sur celui la pré-éclampsie gravidique.

La thrombophlébite cérébrale est une complication rare de la grossesse dont la céphalée est un des éléments permettant le diagnostic. Les symptômes sont associés à un déficit neurologique focal (éventuellement à bascule), des troubles de la conscience ou du comportement et peuvent conduire à une crise convulsive. Ils sont en rapport avec l’hypertension intracrânienne. Son tableau initial peut ressembler initialement à celui d’une céphalée post-brèche dure-mérienne. L’IRM avec angiographie artérielle et veineuse permet de faire le diagnostic. Une fois celui-ci établi, un traitement d’urgence par héparinothérapie doit être mis en place. Un bilan de thrombophilie devra être réalisé à distance.

La survenue d’une hémorragie intracérébrale est une complication exceptionnelle qui peut-être observée dans le cadre d’une céphalée du post-partum. Son risque est plus important en postpartum que pendant la grossesse. L’imagerie cérébrale une fois encore permet de faire le diagnostic de cette complication dans un contexte de céphalée. Cette dernière se caractérise par sa brutalité et son intensité importante. L’hémorragie méningée (plus fréquente chez la femme enceinte que non enceinte) est majoritairement liée à une rupture d’anévrysme plus qu’une malformation artério-veineuse. Un hématome intra-parenchymateux peut aussi être observé. Il peut être la conséquence d’une poussée hypertensive mal contrôlée. Un hématome sous-dural est aussi une complication exceptionnelle des brèches dure-mériennes liée à une traction des veines corticales lors de l’orthostatisme. Son diagnostic doit être évoqué devant une céphalée post-brèche dure-mérienne qui devient atypique (perte du caractère posturo-dépendant, céphalée devenant permanente) ou se prolonge. Le tableau est souvent subaigüe et s’accompagne de troubles de la conscience, de signe de localisation avec déficit voire des convulsions. Une autre cause est la survenue d’une apoplexie hypophysaire avec une transformation hémorragique d’un adénome (à prolactine ou autres) favorisée par une hypovolémie sévère (syndrome de Sheehan). Cliniquement, la céphalée est brutale et intense, constante, rétro-orbitaire ou diffuse et s’associe à une atteinte oculaire (baisse de l’acuité visuelle, hémianopsie bitemporale, diplopie, ptosis). Dans les formes sévères, une insuffisance corticotrope peut être présente et responsable de troubles de la conscience.  

Un accident vasculaire cérébral peut aussi survenir après un accouchement. Les causes  peuvent être une pré-éclampsie, une cardiomyopathie du postpartum, une ischémie focale dans un contexte d’angéite ou une angiopathie liée à un syndrome de vasoconstriction cérébrale aigue réversible du postpartum. Dans ce contexte, il peut être favorisé par une pré-éclampsie ou la prise de vasoconstricteur (bromocriptine, sumatriptan, inhibiteur de la recapture de la sérotonine, dérivé de l’ergot de seigle, etc..). Il se caractérise par des céphalées brutales, aigues et récurrentes évoluant par paroxysme sur quelques jours. Il peut être associé à une ischémie focale et/ou un œdème cérébral. Il peut se compliquer avec la présence d’hémorragies intracérébrales, corticaux-méningées, de convulsion ou d’AVC. L’angiographie (par résonance magnétique, angio-tomodensitométrie ou conventionnelle) est l’élément qui permet de porter le diagnostic en mettant en évidence une vasoconstriction cérébrale segmentaire et multifocale qui régresse sous traitement (inhibiteur calcique, nimodipine).  

D’autres étiologies peuvent être aussi être évoquées devant une céphalée : tumeur, adénome, métastase, dissection carotidienne, algie vasculaire de la face, méningite.   

En conclusion, la céphalée est un symptôme qui est loin d’être exceptionnelle dans les suites d’un accouchement. Elle peut révéler une pathologie sévère qui nécessite un traitement spécifique. Tout trouble neurologique associé à la céphalée doit être considérée comme un signal d’alerte et conduire à la réalisation d’une imagerie cérébrale.   

Références :

1. Goldszmidt E, Kern R, Chaput A, Macarthur A. The incidence and etiology of postpartum headaches: a prospective cohort study. Can J Anaesth 2005;52: 971-7.

2. Stella CL, Jodicke CD, How HY, Harkness UF, Sibai BM. Postpartum headache: is your work-up complete? Am J Obstet Gynecol 2007;196(4):318.e1-318.e7.

3. Turner DP, Smitherman TA, Eisenach JC, Penzien DB, Houle TT. Predictors of headache before, during, and after pregnancy: a cohort study. Headache. 2012;52(3):348-62

4. SinghalAB, Kimberly WT, Schaefer PW, Hedley-Whyte ET. Case records of the Massachusetts General Hospital. Case 8-2009. A 36-year-old woman with headache, hypertension, and seizure 2 weeks post partum. N Engl J Med. 2009;360(11):1126-37.

5. Ducros A.  Reversible cerebral vasoconstriction syndrome. Lancet Neurol. 2012;11(10):906-17

 
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