Les challenges de l’endométriose

Le challenge principal de l’endométriose est le diagnostic positif et précoce de l’endométriose du fait des retards au diagnostic. Des efforts ont été fait par les campagnes d’information très largement soutenues par les associations de patientes et nos tutelles. Ceci a permis de sensibiliser les professionnels de santé mais également a conduit de nombreuses patientes à consulter. Cependant, l’impact des campagnes d’information sur la détection de la pathologie à un stade précoce reste à déterminer. A l’inverse, un effet négatif de ces campagnes est constaté dans notre pratique avec nombre de patientes consultant avec des symptômes évocateurs d’une endométriose alors même que l’examen clinique et les explorations radiologiques sont négatives avec potentiellement d’une part le risque de méconnaître de véritable endomètriose et d’autre part, à l’inverse, de taxer « d’endométriosique » des patientes sans véritable pathologie avec le cortège de traitement médicaux voire chirurgicaux souvent inopérants. Cette réalité au quotidien souligne la nécessité d’outils permettant de faire un diagnostic précoce. Certains questionnaires ont été évoqués mais leur pertinence reste encore discutable. L’imagerie est pertinente mais là encore surtout dans les formes déjà avancées. Dans ce contexte, des travaux évoquent la pertinence de l’évaluation clinique et en imagerie de la distance ano-génitale diminuée reflet probable de l’action des perturbateurs endocriniens. Mais l’espoir réside dans le développement d’outils biologiques qui sont pour l’instant à l’étape d’investigation.

Le deuxième challenge réside dans une prise en charge optimale pour limiter le recours à des chirurgies invasives avec des risques de séquelles tout en permettant de préserver la fertilité des patientes. Là encore, des efforts majeurs ont été fait avec la possibilité de cryopréservation ovocytaire chez des femmes à risque d’altération de la réserve ovarienne. A ce propos, il convient de souligner l’importance de l’évaluation préopératoire de la réserve ovarienne avant toute chirurgie pour endométriome pour ne pas conduire à une stérilité définitive. La prise en charge de l’endométriose impose également le développement sur l’ensemble du territoire de réseaux ou filières de soins permettant d’optimiser les examens d’imagerie fait par des médecins ayant une expertise dans cette pathologie comme le suggère la Société Française de Radiologie (SFR) et la Société de l’Imagerie de la Femme (SIFEM) et l’optimisation du traitement médical en respectant les recommandations communes de la HAS (Haute Autorité de Santé) et du CNGOF (Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français). Nous plaidons en faveur de filière de soins impliquant l’ensemble des professionnels de santé se sentant investis dans le diagnostic et la prise en charge initiale de cette pathologie fréquente tout en soulignant pour l’instant l’absence de données sur l’incidence réelle de cette pathologie aussi bien en métropole que dans les DOM-TOM. Enfin, il n’est pas possible d’ignorer la prise en charge des formes sévères ou complexes qui devraient relever de centre expert offrant une prise en charge globale (traitement de la douleurs, soutien psychologique, soins alternatifs tels que l’acupuncture, l’hypnose et l’ostéopathie). Dans ce sens, les ARS œuvrent pour créer ces réseaux mais pour l’instant limités à trois régions en métropole.

Le troisième challenge est la prise en charge sociétale de cette pathologie invalidante avec un impact majeur sur la qualité de vie des patientes mais également un coût pour la société du fait des thérapeutiques mais également des hospitalisations et de l’absentéisme tant à l’école qu’au travail. Dans ce contexte, très particulier, des discussions semblent évoluer pour reconnaître l’endométriose comme relevant d’une ALD. Il restera à définir les critères pour bénéficier de cette prise en charge qui pourrait intéresser plus de deux millions de femmes et ce dès l’adolescence.

D’autres challenges sont également à évoquer et notamment l’absence d’une véritable politique de recherche clinique et fondamentale avec les difficultés de subventionnement de nombreuses équipes devant recourir à des fonds émanant soit de dons d’association de patientes soit de laboratoires pharmaceutiques. Dans ce contexte, des appels à projets spécifiques à l’endométriose devraient être fléchés comme c’est le cas en cancérologie ou pour des pathologie chroniques. Enfin, il faut souligner la nécessité d’une véritable formation initiale des soignants par l’enseignement au cours des études médicales, de la formation continue par les DPC dont le nombre d’heures par an a diminué de façon dramatique depuis quelques années comparée aux situations rencontrées dans d’autres pays européens.

 

 
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