En France, environ 46 % des femmes âgées de 15 à 49 ans ont déjà été en contact avec le cytomégalovirus (CMV) et sont immunisées. Cette séroprévalence varie fortement selon les régions, atteignant jusqu’à 90 % dans les départements et régions d'outre-mer, sans précision de la tranche d’âge concernée.
L’infection par le CMV est fréquente pendant la grossesse, touchant 1 % à 4 % des femmes enceintes. Elle peut être primaire (primo-infection) ou non primaire (réactivation ou réinfection) et est asymptomatique dans 90 % des cas. (1).
Transmission
Le cytomégalovirus (CMV) est un virus ubiquitaire à ADN, appartenant à la sous-famille des Betaherpesvirinae, de la famille des Herpesviridae, dont le réservoir est l’homme.
Chez une personne infectée, le CMV est présent dans le sang et excrété dans la salive, le mucus nasal, les sécrétions cervico-vaginales, le sperme, les urines et le lait maternel. Le virus est transmissible par voie naturelle : verticalement de la mère à l’enfant, par voie transplacentaire, pendant l’accouchement ou en post-partum (notamment lors de l’allaitement) ; horizontalement par contact direct avec les liquides biologiques contaminés (2).
La primo-infection maternelle (PIM)
La primo-infection maternelle (PIM) a un risque élevé de transmission verticale du CMV au fœtus (ce risque est de 36,8 % au 1er trimestre), avec des séquelles graves possibles chez le fœtus, notamment auditives et neurologiques. De plus, le risque de séquelles a été estimé entre 51 % et 57 % chez les fœtus ayant contracté une infection congénitale secondaire à une primo-infection au 1er trimestre de grossesse (2).
L’infection maternelle non primaire
Les infections non primaires, bien que moins transmissibles (< 3,5 %), peuvent entraîner des séquelles chez le fœtus, à type de complications auditives et neurologiques. Ce risque de séquelles graves serait plus faible que le risque en cas d’infection primaire (2).
Evolution des recommandations
Jusqu’en 2025, les autorités sanitaires françaises ne recommandaient pas de dépistage systématique, en raison du manque de preuves sur l’efficacité des traitements et du rapport bénéfice/risque incertain.
Puis, la Haute Autorité de Santé (HAS) a réévalué l’opportunité d’un dépistage systématique (2).
Au terme de son évaluation et ayant tenu compte des données de la littérature sur les performances des tests sérologiques, du traitement par valaciclovir, des bénéfices potentiels du dépistage, des enjeux éthiques, des pratiques en France, des recommandations à l’étranger, d’auditions et de contributions d’experts, de parties prenantes et d’institutions, la HAS a modifié sa recommandation.
A compter du 17 juin 2025, la HAS recommande de mettre en place un dépistage systématique national, à destination de toutes les femmes enceintes dont le statut sérologique est négatif ou inconnu.
Cette mesure fera l’objet d’une réévaluation au terme de trois années de mise en œuvre, afin d’en apprécier la pertinence et d’envisager éventuellement sa reconduction (3).
Le dépistage
Le dépistage devra être réalisé au premier trimestre de grossesse chez les femmes enceintes séronégatives ou de statut sérologique inconnu. La séquence des examens sérologiques de dépistage recommandée (IgM, IgG, avidité des IgG) s’intégrera dans la liste des examens médicaux obligatoires durant la grossesse (articles R. 2122-1 et R. 2122-2 du Code de la santé publique) (1).
Le diagnostic
Le diagnostic d’une infection à CMV chez la femme enceinte est réalisé sur un prélèvement de sang maternel.
La mesure de l’avidité des IgG anti-CMV est recommandée dans les cas de positivité des IgM anti-CMV pour dater l’infection et ainsi distinguer une primo-infection maternelle (PIM) d’une infection secondaire (4).
Le diagnostic de PIM peut être porté avec certitude avec l’apparition d’anticorps de type immunoglobulines G (IgG) chez une femme préalablement séronégative (recherche d’IgG négative) ; cela correspond à une séroconversion (infection primaire au cours de la grossesses).
Les infections secondaires à CMV sont caractérisées par une augmentation significative des IgG avec ou sans IgM associée à une avidité élevée pour les IgG.
La mesure de la charge virale par amplification génique (Polymerase Chain Reaction, PCR) est l’examen diagnostique de référence d’une infection à CMV (PIM ou secondaire) (4).
Les modalités du dépistage
La mise en place du programme de dépistage systématique est accompagnée des mesures suivantes :
- Information des patientes : les mesures de prévention indispensables doivent être expliquées à toutes les femmes en début de grossesse ou ayant un projet de grossesse. Des supports d’information devront être diffusés auprès des femmes enceintes, afin de garantir leur consentement libre et éclairé. Ces documents rappellent notamment les mesures d’hygiène préventive destinées à limiter le risque d’infection, en particulier chez les femmes séronégatives.
- Formation des professionnels : des actions de formation accompagnent le déploiement du dispositif afin d’assurer une mise en œuvre homogène et conforme aux recommandations.
- Évaluation des outils diagnostiques : une actualisation de l’évaluation de la performance des tests de dépistage devra être réalisée par la HAS (4).
Les précautions particulières accompagnant le traitement par valaciclovir
Chez la femme enceinte sous traitement par valaciclovir, la prévention des effets secondaires rénaux sera réalisée par le maintien d’une hydratation suffisante et l’administration du traitement en plusieurs doses réparties sur le nycthémère. De plus, l’administration concomitante de médicaments potentiellement néphrotoxiques devra être évitée. Bien que le valaciclovir n’ait pas montré de risques particuliers sur le développement du bébé dans les études disponibles, une surveillance obstétricale adaptée est recommandée à titre de sécurité (4).
Références
1- https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2025-06/evaluation_de_la_pertinence_dun_depistage_systematique_de_linfection_a_cytomegalovirus_cmv_au_cours_de_la_grossesse_recomman.pdf
2- https://www.ameli.fr/assure/sante/devenir-parent/grossesse/difficultes-et-maladies-pendant-la-grossesse/infections/infections-virales
3- https://www.has-sante.fr/jcms/p_3587389/fr/evaluation-de-la-pertinence-d-un-depistage-systematique-de-l-infection-a-cytomegalovirus-cmv-au-cours-de-la-grossesse
4- https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2015-11/argumentaire_cmv_me_vd.pdf