THM et cardio-vasculaire : la fenêtre d’intervention en question !

Alors qu’une douzaine d’anciennes études d’observation semblait montrer une association positive entre traitement hormonal de la ménopause (THM) et maladies coronariennes, les données des essais randomisés contrôlés lui accordaient des effets nuls voire néfastes. La notion de fenêtre d’intervention a vu le jour récemment expliquant ce paradoxe apparent : les effets bénéfiques des hormones dépendraient en effet de leur délai d’introduction.  Le THM initié rapidement dès le début de la ménopause protègerait de l’athérome les artères encore saines des femmes jeunes alors qu’un début plus tardif sur des vaisseaux « vieillissants » serait délétère.

Une équipe californienne a voulu testé cette « timming hypothesis » en initiant un THM dans une étude randomisée versus placebo en séparant les femmes selon le délai depuis leur ménopause : ainsi est née l’étude Early versus Late Intervention Trial with Estradiol (ELITE). La surveillance sur 5 ans a porté principalement sur l’épaisseur de l’intima-média mesurée tous les 6 mois ainsi qu’une mesure du degré d’athérome par scanner.

Ainsi, 643 femmes « en bonne santé » ont été recrutées : 271 ménopausées depuis moins de 6 ans et 372 depuis plus de 10 ans. Dans chaque groupe, une randomisation (1/1) a permis de traiter environ la moitié des femmes par 1 mg/j de 17β estradiol oral (associé à la progestérone micronisée en l’absence d’hystérectomie antérieure), l’autre moitié étant sous placebo.

L’évaluation de l’épaisseur intima-média après 5 ans montrait une évolution significativement différente dans les 2 groupes (p=0,007). Chez les femmes traitées précocement après le début de leur ménopause, la progression de l’épaisseur intima-média était significativement diminuée par rapport aux femmes sous placebo : - 0,0034 mm/an (IC à 95% - 0,0062à -0,0008  p=0,008). La progestérone associée chez les femmes non hystérectomisées ne modifiait pas ces résultats bénéfiques.  A l’inverse, chez les femmes ménopausées depuis plus de 10 ans, le THM ne permettait pas de freiner l’évolution de l’athérome. En revanche, l’étude par coupes tomodensitométriques des plaques, dépôts calciques et sténoses artérielles ne permettait pas de mettre en évidence de différence entre les groupes.

Cette étude semble donc confirmer l’hypothèse de la fenêtre d’intervention : un THM apparait réduire la progression de l’épaisseur intima-média (facteur prédictif des évènements cardio-vasculaires) uniquement s’il est initié précocement après l’installation de la ménopause. En revanche, celui-ci serait sans impact sur un athérome déjà constitué avec des artères déjà altérées. Les récepteurs des estrogènes situés sur les parois vasculaires pourraient en effet disparaitre en l’absence de traitement rapidement après la ménopause. Ces données expliquent les résultats négatifs de certains essais randomisés (femmes plus âgées recrutées) et des études chez des patientes atteintes de coronaropathie avérée.

La mise en route d’un THM dès la ménopause pourrait éviter le développement de lésions artérielles qui, une fois constituées, ne peuvent régresser. Cependant, cette étude ne permet pas répondre à la question  le rôle du THM sur les évènements cardio-vasculaires (IDM et AVC) dont l’origine implique d’autres facteurs comme les facteurs thrombotiques et les ruptures de plaques.

 

Hodis HN, Mack WJ, Henderson VW et al. Vascular effects of early versus late postmenopausal treatment with estradiol. N Eng J Med 2016; 374: 1221-31.

 
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