Le regret maternel, une réalité enfin dévoilée

C’est lors de mes consultations au cabinet que j’ai d’abord entendu parler du regret maternel. Rares sont les femmes qui osent aborder ce sujet, qui osent dire à quel point elles regrettent d'être mère. Le poids de la société, la peur d'être jugée, les amènent à se taire. C’est donc un véritable tabou qui pèse autour de ce sujet. Une sociologue israélienne, Orna Donath (auteure du livre « Le regret d’être mère ») a étudié ce phénomène. Faisons un point sur ce sujet aujourd'hui, nous essaierons de déterminer ce qu'est le regret maternel nous aborderons le poids de la société, la relation que les mères concernées entretiennent avec leurs enfants et enfin le rôle du père.

Qu'est-ce que le regret maternel ?

Le regret maternel, c'est le fait de regretter d'être devenue mère, avec le poids et les conséquences que cela implique. Les femmes qui s'expriment sur ce sujet nous disent à quel point, si elles avaient su à l'avance ce qu'était le rôle de mère, elles n'auraient jamais sauté le pas. Il faut préciser que ce regret maternel, ne concerne pas uniquement les femmes qui ne désiraient pas d'enfants et qui se sont laissé convaincre par leur entourage. Cela concerne également des femmes qui ne s'étaient jamais interrogé sur « qu'est-ce qu’être mère ? » ; ou sur ce que cela représentait pour elles.

Elles ont simplement sauté le pas et fait un enfant. Il est à noter que ces femmes n'ont aucune détestation pour leur enfant ou aucun rejet pour leurs enfants. Elles sont en souffrance, mais prennent néanmoins grand soin de leur bébé. Précisons également qu'elles ont une forme de nostalgie du passé, que ce statut de mère est difficile à incarner pour elles, car il est synonyme d'abandon ou de sacrifice de leur vie d'avant.

Le poids de la société dans le regret maternel

Devenir mère est clairement une des missions assignées par notre société aux femmes. De nombreuses femmes imaginent que pour être parfaitement accomplie en tant que femme, il faut en passer par la maternité. Dès leur plus jeune âge, la construction des petites filles passe par l'imitation de leur propre mère. Ces jeux d'imitation, faits de poupons et de dinettes, donnent une certaine image d'une femme accomplie. Ce n'est qu'en grandissant et par l'éducation que nous recevons que notre vision de la femme peut évoluer, changer, progresser. Malgré tout, le poids de la société reste très présent. Il suffit de regarder les magazines, les films ou encore les publicités, pour y voir l'image d'une femme idéale ayant à la fois une vie professionnelle, maternelle et amicale. Il est d'ailleurs fait grand cas des femmes qui par choix décident de ne pas avoir d'enfant. Cela semble incompréhensible aux yeux de nombreuses personnes, qui pensent même qu'elles finiront par changer d'avis, comme si la maternité était une fin en soi.

De surcroit ces jugements sont plus fréquents concernant les mères que les pères. Une forme d'indulgence vis-à-vis de la paternité existe souvent. La potentielle défaillance d'une mère est plus regardée ou soulignée, comme si l'instinct maternel obligeait les femmes à être des mères « parfaites ». Ces remarques parfois anodines, sur une mère qui ne vient pas chercher ses enfants à la sortie de l'école ou sur un vêtement non adapté pour son enfant, sont en réalité des coups de poignards portés aux femmes, qui pour un certain nombre les vivent comme un poids.

Les injonctions sociétales sont donc nombreuses. Parlons encore du choix ou non d'allaiter. Choix porté comme une obligation maternelle par certains et porté comme une injonction non féministe pour d'autres. Alors que choisir ? Comment se positionner ?

Le mythe et la réalité

Les femmes qui parlent de regret maternel, précisent souvent que leur plus grande difficulté est le gap qui existe entre leur imaginaire de ce qu’est une mère et la réalité de ce rôle.

En effet pour un certain nombre, les discussions avec leurs amies, leurs entourages, leurs lectures autour de la maternité les a souvent laissées à penser que devenir mère était une simple formalité. Comme ce sujet est tabou, il est rare d'entendre des femmes exprimer leurs doutes, leurs angoisses, vis-à-vis de la maternité. Ces dernières années, quelques auteurs ont osé parler de leur peur et de leur découverte de leur rôle de mère.  Notons que chaque fois qu'une femme « se plaint » des difficultés qu'elle rencontre, il y a toujours quelqu'un pour lui assigner cette phrase : «tu l'as désiré maintenant il faut assumer, et puis être mère c'est la plus belle chose au monde ! ».

Il est évident qu’après ce type d'injonction, il est fort difficile d'exprimer le fond de sa pensée et de son ressenti. Cela signifie qu’être mère, c'est accepter et ne pas se plaindre !

Pour autant, entre l’enfant rêvé et la réalité il y a parfois un gap, et les femmes doivent apprendre à accepter et « adopter » en quelque sorte, l’enfant qu’elles ont ! 

Les femmes qui ressentent ce regret maternel, se sentent donc isolées, seules et incomprises. Elles ont la sensation d'être de mauvaises mères et imaginent que la relation qu'elles entretiennent avec leurs enfants en pâtira.

Notons que pour les jeunes pères, le changement est moins radical, il a moins d'impact dans leur vie sociale ou professionnelle. Et ce nouveau rôle n'a surtout pas d'impact sur leur aspect physique ! Car devenir mère, c'est aussi devoir appréhender un corps, qui a subi un changement, un bouleversement et qu'il faut accepter parfois sous une nouvelle forme.

Alors finalement comment être mère ?

Il n'y a pas de « modèle type » de mère, il n'y a pas d’idéal ou de mère parfaite. Il est peut-être temps d'apprendre aux futures mamans à se faire confiance à s'écouter et à trouver leur juste place. Avant d'être une mère, les femmes ont été la fille de quelqu'un, l'amie de quelqu'un, l’amoureuse de quelqu'un, une professionnelle dans son métier et lorsqu'elles deviennent mère, elles rajoutent simplement un pan à leur existence, qu'il faudra construire au même titre que les autres ont été construits auparavant. Ce nouveau pan de leur existence va se construire et se nourrir grâce à leur propre histoire, mais aussi celle qu’elles vont construire avec leurs enfants. Une mère a le droit de ne pas être en permanence infaillible, sinon le poids serait trop lourd à porter. Une mère a le droit d'être aidée, d'être épaulée, sans se sentir une mauvaise mère. C’est donc notre rôle d’écouter sans jugement ces paroles de femmes et d’accueillir leurs mots/ maux, avec bienveillance.

 

 
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