TAILOR X : le risque intermédiaire d’Oncotype DX devient plus clair

Les résultats de l’étude TAILORx ont été présentés ce jour par Sparano en plénière à l’ASCO (American Society of Clinicol Oncology) à Chicago.

6711 patientes ayant un cancer du sein précoce opéré, hormono-sensible, HER négatif et sans envahissement ganglionnaire axillaire testées par Oncotype DX avec un Recurrent Score (RS) intermédiaire (11-25) ont été randomisées dans cet essai clinique de phase III de non infériorité en hormonothérapie seule ou hormonothérapie et chimiothérapie.

L’objectif était d’évaluer le bénéfice à la chimiothérapie pour ce groupe de patientes à risque intermédiaire.

Les résultats du groupe bas risque (RS < 10) ont déjà été publiés et ont confirmé qu’il y avait très peu de récidives dans cette population et donc que la chimiothérapie n’était pas nécessaire (98% de survie à 5 ans). Rappelons que dans cette population qui était aussi à faible risque selon des clinico-pathologiques, les signatures moléculaires n’auraient pas été indiquées.

L’objectif principal de TAILORx était l’invasive disease free survival (IDFS). Cette étude randomisée a aussi été publiée le même jour dans la prestigieuse revue The new england journal of medicine (Sparano et al, N Engl J Med 3 juin 2018), ce qui permet d’avoir plus de précisions sur la  méthode et les résultats.

Il est nécessaire de souligner au préalable que les seuils du score intermédiaire ont été changées pour cette étude, passant de 18-31 à 11-25, modifiant donc les références initiales du test standard commercialisé.

Un tiers des patientes avait moins de 50 ans, 57% avaient une tumeur de grade 2 et 29% un grade 1, 63% des patientes avaient une tumeur de 1 à 2 cm.

Selon les critères MINDACT (Microarray in Node Negative Disease May Avoid Chemotherapy), deux-tiers de ces patientes étaient classées à bas risque clinique défini par : grade 1 et tumeur < 3 cm, grade 2 et tumeur < 2 cm, grade 3 et tumeur < 1 cm), signifiant qu’une grande partie n’aurait pas bénéficié de chimiothérapie selon nos critères clinico-pathologiques et donc sans nécessité de signature.

D’autre part, la performance des traitements était différente dans les groupes et les modalités thérapeutiques différentes de nos pratiques. Dans 56% des cas la chimiothérapie contenait des taxanes-cyclophosphamide sans anthracycline, ce qui n’est optimal. 40% des patientes avaient encore une hormonothérapie après 5 ans de traitement, ce qui ne correspondant pas à nos pratiques. Il y avait seulement 5,4% de non observance au traitement par hormonothérapie dans le groupe hormonothérapie seule contre 18,4% dans le groupe chimio-hormonothérapie.,

Après un suivi médian de 7,5 ans, la non-infériorité était démontrée en survie sans récidive, survie sans métastase à distance ou survie globale dans ce groupe intermédiaire en l’absence de chimiothérapie.

L’analyse en sous-groupe réalisée a posteriori a montré que les patientes de moins de 50 ans non ménopausées conservent un bénéfice à la chimiothérapie associée à l’hormonothérapie (différence de 6 % en survie sans récidive).

Que peut-on conclure ?

Les résultats de cette étude apportent surtout désormais un éclairage sur l’attitude à adopter lorsqu’une patiente testée par Oncotype DX présente un RS intermédiaire.

Les signatures multigènes ne devraient pas être prescrites en systématique mais méritent d’être proposées pour réduire les indications de chimiothérapie lorsque nos critères clinico-pathologiques ne permettent pas de conclure sur le bénéfice de celle-ci.

Cette étude confirme la nécessité d’être prudent dans la désescalade chez les femmes de moins de moins de 50 ans.

Par ailleurs, une grande partie de ces patientes à risque intermédiaire défini par ce test n’aurait certainement pas bénéficié de signature multigénique si l’on tient compte des indications admises en France qui prennent en compte le KI67 (> 20%) et la présence d’embols.

Le respect des indications préalablement définies en France des signatures multigènes, dont le remboursement par l’assurance maladie est possible, est indispensable afin d’éviter une « explosion » de prescription économiquement préjudiciable et afin que toutes les femmes qui en ont réellement besoin sur l’ensemble du territoire puissent en bénéficier.