Génétique et infertilité masculine : analyse de l’exome, pour qui, pourquoi ?

L’analyse de l’exome, où le séquençage de tous les exons, a montré toute son utilité dans le cas du diagnostic étiologique et de la prise en charge de nombreuses pathologies comme le retard des acquisitions, les anomalies du développement, les cardiomyopathies, l’oncogénétique, etc…

En ce qui concerne la prise en charge des infertilités, cette analyse est aujourd’hui proposée en cas d’insuffisance ovarienne prématurée via la labellisation de la filière. Si l’identification d’un variant génétique, à l’état hétérozygote ou homozygote, ne permet pas de modifier la prise en charge de l’infertilité, celle-ci permet la réalisation d’une étude familiale et de proposer une attitude thérapeutique pour les personnes porteuses de ce variant 1.

Dans ce cas, le diagnostic est donc étiologique pour la patiente, et permet à celle-ci une meilleure acceptation de son infertilité, et parfois d’anticiper la survenue d’autres pathologies comme lors de l’identification de variant associé à une prédisposition au cancer 2.

Les derniers mois ont montré que cette analyse pourrait être proposée dans d’autres phénotypes d’infertilité, et que dans certains cas ceci pourrait modifier la prise en charge du patient.

Dans tous les cas, cette analyse devra être réalisée après un conseil génétique afin d’expliquer aux patients la technique et la possibilité de découverte dite « fortuite » sans rapport avec l’indication initiale.

Il faudra différencier 2 cas de figures :

  • les indications où seul un diagnostic étiologique pourra être réalisé ;
  • les indications pour lesquelles la prise en charge pourra être modifiée.

Dans la première catégorie on retrouve toutes les anomalies monomorphes spermatiques pour lesquelles la prise en charge ne sera pas modifiée par le résultat, Dans cette catégorie, l’exome sera réalisé après l’analyse ciblée de certains gènes comme AURKC pour la macrocéphalie spermatiques 3 ou DPY19L2 pour les globozoocéphalies 4.

Quel que soit le résultat, la prise en charge ne sera pas modifiée. Ainsi, une ICSI sera proposée pour les globozoospermies ou les anomalies multiples du flagelle, ou une absence de prise en charge pour les macrozooscéphalies après réalisation d’une FISH (hybridation In Situ en Fluorescence) sur les spermatozoïdes, confirmant que 100% des spermatozoïdes sont aneuploïdes.

En cas d’agénésie bilatérale des canaux déférents (ABCD), l’exome sera réalisé après l’analyse de la séquence des gènes CFTR et ADGRG2 5, et ceci sera plutôt réalisé dans le cadre de la recherche.

Dans la seconde catégorie on retrouve les azoospermies non obstructives ou sécrétoires. Il est envisageable de penser que les prochains mois devraient nous permettre de démontrer que la présence de variants délétères sur certains gènes devra nous amener à rediscuter la réalisation d’une extraction testiculaire (TESE) avec le patient comme cela est le cas pour les délétions des régions AZFa et b. En effet, plusieurs publications ont montré que certaines anomalies étaient associées à un arrêt de la maturation spermatique homogène, situation où aucun spermatozoïde n’est retrouvé après TESE 6,7.

In fine, l’analyse de l’exome devrait permettre une meilleure prise en charge globale des couples infertiles, et le bilan génétique devra être réalisé rapidement dès l’identification de l’anomalie.

 

Références :

1.  Tucker, E. J., Grover, S. R., Bachelot, A., Touraine, P. & Sinclair, A. H. Premature Ovarian Insufficiency: New Perspectives on Genetic Cause and Phenotypic Spectrum. Endocr. Rev. 37, 609–635 (2016).

2.  Merlino, L., Chiné, A., Galli, C. & Piccioni, M. G. BRCA1/2 genes mutations, ovarian reserve and female reproductive outcomes: a systematic review of the literature. Minerva Ginecol 72, 339–348 (2020).

3.  Dieterich, K. et al. Homozygous mutation of AURKC yields large-headed polyploid spermatozoa and causes male infertility. Nat Genet 39, 661–665 (2007).

4.  Harbuz, R. et al. A recurrent deletion of DPY19L2 causes infertility in man by blocking sperm head elongation and acrosome formation. Am J Hum Genet 88, 351–361 (2011).

5.  Bieth, E. Genetics of the congenital absence of the vas deferens. Human Genetics 18.

6.  Ghieh, F., Mitchell, V., Mandon-Pepin, B. & Vialard, F. Genetic defects in human azoospermia. Basic Clin Androl 29, 4 (2019).

7.  Cannarella, R. et al. Next-generation sequencing: toward an increase in the diagnostic yield in patients with apparently idiopathic spermatogenic failure. Asian J Androl (2020) doi:10.4103/aja.aja_25_20.

 

 
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