Place de l'écho col pendant la grossesse, et réflexion autour d'un cas

L’échographie du col est couramment utilisée dans le diagnostic de menace d’accouchement prématurée (MAP).

Son utilisation permet de cibler les patientes nécessitant une prise en charge dans les cas de suspicion de MAP, de réduire les faux positifs et les hospitalisations non nécessaires.

Il existe des divergences de point de vue quant à l’utilisation préférentielle du toucher vaginal versus l’échographie du col dans le diagnostic d’accouchement prématuré. Elles sont le reflet des habitudes professionnelles de chacun.

Dans les situations intermédiaires (contractions utérines peu douloureuses, ou difficilement objectivables par le monitoring par exemple) l’échographie de mesure du col de l’utérus est nécessaire. Elle permet de catégoriser les patientes nécessitant une prise en charge ou non, et de chiffrer la mesure ce qui laisse une preuve médico-légale en cas de juridiction.

Cette technique par ailleurs moins invasive que le toucher vaginal (notamment en cas de placenta bas inséré ou prævia), et est mieux reproductible entre opérateur.

Technique échographique de mesure du col

La technique d’abord de référence est la voie endovaginale. La voie sus-pubienne ne permettant pas d’avoir une image interprétable dans un grand nombre de cas (présentation basse, ou terme avancé par exemple, voir clichés 1 et 2).

C liché 1 : 
présentation céphalique au troisième trimestre : 
la tête fœtale est en contact avec le col et ne permet pas de bien le visualiser, 
par atténuation des ultra-sons

Cliché 1

Cliché 2 :
la présentation céphalique est à distance du col,
ce qui permet dans ce cas de bien le visualiser
ons

Cliché 2

La sonde endocavitaire (5 à 7 MHz) doit être placée dans le cul de sac vaginal antérieur chez une patiente installée en décubitus dorsal ayant préférentiellement vidé sa vessie, dans le but d’obtenir une coupe sagittale stricte.

De légers mouvements de balayage (droite/gauche) et de rotation (haut/bas) permettent de repérer le col puis le canal cervical afin de le dérouler sur toute sa longueur, de l’orifice interne à externe.

La sonde doit faire une pression suffisante pour que l’image soit nette tout en essayant ne pas créer de déformation du col (il est parfois nécessaire de reculer un peu la sonde lorsque c’est le cas).

Une fois l’acquisition faite, l’image doit être agrandie pour occuper les 2/3 de l’écran.

a mesure peut être faite en une seule fois de l’orifice interne à externe, ou en deux fois pour être additionnées afin de suivre la courbure du col lorsque celui-ci est d’aspect incurvé (voir clichés 3 et 4).

Clichés 3-4

Trois mesures sont effectuées dans un intervalle de trois minutes pour retenir la plus courte.

Une éventuelle protrusion des membranes peut être mise en évidence.

Une éventuelle modification de la longueur du col suite à une contraction ou une pression sus-pubienne peut être mentionnée.

Indications

La Haute autorité de santé (HAS) ne recommande pas de mesure du col dans la population générale pour prévenir le risque d’accouchement prématuré. En raison de la faible prévalence de la prématurité chez les femmes sans facteurs de risques, de la faible valeur prédictive positive, et du nombre important de faux négatifs, ce geste n’est pas recommandé en systématique. (1)

En effet un col mesuré à plus de 25 mm à un intérêt clinique pour les femmes présentant ou non des signes de MAP, en réduisant les interventions et hospitalisations non nécessaires (bonne valeur prédictive négative).

Cependant la signification d’un col court inférieur à 25 mm reste obscure, notamment chez les femmes asymptomatiques. (1)

Selon la HAS, un test faussement positif peut générer de l’angoisse potentiellement délétère, et des prises en charges iatrogènes par le corps médical.

La mesure du col ne fait donc pas partie des items obligatoires à renseigner dans le compte rendu minimum d’échographie fœtale des grossesses mono-fœtales (2).

Recommandations HAS : l’échographie du col s’adresse :

  • Aux femmes symptomatiques présentant des signes de MAP : des contractions utérines régulières et/ou douloureuses, et/ou col modifié cliniquement.

Il n’existe pas de consensus sur la fréquence et la durée des contractions. En cas de col modifié, l’échographie du col prend son importance en sélectionnant les patientes nécessitant une prise en charge lorsque la mesure est inférieure ou égale à 25 mm.

La mesure n’a pas besoin d’être répétée à distance de l’épisode aigu et en l’absence de nouveaux symptômes.

  • Aux femmes asymptomatiques présentant un ou des facteurs de risques :

Les grossesses gémellaires : le gain diagnostique est d’autant plus important que le seuil de la longueur est bas, la valeur prédictive positive (col court) étant deux fois moins bonne que la valeur prédictive négative (col long). Le seuil retenu se situe entre 20 et 25 mm. Le CNGOF recommande une surveillance mensuelle du col utérin en cas de grossesse gémellaire mono-choriale. Cette mesure ne présente pas d’intérêt pour les grossesses bi-choriales et monofoetale sans signe d’appel.

L’insuffisance cervicale (béance) : selon le contexte, une échographie bimensuelle peut être pratiquée entre la 12ème et la 24ème semaine dans la décision de pratique d’un cerclage. Si ce protocole est mis en place, le cerclage sera alors réalisé si le col devient inférieur à 25 mm.

Antécédents d’accouchements prématurés ou de fausses couches tardives.

Antécédent de malformation utérine ou de chirurgie du col

Par ailleurs la mesure du col ne présente plus d’intérêt à partir de la 34e semaine.
 

Réflexion autour d’un cas

Le cas présenté ci-dessous concerne une patiente de 40 ans, G3P1, qui consulte pour son échographie fœtale de dépistage du deuxième trimestre.

Il s’agit d’une grossesse obtenue après insémination artificielle.

La patiente présente un antécédent de deux fausses couches précoces traitées par curetage.

Cliniquement asymptomatique (sans contractions utérines ressenties).

La morphologie fœtale sans particularité.

Il n’y a donc pas d’indication à une réalisation d’une échographie du col.

Cependant, à la suite d’un aspect de col court vu par voir sus-pubienne (voir cliché 5), une échographie par voie endovaginale est pratiquée (cliché 6).

Cliché 5 :
Vue sagittale du col par voie sus-pubienne
 

Cliché 5

Cliché 6 :
Le col est raccourci à 5,8 mm avec
aspect de protrusion de la poche des eaux
au sein de l’orifice interne du col

Cliché 6

On note une nette ouverture de l’orifice interne du col sur 33 mm de longueur et environ 20 mm de largeur.

La membrane amniotique est visible à l’intérieur du col (cliché 7)

Cliché 7

La patiente est dirigée vers le service des urgences de sa maternité à la suite de l’échographie, puis hospitalisée pendant quatre jours. Un cerclage est effectué, sans contractions utérines ressenties ou décelées. La suite du suivi est poursuivie en hospitalisation à domicile.

La patiente accouche à 40 SA et 4 jours d’un enfant eutrophe et bien portant.

Dans le cas présent le signe d’appel était purement échographique, et il n’y avait pas d’indication à pratiquée une échographie du col par voie endovaginale. La question qui se pose ici est si la grossesse aurait bien été menée à terme en l’absence d’une échographie du col permettant d’aboutir dans le cas présent à une prise en charge (hospitalisation, cerclage).

Le but n’est en aucun cas de contester les recommandations, mais de se questionner sur l’intérêt de l’examen du col par voie sus-pubienne lorsque celui-ci est possible.

Si la présentation fœtale est à distance du col, l’aspect et la longueur de celui-ci peut être évalué rapidement, notamment lors de la vérification de l’insertion placentaire par rapport à l’orifice interne, qui est un cliché obligatoire à fournir dans le compte-rendu minimum d’échographie obstétricale du deuxième trimestre (2).

Cependant dans certaines situations où les conditions d’examen sont difficiles, la longueur du col n’est pas visible par voie sus-pubienne. Si de telles conditions s’étaient présentées pour notre cas, nous n’aurions probablement pas dépisté l’anomalie du col et donc la patiente n’aurait pas été prise en charge immédiatement.

Conclusion 

L’échographie du col est un moyen peu invasif et bien reproductible de classer les patientes à risque de MAP ayant un col court inférieur à 25 mm.

Elle ne doit pas être pratiquée systématiquement en raison de sa faible valeur prédictive positive particulièrement chez les patientes asymptomatiques.

Elle s’adresse aux femmes symptomatiques à risque de MAP ou aux femmes asymptomatiques présentant un ou des facteurs de risques.

C’est pourquoi l’échographie du col doit s’accompagner d’un interrogatoire précis.

Cependant, le cas présenté ci-dessus évoque l’intérêt d’une évaluation subjective de la longueur cervicale par voie sus-pubienne lors de l’échographie du deuxième trimestre, si les conditions sont favorables, pour dépister une éventuelle incompétence cervicale.

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BIBLIOGRAPHIE

1 - Rapport de la HAS : mesure de la longueur du canal cervical du col de l’utérus par échographie par voie vaginale. Intérêt dans la prévention de la menace d’accouchement prématuré spontanné. Juillet 2010.

2- CNEOF. Eléments devant figurer dans le compte-rendu d’examen : http://www.cfef.org/archives/bricabrac/cneof/compte-renducneof2016.pdf