Chirurgie de l'endométriose Profonde en 2025 : balance bénéfice/risque sur la qualité de vie et la fertilité

L’impact de l’endométriose sur la qualité de vie n’est plus à démontrer tant cette pathologie envahit chaque facette de la vie quotidienne de nos patientes. L’amélioration de la prise en charge globale et multidisciplinaire des malades a contribué à diminuer la douleur des patientes, son vécu et les troubles fonctionnels associés. De la même manière, les avancées techniques et technologiques ont permis de potentialiser l’efficacité de la chirurgie de résection des lésions d’endométriose.

Bénéfices de la chirurgie :

Amélioration de la qualité de vie :

De nombreuses études ont encore récemment confirmé la diminution significative et persistante des symptômes liés à l’endométriose après une chirurgie de résection complète. L’excision préférée à l’ablation (thermocoagulation) permet de diminuer les douleurs et d’améliorer la qualité de vie(1), de diminuer les dyspareunies et donc d’améliorer la qualité de vie sexuelle des patientes et du couple; de diminuer les troubles fonctionnels intestinaux et les douleurs associées en améliorant les scores de qualité de vie gastro intestinale (GIQLI)(2) . Ces résultats persistent dans le temps comme le montre la publication des données de suivi à 10 ans de l’essai ENDORE (Horace Roman, In press).

Augmentation des chances de conception :

La chirurgie laparoscopique pour l’endométriose minime ou légère (EML), c’est-à-dire stade I et II selon la classification AFS, peut améliorer la fertilité en réduisant l’inflammation locale et en restaurant l’anatomie pelvienne normale, notamment en cas d’adhérences. Une revue Cochrane rapporte une augmentation des grossesses viables après chirurgie (OR 1,89 ; IC 95 % : 1,25-2,86), avec un gain absolu d’environ 13 % dans les taux de conception spontanée(3). Les recommandations de l’ESHRE et du CNGOF soutiennent la chirurgie dans des cas sélectionnés, notamment en présence de douleurs pelviennes associées à l’infertilité.

Les données actuelles indiquent que le taux de grossesse spontanée chez les femmes atteintes d’endométriose profonde varie de 2 à 10%. Une revue systématique récente, basée sur 23 études incluant 1548 patientes, rapporte un taux de grossesse global moyen après chirurgie de 52,6 % (IC 95 % : 49,7–63 %)(4). Cependant, ces résultats incluent une hétérogénéité importante dans la localisation des lésions, les techniques chirurgicales utilisées et les populations étudiées. Les taux de grossesse spontanée après chirurgie varient largement, de 18,7 % à 85 %, reflétant les différences dans les pratiques et les caractéristiques des patientes.

Après la chirurgie, des outils comme l’indice de fertilité lié à l’endométriose (score EFI) peuvent aider à stratifier les patientes en fonction de leur pronostic de grossesse spontanée. Des études récentes montrent que chez les femmes avec un score EFI élevé (7-10), la chirurgie pourrait éviter le recours immédiat à l’AMP, avec des taux de grossesse spontanée atteignant 50 %. À l’inverse, chez les patientes ayant un EFI faible ou une réserve ovarienne réduite (hormone anti mullerienne < 2 ng/mL), une approche priorisant l’AMP semble plus appropriée.

Enfin très concrètement, dans un centre expert en chirurgie de l’endométriose, le taux de grossesse après une chirurgie colorectale est de 85% et le taux de naissance vivante atteinte 79% à 10 ans, avec un délai moyen d’obtention de la grossesse de 13 mois après la chirurgie, alors que seulement 1/3 d’entre elles sont obtenues par AMP.

Risques de la chirurgie :

Complications postopératoires immédiates :

Le taux de complications postopératoires varie en fonction du type de geste chirurgical réalisé et des procédures associées. Une méta-analyse récente sur les résultats des chirurgies digestives pour EP révèle que la résection colorectale segmentaire est associée au plus haut risque de complications sévères (9,9 %). Parmi ces complications, 3,3 % sont des fistules rectovaginales, 1,9 % des fuites anastomotiques et 5,2 % des sténoses de l’anastomose. Les lésions urétérales lors de ces interventions restent extrêmement rares, avec une incidence de 0,07 %(5).

La chirurgie de l’EP urinaire est-elle associée à un taux global de complications de 28 % pour les interventions urétérales et de 4 % pour les interventions vésicales. Pour l’uretère, 16 % des complications sont de grade III selon Clavien-Dindo, incluant des fistules urétérales (2,4 %), des fuites anastomotiques (7,1 %), et des complications rares comme un anévrisme artériel (2,4 %). Les complications mineures incluent une dysfonction vésicale transitoire dans 9,5 % des cas. Pour les interventions vésicales, les complications majeures incluent des fistules vésico-urétérales (2 %) et des retards de cicatrisation (2 %), nécessitant parfois une réintervention.

Finalement, même chez les patientes qui présentent une complication sévère après une résection colorectale d’une lésion d’endométriose, le taux de grossesse atteint 41% avec 4 grossesses sur 5 obtenues spontanément.

Récidive et réintervention :

Bien entendu, le risque d’une première chirurgie expose à un risque de réintervention et donc à un risque de nouvelles complications. Les données les plus récentes évaluent le risque de réintervention entre 10% et 25% dont 1/3 pour gérer une infertilité (salpingectomie/plastie) et 1/3 pour une hystérectomie pour adénomyose lorsque la première chirurgie a été conservatrice.
Conclusion et perspectives
La chirurgie de l’endométriose profonde reste un pilier central de la prise en charge multidisciplinaire, offrant des bénéfices significatifs en termes de qualité de vie, de réduction des douleurs et d’amélioration de la fertilité. Réalisée par des équipes expertes, elle affiche un taux de complications modéré malgré des interventions complexes.

Les progrès technologiques, comme la robotique et l’intelligence artificielle, promettent d’affiner la précision chirurgicale, réduisant les risques et améliorant les résultats. Il est également probable que l’apport de l’HIFU (High intensity focal ultrasound) permettent de prendre en charge certains nodules rectaux avec des indications toutefois restreintes.

L’identification de biomarqueurs prédictifs et le développement de thérapies ciblées pourraient ensuite limiter les récidives et optimiser les traitements combinés.

 

Références :

  1. Lee CE, Allaire C, Williams C, Bedaiwy MA, Noga H, Hanley GE, et al. Outcomes After Surgery at an Interdisciplinary Centre of Expertise for Endometriosis and Pelvic Pain in Canada: A Prospective Cohort Study. Journal of Obstetrics and Gynaecology Canada [Internet]. 2024 Feb 1 [cited 2024 Dec 8];46(2). Available from: https://www.jogc.com/article/S1701-2163(23)00606-0/fulltext
  2. O’Brien L, Morarasu S, Morarasu BC, Neary PC, Musina AM, Velenciuc N, et al. Conservative surgery versus colorectal resection for endometriosis with rectal involvement: a systematic review and meta-analysis of surgical and long-term outcomes. Int J Colorectal Dis. 2023 Feb 27;38(1):55.
  3. Jacobson TZ, Duffy JM, Barlow DH, Farquhar C, Koninckx PR, Olive D. Laparoscopic surgery for subfertility associated with endometriosis - Jacobson, TZ - 2010 | Cochrane Library. [cited 2024 Dec 7]; Available from: https://www.cochranelibrary.com/es/cdsr/doi/10.1002/14651858.CD001398.p…
  4. Daniilidis A, Angioni S, Di Michele S, Dinas K, Gkrozou F, D’Alterio MN. Deep Endometriosis and Infertility: What Is the Impact of Surgery? Journal of Clinical Medicine. 2022 Jan;11(22):6727.
  5. Bendifallah S, Puchar A, Vesale E, Moawad G, Daraï E, Roman H. Surgical Outcomes after Colorectal Surgery for Endometriosis: A Systematic Review and Meta-analysis. J Minim Invasive Gynecol. 2021 Mar;28(3):453–66.

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