Prise en charge de l’endométriose : où en sommes-nous en France en 2024 ?

Auteurs

Horace ROMAN
Institut Franco-Européen d’Endométriose (IFEMEndo), Clinique Tivoli-Ducos, Bordeaux, France

Bien que décrite pour la première fois plus de 150 ans auparavant, l’endométriose a été réellement redécouverte au cours des années ’70 et ’80, avec l’introduction large de la coelioscopie et de l’IRM, qui ont permis une meilleure visualisation des lésions, pendant la chirurgie et lors des examens d’imagerie.

Pour ceux qui s’étaient investis, comme moi, dans la prise en charge de l’endométriose, les 20 dernières années ont marqué un tournant dans les connaissances et la prise en charge de la maladie.

L’information large du public et celle des médecins n’a pas cessé de se développer ; lorsque j’avais décidé, en 2004, de me consacrer à l’endométriose, il y avait des collègues qui me demandaient comment je comptais bien occuper mon temps… A cette époque, seul le Danemark était doté d’une vraie organisation territoriale de la prise en charge de la maladie, avec deux centres de référence certifiés. Vingt ans plus tard, on ne compte plus les médecins français qui se présentent comme étant experts en endométriose, signe d’un intérêt toujours plus grand autour de cette mystérieuse maladie, où les champs de recherche et de traitement semblent toujours sans limites.

La France a désormais une Stratégie Nationale contre l’Endométriose, initiée par le Président Macron en 2021, une promesse de fonds destinés à la recherche, à la formation, au diagnostic, à l’information du public. Une organisation territoriale a été initiée, avec la création des filières régionales de soins, réunissant autour d’une même table les acteurs des secteurs publics et privés, avec la mise en place des réunions de concertations multidisciplinaires entre plusieurs établissements.

L’étape suivante serait la hiérarchisation des établissements par rapport à l‘expertise chirurgicale dans la prise en charge des endométrioses complexes, avec atteinte digestive, urinaire, diaphragmatique ou des nerfs pelviens, afin de réduire les prises en charge suboptimales des formes sévères de la maladie. Cette hiérarchie devrait logiquement être basée sur des seuils de volume d’activité, selon le modèle de la certification dans la chirurgie oncologique.

Un événement majeur dans le champ de l’endométriose est représenté par l’introduction en 2022 du test salivaire de l’endométriose. Basé sur les travaux scientifiques du Pr Bendifallah et produit par la société française ZIWIG, le test salivaire bénéficie à la fois d’une excellente sensibilité et spécificité et permet de séparer avec un faible risque d’erreur les femmes atteintes d’endométriose de celles indemnes. Le test identifie une signature composée d’une association de 109 micro ARN, développée par la combinaison de deux technologies, et a été évalué lors de deux études cliniques prospectives, respectivement mono- et multicentriques.

La méthode de diagnostic est prometteuse, et ouvre des perspectives vers des tests de diagnostic plus fins, capables de prédire les différents sous-types d’endométriose et de permettre des stratégies de prévention plus adaptées au risque évolutif de chaque sous-type, comme cela a été déjà le cas dans le cancer du sein.

La France est un des pays avancés dans la prise en charge de l’endométriose, qui compte des chercheurs et des médecins de notoriété mondiale. Pourtant, il reste encore beaucoup de choses à faire en termes de : diagnostic rapide des formes sévères, d’uniformisation de la prise en charge sur notre territoire, d’accès rapide des patientes aux centres experts lorsque la sévérité de leur maladie l’exige, et une meilleure adaptation du traitement en fonction des caractéristiques de chaque patiente et du risque évolutif.

Mon impression est néanmoins que nous sommes sur la bonne voie !