Après 40 ans, gérer la contraception est souvent complexe car sa nécessité est parfois questionnée et le choix des contraceptifs peut être réduit.
- INTERET DE LA CONTRACEPTION
- Maintien de la fertilité
La contraception reste essentielle dans la mesure où la fertilité n’est pas nulle après 40 ans. Parmi les grossesses survenant chez les femmes entre 40 et 45 ans, presque la moitié ne sont pas planifiées (1). Ainsi, les patientes s’orientent plus fréquemment vers une IVG dans cette catégorie d’âge. En France, le taux de recours à l’IVG chez les 40-44 ans augmente au fil des années (7,5 pour 1000 femmes en 2021) (2). Ceci est à mettre en balance avec le moindre taux de grossesses à cet âge. Soulignons également le sur-risque obstétrical chez la femme de plus de 40 ans avec l’augmentation des anomalies chromosomiques, des fausses couches, du diabète gestationnel, de l’hypertension gravidique et de la morbi-mortalité materno-foetale (3).
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- Bénéfices secondaires apportés par la contraception
Les contraceptions hormonales peuvent apporter des bénéfices secondaires afin de mieux gérer les symptômes de certaines pathologies utérines et ceux en lien avec les variations hormonales péri-ménopausiques.
Après 40 ans, les pathologies bénignes utérines type fibromes, polypes ou adénomyose, à l’origine de ménorragies et dysménorrhées, sont plus fréquentes. L’adénomyose concerne 70% des femmes entre 40 et 50 ans et des myomes sont retrouvés chez 40% des femmes de plus de 40 ans (4, 5).
L’hyperestrogénie relative peut entrainer des ménorragies fonctionnelles par hypertrophie endométriale.
A contrario, les femmes peuvent également souffrir d’un syndrome climatérique lié à l’hypoestrogénie qui apparait parfois quelques temps avant l’arrêt définitif des cycles.
- LES TYPES DE CONTRACEPTIONS POSSIBLES
Aucune contraception n’est formellement contre-indiquée sur la seule base de l’âge d’après les différentes sociétés savantes (accord d’experts) (6, 7, 8).
Toutefois, après 40 ans, l’augmentation du risque cardiovasculaire, thromboembolique et métabolique peut-être un frein à l’utilisation de certaines molécules.
Il existe donc certaines spécificités de la contraception à cet âge de la vie.
a. La contraception estroprogestative
La contraception estroprogestative est très régulièrement contre-indiquée après 40 ans, quelles que soient les molécules utilisées, leurs dosages et voie d’administration. En effet, il n’est pas rare de rencontrer à cette période de la vie une vraie contre-indication à la prescription d’estroprogestatifs tel qu’une HTA, dyslipidémie, diabète de type 2… Mais l’âge étant un facteur de risque en tant que tel, elle ne peut plus être prescrite en cas de contre-indications relatives (tabac, surpoids, migraine…). De plus, elle entraine une augmentation significative du risque thromboembolique veineux par rapport à la femme jeune (5.29 entre 40-44 ans (IC95 % : 4,36–6,41), vs 6.58 entre 45-49 ans (IC95 % : 5,43–7,99) mais également un sur-risque artériel et métabolique (9, 10).
Il faut donc éviter d’introduire ce type de contraception après 40 ans.
En cas de renouvellement, une évaluation de la balance bénéfices/risques devra être réalisée au moins tous les ans et la patiente devra en être informée de manière claire. Dans ce cas, elle peut apporter certains bénéfices, comme l’amélioration des ménorragies, des dysménorrhées et du syndrome climatérique. Elle permet aussi l’augmentation, ou du moins la stabilisation de la minéralisation osseuse (11).
b. La contraception microprogestative
Ayant un effet neutre sur les plans métabolique, cardiovasculaire, thromboembolique et osseux, cette contraception rencontre de rares contre-indications jusqu’à l’âge de la ménopause (10, 11). Il s’agit donc d’une contraception à proposer en 1ère intention.
Elle permet de gérer les ménorragies et les dysménorrhées, par la potentielle induction d’une aménorrhée.
En revanche, elle peut être mal tolérée, notamment par la fréquence non négligeable de saignements intercurrents (25% des femmes environ) et la survenue possible de signes d’hyperestrogénie ou d’hyperandrogénie.
c. La contraception progestative injectable
Le DMPA injectable est peu utilisé en France, d’autant plus dans cette tranche d’âge, car le risque thrombo-embolique et métabolique est nettement augmenté avec cette molécule (12). Elle favorise également la perte osseuse du fait d’une profonde hypoestrogénie induite, mais à priori réversible à l’arrêt du traitement (11).
d. Le DIU au cuivre
De nombreuses femmes s’orientent vers ce type de contraception non hormonale. Le seul facteur limitant son utilisation à cet âge de la vie est l’exacerbation des ménorragies et des dysménorrhées.
Le DIU au cuivre posé après 40 ans peut être gardé jusqu’à l’âge de la ménopause quel que soit le modèle car son efficacité est prolongée au-delà de 5 ans (6).
e. Le DIU au Lévonorgestrel
Le DIU au Lévonorgestrel est une méthode de choix après 40 ans, notamment par sa capacité à réguler les ménorragies, qu'elles soient d’origine fonctionnelles ou en lien avec une pathologie utérine bénigne (adénomyose, myome ne déformant pas la cavité) (13). Une majorité de femmes seront en aménorrhée dans les 6 mois qui suivent la pose.
Il n’impacte pas le risque vasculaire artério-veineux ni osseux (9, 11, 12).
Posé après 45 ans, le DIU au Lévonorgestrel 52 mg peut être gardé jusqu’à l’âge de la ménopause (6).
f. Les méthodes barrières
Spermicides, diaphragmes et cape cervicale peuvent être intéressants du fait d’une diminution de la fertilité spontanée et d’une sexualité pouvant être ponctuelle après 40 ans.
g. Méthodes naturelles
L’irrégularité des cycles lors de la péri-ménopause diminue la fiabilité des méthodes naturelles.
h. La contraception définitive
Encore trop peu utilisée en France, elle a pourtant une place intéressante une fois le projet parental accompli, qu’elle soit masculine ou féminine. En revanche, elle n’apporte pas de bénéfice secondaire en dehors d’une contraception efficace.
3) QUAND ET COMMENT ARRETER LA CONTRACEPTION ?
Savoir quand arrêter la contraception autour de la ménopause sans prendre le risque d’une grossesse peut être parfois difficile.
L’âge de la ménopause est différent d’une femme à l’autre et les symptômes périménopausiques sont très variables tant par leur intensité que leur durée. Ils ne sont donc pas un indicateur fiable de ménopause (14). A noter que l’âge moyen de la ménopause en France est 51 ans.
Selon les critères du STRAW + 10, la survenue d’une aménorrhée de 12 mois ou plus, chez une femme de plus de 45 ans, permet un diagnostic de ménopause. Les signes climatériques associés (bouffées de chaleur, sécheresse vaginale, sueurs nocturnes…) sont inconstants et non indispensables au diagnostic.
Toute contraception non hormonale pourra donc être arrêtée après un an d’aménorrhée après 45 ans.
L’arrêt de la contraception hormonale est plus délicat.
D’après les RPC du CNGOF et du GEMVI de 2021, « sous contraception estroprogestative, microprogestative, par implant, ou par DIU au lévonorgestrel, les dosages hormonaux ou l’échographie pelvienne ne sont pas conseillés pour faire un diagnostic de ménopause (grade C). L’utilisation de ces examens complémentaires (dosages hormonaux, échographie pelvienne) ne peut pas être recommandée en pratique courante pour décider de l’arrêt de la contraception (grade C).
La stratégie proposée est donc l’interruption de la contraception orale, le retrait de l’implant ou du DIU hormonal, et le suivi clinique (survenue de l’aménorrhée) (avis d’expert). Pendant cette période d’interruption, une contraception non hormonale (le plus souvent par méthode barrière) pourra être mise en place avant de décider de l’arrêter après un an d’aménorrhée (avis d’expert) » (14).
En cas de persistance d’une activité ovarienne, la contraception est alors remise en place jusqu’à 55 ans. En effet, à cet âge-là, le risque de grossesse est presque nul (6).
Au total, une contraception est nécessaire après 40 ans jusqu’à la ménopause car la fertilité, même diminuée, n’est pas nulle. La contraception estroprogestative et progestative injectable sont à éviter en raison des risques vasculaires engendrés.
En ce qui concerne l’arrêt, toute contraception non hormonale pourra être arrêtée après un an d’aménorrhée après 45 ans. Pour les contraceptifs hormonaux, ils seront arrêtés lorsque la patiente le souhaitera, tout en maintenant au minimum une méthode barrière, et la survenue de l’aménorrhée sera suivie.
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(1) Finer LB, Zolna MR. Unintended pregnancy in the United States: incidence and disparities, 2006. Contraception. 2011;84(5):478–485
(2) DREES • Études et Résultats • septembre 2022 • n° 1241 • Interruptions volontaires de grossesse : la baisse des taux de recours se poursuit chez les plus jeunes en 2021
(3) Saccone G, Gragnano E, Ilardi B, Marrone V, Strina I, Venturella R, Berghella V, Zullo F. Maternal and perinatal complications according to maternal age: A systematic review and meta-analysis. Int J Gynaecol Obstet. 2022 Oct;159(1):43-55
(4) Benagiano G, Brosens I, Habiba M. Adenomyosis: a life-cycle approach. Reprod
Biomed Online 2015;30(3):220–32
(5) Sparic R, Mirkovic L, Malvasi A, Tinelli A. Epidemiology of uterine myomas: a
review. Int J Fertil Steril 2016;9(4):424–35
(6) M Lambert , E Begon, C Hocké, Contraception for women after 40: CNGOF Contraception Guidelines. Gynecol Obstet Fertil Senol. 2018 Dec;46(12):865-872
(7) World Health Organization, Reproductive Health Research, World Health Organization. Medical eligibility criteria for contraceptive use; 2015
(8) Faculty of Sexual Reproductive Healthcare. FSRH Guideline. Contraception for Women Aged Over 40 Years; 2017
(9) Lidegaard Ø, Nielsen LH, Skovlund CW, Skjeldestad FE, Løkkegaard E. Risk of
venous thromboembolism from use of oral contraceptives containing different
progestogens and oestrogen doses: Danish cohort study, 2001-9. BMJ
2011;343:d6423
(10) Lidegaard Ø, Løkkegaard E, Jensen A, Skovlund CW, Keiding N. Thrombotic
stroke and myocardial infarction with hormonal contraception. N Engl J Med
2012;366(24):2257–66
(11) Nappi C, Bifulco G, Tommaselli GA, Gargano V, Di Carlo C. Hormonal contraception and bone metabolism: a systematic review. Contraception. 2012 Dec;86(6):606-21
(12) Plu-Bureau G, Maitrot-Mantelet L, Hugon-Rodin J, Canonico M. Hormonal
contraceptives and venous thromboembolism: an epidemiological update.
Best Pract Res Clin Endocrinol Metab 2013;27(1):25–34
(13) Bofill Rodriguez M, Lethaby A, Jordan V. Progestogen-releasing intrauterine systems for heavy menstrual bleeding. Cochrane Database Syst Rev. 2020 Jun 12;6(6):CD002126
(14) Rousset-Jablonski C. Comment diagnostiquer la ménopause ? RPC Les femmes ménopausées du CNGOF et du GEMVi [How to diagnose menopause? Postmenopausal women management: CNGOF and GEMVi clinical practice guidelines]. Gynecol Obstet Fertil Senol. 2021 May;49(5):318-328