Efficacité de la spironolactone comme traitement de l’acné surtout visible après 6 mois !

L’acné est une pathologie inflammatoire du follicule pilosébacé très fréquente à l’adolescence, pouvant perdurer à l’âge adulte, avec des conséquences sociales et psychologiques non négligeables. Les traitements font appel initialement à des topiques contenant des rétinoïdes, peroxyde de benzoyle et/ou antibiotiques locaux. L’association à une antibiothérapie orale par cycline est proposée dans les cas résistants ou plus sévères. Il est cependant recommandé d’éviter de poursuivre l’antibiothérapie orale sur plus de 3 voire 6 mois en raison des risques d’antibiorésistance motivant la recherche d’alternatives efficaces.

La spironolactone est un diurétique épagneur de potassium prescrit principalement dans l’hypertension artérielle. Ses propriétés anti-androgéniques sont utilisées dans le traitement de l’acné, notamment outre Atlantique. Peu d’essais cliniques avaient jusqu’à présent évalué son efficacité.

L’essai multicentrique en double aveugle versus placebo SAFA (Spironolactone for Adult Female Acne) a étudié l’efficacité de la spironolactone chez 410 femmes âgées de plus de 18 ans, avec une acné faciale de plus de 6 mois imposant le recours à un traitement systémique. Les femmes devaient utiliser leur contraception habituelle (hormonale ou non) durant les 6 mois de l’essai et au moins les 4 semaines suivantes. La spironolactone était administrée à la posologie de 50 mg/j durant 6 semaines puis 100 mg/j jusqu’à la 24ème semaine.

L’objectif principal était l’évaluation de l’acné grâce à un score de qualité de vie spécifique à l’acné à la 12ème semaine de traitement.  Ce score noté de 0 à 30 contenait 19 questions avec 7 choix possibles sur le vécu personnel, social, émotionnel et les symptômes d’acné. Les objectifs secondaires appréciaient, via ce même questionnaire, la qualité de vie à la 24ème semaine, l’amélioration autoévaluée par les femmes, l’appréciation des praticiens et les effets secondaires éventuels.

Entre juin 2019 et aout 2021 (avec une pause durant la période de la pandémie), 342 femmes (176 dans le bras spironolactone et 166 dans le bras placebo) ont pu ainsi être recrutées en Angleterre et au Pays de Galles. L’âge moyen était de 29,2 ans (7,2 DS), 46% étaient atteintes d’acné légère, 40% d’acné modérée et 13% d’acné sévère. A l’entrée dans l’essai, un test de grossesse, une évaluation de la fonction rénale et du ionogramme sanguin et des photos du visage étaient réalisés. Aux  6ème, 12ème et 24ème  semaines, un entretien face à face (ou par vidéo durant la période de la pandémie) était programmé.

L’évaluation du score de qualité de vie en relation avec l’acné à la 12ème semaine montrait une très légère amélioration dans le groupe traité par spironolactone (1,27 IC à 95% : 0,07-2,46). En revanche, ce même score analysé à la 24ème semaine de traitement calculait une différence significative en faveur de la spironolactone (3,45 IC à 95% : 2,16- 4,75). L’amélioration notée par les femmes elles-mêmes était également notable à la 24ème semaine avec 82%  dans le groupe spironolactone versus 63% dans le groupe placebo (2,72 IC à 95% : 1,50-4,93).

Aucun effet secondaire sérieux n’avait pu être constaté durant la période de l’essai mais des effets secondaires mineurs étaient signalés, notamment céphalées (20% versus 12% ; p=0,02).

La spironolactone pourrait donc représenter une alternative intéressante à la prescription d’antibiotiques pour l’acné lorsqu’elle résiste aux topiques locaux correctement utilisés retardant ainsi le recours à des thérapeutiques plus « contraignantes » telles que l’isotrétinoïne. La détermination de la posologie optimale fait encore l’objet de recherche. Chez les femmes, l’association à une contraception est impérative compte tenu du risque potentiel de féminisation du fœtus (non retrouvé cependant dans l’espèce humaine d’après le CRAT). Précisons enfin que ce produit n’a pas l’AMM dans l’indication le traitement de l’acné et que sa prescription impose donc toutes les précautions nécessaires.

 

 

Santer M, Lawrence M, Renz S et al ; SAFA trial investigators. Effectiveness of spironolactone for women with acne vulgaris (SAFA) in England and Wales : pragmatic, multicenter, phase 3, double blind, randomised controlled trial. BMJ. 2023; 381:e074349.