Laser vaginal pour le traitement des symptômes vaginaux du syndrome genito-urinaire de la ménopause : quoi de neuf ?

Généralités

Il existe une concentration élevée de récepteurs aux œstrogènes dans le vagin, le vestibule et le trigone de la vessie. La ménopause, phénomène physiologique et progressif, survenant vers 51 ans, ou brutal, à la suite d’un traitement (chimiothérapie, radiothérapie, chirurgie) entraine une carence oestrogénique par arrêt complet de la fonction endocrine ovarienne. L’une des conséquences de cette carence est le syndrome génito-urinaire de la ménopause (SGUM) réunissant l’ensemble des symptômes génito-urinaires apparaissant à la ménopause, notamment l'atrophie vulvo-vaginale (AVV). Il s’agit d’une maladie chronique évolutive due à l'involution des muqueuses et des tissus vulvo-vaginaux entrainant un amincissement de l’épithélium vulvo-vaginal pavimenteux, une diminution des fibres de collagène et d’élastines, une altération de la fonction des cellules musculaires lisses, une raréfaction des vaisseaux sanguins, une modification du pH vaginal et de la flore commensale (1,2). Le SGUM  a comme conséquences fonctionnelles des irritations, des écoulements vaginaux, un prurit vulvo-vaginal, une sécheresse vulvo-vaginale, une sensation d’inconfort, des brulures,  des dysuries, des pollakiuries, et une augmentation des infections génito-urinaires (3). Sur le plan anatomique, on observe une régression et un amincissement des petites lèvres, une rétraction de l'introitus avec une perte de son élasticité, conduisant très rapidement à une dyspareunie superficielle. Le méat urétral devient proéminent par rapport à l'introitus induisant une irritation et des traumatismes.  En outre, une diminution de la force des tissus vaginaux et une friabilité accrue favorisent des lésions épithéliales lors d’une activité sexuelle vaginale pénétrante, responsable de douleurs vaginales, de brûlures, de fissures, d’irritations et de saignements après les rapports sexuels (4).
En raison du vieillissement progressif de la population générale, les femmes peuvent se plaindre de symptômes d’AVV pendant plus d'un tiers de leur vie (5).  L'AVV peut s'aggraver au fil des ans et altérer la qualité de vie, occasionnant une détresse émotionnelle importante et  un dysfonctionnement sexuel (6).
Des traitements locaux tels que des gels lubrifiants et hydratants, avec ou sans hormones ont fait la preuve de leur efficacité (7). Néanmoins, ils n’ont pas d’effet à long terme, principalement ceux appliqués avant un rapport sexuel (8), ce qui peut rendre leur utilisation contraignante.  
L’utilisation d’un traitement hormonal systémique de la ménopause est recommandée pour une durée la plus courte possible, à doses minimales efficaces, notamment chez les patientes à haut risque de cancer du sein. En cas de cancers hormono-dépendant évolutifs ou anciens les traitements hormonaux systémiques et locaux sont contre indiqués.
Ces dernières années, une grande demande pour une option thérapeutique sûre et pérenne, traitant la muqueuse vaginale plus en profondeur, a motivé la réalisation d’études cliniques évaluant l’utilisation du laser, en appliquant à la muqueuse vaginale, les principes de la médecine régénérative et anti-âge (9). Si les premières études de cohorte étaient encourageantes, les résultats des récentes études prospectives randomisées, dont les patientes doivent être informées, imposent d’être plus réservé concernant l’utilisation de cette technique.

Principes du laser et utilisation pour le traitement du sgum

L’énergie émise par le laser est absorbée par les molécules d’eau contenues dans les tissus humains et transformée en chaleur. Cela entraine l’ébullition des molécules d’eau, leur explosion et la dénaturation des protéines des cellules cibles. La puissance du faisceau (mesurée en Watt) et le temps d’exposition des cellules au faisceau (mesuré en secondes) déterminent la quantité d’énergie délivrée aux tissus. La puissance du faisceau du laser varie selon la zone à traiter et la sévérité de l’AVV. Le nombre d’impulsions durant le tir sur le point d’impact (unique ou multiple) et le mode d’impulsion sont des paramètres importants. Initialement un pic de puissance élevé entraine la destruction immédiate des couches superficielles de la muqueuse moins riche en eau, et secondairement un pic de puissance plus faible permet la propagation en profondeur dans la sous-muqueuse plus riche en eau et stimule directement des cellules. L’énergie thermique au niveau des muqueuses génitales stimule la réparation tissulaire, la prolifération d’un épithélium sain pluristratifié riche en glycogène, la formation de collagène au niveau de la lamina propria et la vascularisation. L’ensemble de ces phénomènes permet une meilleure lubrification et améliore les propriétés tissulaires locales (10).
Le traitement par laser est organisé sur trois séances à quatre semaines d’intervalle. Il est réalisé en consultation, sans anesthésie, sans prémédication. Une sonde vaginale spécifique est utilisée pour délivrer des impulsions permettant une émission d'énergie à 360°. Les impulsions sont réparties sur la paroi vaginale et sont espacées pour couvrir toute la zone de traitement.  Le laser est projeté vers un miroir orienté à 45° placé à l'extrémité de la sonde pour être réfléchi sur les parois vaginales. Pour traiter complètement la surface vaginale, il est nécessaire d'émettre plusieurs impulsions tout en retirant très progressivement la sonde du vagin (10).

Les effets du laser vaginal sur les symptômes d’AVV et la fonction sexuelle

 La sécheresse vaginale était significativement améliorée dans l’étude de Sindou-Faurie et al. Avant traitement, 47,8% des patientes avaient un score <2 sur l’échelle visuelle analogique. En fin de traitement, il y en avait seulement 8,7% (p=6,34 10^6). Les séances de laser avaient également un impact positif sur la dyspareunie (p=0,0001) (11,12). Les symptômes vaginaux de sécheresse, de prurit et de dyspareunie ont été améliorés de manière significative (p <0,05) à toutes les évaluations dans l’étude de Samuels (91% d’amélioration de la sécheresse vaginale à 1 an) (13). Sokol et al. n’ont pas montré d’efficacité sur le prurit (p=0,122) (11) ni la dysurie (14). Il a été démontré que le laser vaginal a un impact positif sur l’incontinence urinaire d’effort et mixte, mais que l’amélioration reste moins importante que sur les symptômes vulvo vaginaux (15–17). 
Sur le plan de la vie sexuelle, dans une étude prospective et expérimentale, publiée en 2018 par Samuels et al., la plupart des patientes avaient une amélioration fonctionnelle sexuelle dès la première séance avec 68% d’entre elles qui rapportaient une amélioration du désir, 75% de l'excitation, 75% de la lubrification, 65% de l'orgasme, 80% de la satisfaction et 73 % de la douleur. Soixante-huit pour cent des patientes observaient une amélioration du désir, et 75% de l'excitation lors du suivi à 12 mois (13).
Salvatore et al. ont mis en évidence une amélioration significative de la qualité de vie sexuelle et de la satisfaction globale sexuelle des femmes traitées par le laser CO2 fractionné. Parmi les femme qui n'étaient initialement pas sexuellement actives en raison de l’AVV (20/77), 85% ont retrouvé une activité sexuelle normale (4,18). A la fin de l’étude 96.1% des femmes étaient sexuellement active, contre 74% au démarrage (p<0.001) (4).
Pitsouni et al. ont réalisé une étude observationnelle étudiant l’effet du laser vaginal jusqu’à quatre semaines après la troisième séance de traitement. Les auteurs ont montré une amélioration de la fonction sexuelle de manière significative. Ainsi, 94% des participantes qui n'avaient pas d'activité sexuelle au départ, en raison de l’AVV, ont repris une activité sexuelle et la fréquence des rapports sexuels mensuels a augmenté de manière significative dans la population des patientes traitées, passant d'une moyenne de 1,6 ± 2,1 à 4,1 ± 2,1 (p<0,001) (19).
Sindou-Faurie et al. ont montré une amélioration significative de la qualité de l’activité sexuelle, avec 2.2% à 6.5% de patientes ressentant des douleurs ou inconforts lors des rapports sexuels après traitement, par rapport à 39.1% avant les séances de laser (p=0.007). Concernant la satisfaction globale dans leur vie sexuelle, il y avant dans cette étude une tendance à l’amélioration. En effet, 28.3% étaient satisfaites de leur vie sexuelle après traitement, contre 8.7% avant le traitement et 13% étaient insatisfaites après le traitement, contre 28.3% avant les séances de laser (p=0.07). Une amélioration significative sur la capacité à obtenir (p=0.02) et maintenir (p=0.018) une lubrification satisfaisante pendant les rapports sexuels, et une diminution des douleurs pendant et après la pénétration vaginale (p< 0.009) étaient apportées par le laser. Les auteurs n’ont pas mis en évidence d’impact statistiquement significatif sur le désir (p=0.13) ou l’intérêt sexuel (=0.07), le plaisir ressenti (p=0.8), le niveau du plaisir ressenti (p=0.4), et la fréquence d’atteinte de l’orgasme (p=0.47)(11).
Les études de satisfaction globale du traitement ont montré qu’à un mois du traitement,  36% de femmes étaient très satisfaites, 40% de satisfaites, 12% d’insatisfaites, 12% ne se prononçant pas et aucune très insatisfaite (12). A un an de la fin du traitement, 92% des femmes étaient satisfaites ou très satisfaites (14). L'amélioration pour toutes les catégories de symptômes était statistiquement significative à 3 mois et jusqu'à 12 mois (14).

Apports des études prospectives randomisées récentes

En juillet 2018, la Food and Drug Administration alertait aux Etats-Unis sur l’utilisation du laser pour le traitement des symptômes vaginaux du SGUM, rapportant l’association à des événements indésirables (des brûlures vaginales, des cicatrices, des douleurs pendant les rapports sexuels et des douleurs récurrentes), et rappelant que la sécurité et l'efficacité des dispositifs à base d'énergie pour le traitement de ces affections n'était pas été établies.
En octobre 2021, la publication dans le journal JAMA des résultats d’une étude prospective comparant l’effet du laser à celui d’une procédure placebo sur 85 patientes présentant des symptômes vaginaux de SGUM n’a pas permis de montrer une amélioration significative du laser sur la gravité des symptômes, la qualité de vie des patientes, le score d’indice de santé vaginale (20). Ces résultats ont conduit certains auteurs à discuter la pertinence du développement de cette technique (21), tandis que d’autres ont rappelé l’importance de disposer de solution, notamment pour les patientes présentant des contre-indication à l’utilisation des traitements hormonaux (22). En 2023, Mension et al. publient les résultats d’une étude prospective randomisée comparant l’efficacité du laser à une procédure placebo chez 72 femmes traitées pour un cancer du sein et recevant un traitement par anti-aromatase. Les auteurs ont montré une amélioration de plusieurs paramètres dans les deux groupes après traitement, notamment sur la qualité de vie sexuelle, mais n’ont pas montré de différence significative entre les deux groupes concernant les symptômes rapportés et des critères d’évaluation objectifs (23), ce qui conduit à penser que la prise en charge des symptômes a un effet positif sur les symptômes vaginaux du SGUM et la sexualité, indépendamment de la nature de l’intervention proposée.
Ces études n’ont pas rapporté d’effet indésirable grave.

 

Conclusion

Les résultats des études randomisées récentes doivent conduire à moduler l’efficacité du laser pour le traitement des symptômes vaginaux du SGUM et leur effet sur le confort et la sexualité des patientes. Celles-ci doivent être informées des résultats de ces publications. L’utilisation d’hydratants est recommandée en première intention et peut être associée à l’utilisation d’œstrogènes locaux à faible dose pendant une courte période. Il faut noter que les données sont rassurantes concernant les risques liés à l’utilisation du laser et que les études montrent que la prise en charge de ces symptômes est capitale, quelle que soit la technique utilisée. Des travaux doivent encore être menés pour préciser davantage la place du laser dans l’arsenal thérapeutique et les patientes qui pourraient en tirer le plus grand bénéfice.

 

Bibliographie

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