Le DIU pour les nullipares

Service de chirurgie gynécologique, gynécologie médicale et médecine de la reproduction, centre Aliénor d'Aquitaine, Centre Hospitalo-Universitaire Pellegrin, Bordeaux

En France, le dispositif intra utérin (DIU) est un moyen contraceptif de plus en plus utilisé, se plaçant en 2ème position après la contraception orale.
Son utilisation chez la patiente nullipare reste néanmoins plus limitée du fait de craintes exprimées par les femmes et les praticiens. Il est cependant un moyen de contraception de longue durée d’action à privilégier chez ces patientes en raison de taux de continuation et de satisfaction bien meilleurs que les contraceptions orales avec une efficacité indépendante de l’observance (1)(2).

“Choisir sa contraception” est le slogan des dernières campagnes contraceptives et un nombre croissant de patientes nullipares souhaitent un DIU. D’après le Baromètre santé 2016, il est le premier contraceptif utilisé à partir de 35 ans (34,6 % des 34–39 ans) alors que son emploi demeure marginal chez les 20–24 ans (4,7 %). En cause, des préjugés encore tenaces sur les complications possibles. Le DIU constitue pourtant une méthode contraceptive très efficace avec des taux de grossesse à 12 mois compris entre 0,2 et 0,8% et un taux de continuation au terme de la première année d’utilisation d’environ 80 % (3).
Le DIU est ainsi -selon les recommandations de la HAS de 2018- une contraception à proposer aux femmes et aux adolescentes, quelles que soient la parité et la gestité. Une vigilance particulière devra être portée sur la taille du DIU à adapter à la nullipare (modèle short) et à la délivrance d’une information claire à la patiente sur les effets indésirables et les risques potentiels (4).
Dans la pratique quotidienne, nous faisons face à différents freins professionnels et sociétaux face au choix de la pose d’un DIU à une patiente nullipare, que nous allons développer ci-après.

  • Un des freins principaux est le risque infectieux. Ce risque est évalué à 1,6 pour 1 000 femmes par an et prédomine dans les 20 jours après l’insertion (9,7 contre 1,4/1 000 femmes ensuite) (5). Ce risque n’est pas majoré chez la patiente nullipare si les recommandations de dépistage sont respectées. Un dépistage systématique des infections sexuellement transmissibles (IST) n’est pas recommandé avant la pose d’un DIU. En revanche, il est recommandé en présence de facteurs de risque d’IST (âge inférieur à 25 ans, partenaire récent de moins de trois mois, partenaires multiples dans la dernière année, antécédent(s) d’IST, rapports sexuels non protégés), avec notamment la recherche de Chlamydia trachomatis et Neisseria gonorrheae. Ce dépistage est effectué idéalement le jour de la prescription de la contraception intra-utérine mais peut être réalisé le jour de la pose du DIU sans en retarder l’insertion si la patiente est asymptomatique. Il n’y a pas d’indication à une antibioprophylaxie systématique. Qu’importe la situation, la délivrance d’informations claires concernant la prévention du risque infectieux ainsi que les consignes de consultation en urgence est impérative. Par ailleurs, les antécédents d’IST ou d’infection génitale haute ne contre-indiquent pas l’insertion d’un DIU à distance de l’épisode (3mois) (4)(6)(7).
  • L’utilisation d’un DIU chez les patientes nullipares n’augmente pas le risque de pathologie tubaire et donc d’infertilité (8). En revanche, la présence d’une sérologie Chlamydia trachomatis positive est pourvoyeuse d’infertilité tubaire avec un risque multiplié par 2. Le risque d’infection et d’infertilité est donc principalement lié au comportement sexuel des patientes plutôt qu’au DIU.
  • La contraception intra-utérine ne constitue pas un facteur de risque de grossesse extra-utérine (GEU) (9). Néanmoins, en cas de grossesse sur DIU, il convient en premier lieu d’éliminer une GEU. A noter qu’un antécédent de GEU ne contre-indique pas la pose d’un DIU (6).
  • La crainte de la douleur est un frein à l’utilisation du DIU pour beaucoup de patientes. Les douleurs lors de la pose sont plus intenses chez la nullipare mais restent acceptables pour la majorité d’entre elles. Un point important sera de les en informer lors de la discussion du choix de la méthode contraceptive et de prescrire un antispasmodique avant la pose (6). Des dispositifs de petite taille, plus adaptés aux nullipares, sont maintenant commercialisés et à privilégier chez ces patientes. Une revue de la littérature a été réalisée en 2019 concernant les options antalgiques avant et après la pose du DIU (misoprostol, lidocaine locale, AINS, monoxyde d’azote inhalé, hypnose) et ne montrait pas d’amélioration statistiquement significative (10) (11).

Il est également préférable que les patientes aient bénéficié d’un examen gynécologique préalable à la pose du DIU. En effet, le taux de satisfaction est inférieur chez les patientes n’ayant jamais été examinées (OR 0,26; IC 95%(0,069 - 0,99) (12). 

  • La perforation utérine est une complication rare (< 2/1 000 insertions), survenant le plus souvent au cours de la pose. Son diagnostic survient fréquemment à distance de l’insertion. Ce risque n’est pas augmenté chez la patiente nullipare (13).
  • L’expulsion survient le plus souvent dans la première année suivant la pose. Ce risque n’est pas augmenté chez la nullipare. Les facteurs de risque d’expulsion comprennent cependant l’âge < 20 ans. Il est recommandé de vérifier la présence des fils lors de l’examen gynécologique de la visite de suivi, dans les semaines suivant la pose d’un DIU, puis annuellement (6).

Les DIU peuvent être insérés après une IVG (chirurgicale ou médicamenteuse) en l’absence de contre-indications. Quel que soit le DIU, il peut être mis en place immédiatement au décours de l’aspiration après une IVG chirurgicale (en dehors des cas d’épisode infectieux en cours) en tenant compte d’un risque d’expulsion 2,5 plus grand. Il peut aussi être posé lors de la visite de contrôle après une IVG médicamenteuse si la vacuité utérine à l’échographie est constatée et/ou si le dosage de bêta-hCG plasmatique est négatif. En cas de doute, le DIU est posé lors des règles suivantes et dans ce cas, une autre contraception doit être utilisée dans l’intervalle (14).
L’utilisation de la coupe menstruelle, de plus en plus pratiquée chez les jeunes patientes, est possible avec un DIU. Il nous faudra cependant en avoir discuté et rester vigilants en coupant les fils très courts. De même, il nous faudra apprendre aux patientes à retirer correctement leur coupe avec un mouvement de bascule afin de limiter l’effet ventouse et donc le risque d’expulsion ou de déplacement du DIU.

  • Le DIU au cuivre peut être utilisé comme contraception d’urgence ; il est de loin la plus efficace jusqu’à 5 jours (120h) après un rapport sexuel non protégé.  Il peut alors être le point de départ d’une contraception efficace, de longue durée d’action, mais son accessibilité peut être entravée par un manque de disponibilité des praticiens et une méconnaissance des femmes (6)(15). Le DIU au lévonorgestrel (LNG) n’a pas l’AMM en contraception d’urgence mais une étude récente a mis en évidence une non-infériorité du DIU-LNG 52 mg par rapport au DIU au cuivre en termes d’efficacité en contraception d’urgence (16).
  • A propos de la tolérance de cette méthode, la revue de la littérature d’Usinger et al. a montré un taux de continuation à 12 mois du DIU chez les patientes de moins de 25 ans bien meilleur que celui des autres moyens de contraception (p = 0,004), en particulier par rapport à la contraception orale estroprogestative (p < 0,001) (17).

Pour le DIU au cuivre, une étude française a observé un taux de continuation à 6 mois de 92,8 % pour les multipares et 83,4 % pour les patientes nullipares, sans différence significative. Par ailleurs, parmi les nullipares, 64 % des patientes observaient des règles d’abondance supérieure et 72 % des patientes déclaraient avoir des dysménorrhées nécessitant la prise d’antalgiques. Elles en restaient néanmoins très satisfaites ou satisfaites pour 89 % dans la vie quotidienne et 96 % dans la vie sexuelle sans différence avec les multipares (respectivement 97 % et 100 %) (18). Cela démontre l’importance de l’information de la patiente quant aux symptômes liés au DIU au cuivre.
Concernant le DIU au LNG, les patientes présentent moins de symptômes à type de règles abondantes (2% vs 74%) ou de crampes sévères (20% vs 68%) en comparaison avec le DIU au cuivre (19). Il est ainsi observé moins de complications et de retraits précoces avec une satisfaction des nullipares excellente (20). Le retrait à 12 mois est significativement plus fréquent avec l’implant progestatif (26,8 % versus 19,6 % avec le DIU au lévonorgestrel 13,5 mg) en raison d’un pourcentage plus important de ménométrorragies sous implant (11,3 % versus 3,2 %) (21).

En conclusion, le DIU est à privilégier chez les patientes jeunes et nullipares qui souhaitent utiliser ce moyen de contraception de longue durée d’action. Le taux de continuation et la tolérance sont élevés, avec une efficacité excellente. Les IST devront être dépistées chez les femmes présentant des facteurs de risque. Il n’est pas retrouvé dans la littérature d’augmentation des risques -en particulier d’infection et d’infertilité- chez les nullipares.
Le praticien devra choisir un DIU de taille adaptée à la nullipare et être formé à sa pose. Le principal élément du succès de ce moyen de contraception sera l’information de la patiente (à propos de l’insertion et des éventuels effets secondaires) et son éducation thérapeutique.

Bibliographie:

  1. Jatlaoui TC, Riley HEM, Curtis KM. The safety of intrauterine devices among young women: a systematic review. Contraception. 2017 Jan;95(1):17-39.
  2. Bahamondes, M V., Bahamondes, L. Intrauterine device use is safe among nulligravidas and adolescent girls. Acta Obstet Gynecol Scand. 2021; 100: 641– 648.
  3. Rahib D., Le Guen M., Lydié N. Contraception. Quatre ans après la crise de la pilule, les évolutions se poursuivent. Santé Publique Fr. Baromètre Santé 2017;1–8 2016.
  4. Contraception chez la femme adulte et l’adolescente en âge de procréer (hors post-partum et post-IVG), Méthode Fiche Mémo HAS, avril 2013, MAJ juillet 2019
  5. Farley TM, Rosenberg MJ, Rowe PJ, Chen JH, Meirik O. Intrauterine devices and pelvic inflammatory disease: an international perspective. Lancet 1992; 339(8796):785-8.
  6. Vidal F, Paret L, Linet T, Tanguy  Le Gac Y, Guerby P. Contraception intra-uterine. RPC Contraception CNGOF, Gynecol Obstet Fertil Senol. 2018;46(12): 806-822
  7. Grentzer JM, Peipert JF, Zhao Q, McNicholas C, Secura GM, Madden T. Risk- based screening for Chlamydia trachomatis and Neisseria gonorrhoeae prior to intrauterine device insertion. Contraception 2015;92(4):313-8.
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  9. Elgemark K, Graner S, McTaggart J, Ramirez Löfström J, Sörensen D, Envall N, Kopp Kallner H. The 13.5-mg, 19.5-mg, and 52-mg Levonorgestrel-Releasing Intrauterine Systems and Risk of Ectopic Pregnancy. Obstet Gynecol. 2022 Aug 1;140(2):227-233.
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  18. Branger B, Priou E, David P. Dispositif intra-utérin au cuivre (DIUc) : comparaison de la tolérance et de l’efficacité chez des nullipares et des multipares sur 6 mois [Copper-containing intrauterine device (cIUD): Comparison of tolerance and efficacy in nulliparous and parous women over 6 months]. Gynecol Obstet Fertil Senol. 2021 Dec;49(12):897-906.
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