Hormone Anti-Müllerienne (AMH) ≤ 0,3 ng/ml en FIV : est-ce une fin de « non-recevoir » ?

Il s’agit d’un résumé d’une étude rétrospective menée au Weill Cornell Medical Center (NY, USA) sur des patientes présentant une insuffisance ovarienne avec des taux d’hormone anti-müllerienne (AMH) ≤ 0.3 ng/ml et ayant initié une fécondation in vitro (FIV) entre 2013 et 2019.

Connaissances actuelles :

L’AMH est une glycoprotéine produite par les cellules ovariennes de la granulosa et reflétant les cohortes folliculaires au niveau du cortex ovarien, augmentant progressivement depuis la naissance jusqu’à atteindre un plateau à l’âge moyen de 25 ans pour ensuite décliner jusqu’à la ménopause.

Plusieurs études ont montré que les niveaux d’AMH reflètent la « réserve folliculaire » et sont un des marqueurs avec l’échographie pelvienne de ce que l’on peut attendre en termes de réponse ovarienne à une induction d’ovulation.

Même s’il est reconnu que des taux bas d’AMH peuvent résulter en une diminution des chances de concevoir et peuvent quelquefois amener trop rapidement à des conseils de don d’ovocytes, plusieurs études, dont celle de STEINER et coll., ont montré de façon prospective que dans des cas d’infertilité chez des patients présentant des taux d’AMH < 0.7 ng/ml, il n’y avait pas de diminution drastique de la fertilité, qu’il s’agisse de conception spontanée ou de traitement d’assistance médicale à la procréation.

L’étude de REVELLI avait évalué les taux de grossesse chez les patientes dont le taux d’AMH était inférieur au 10e percentile, soit des valeurs < à 0.5 mg/ml, et avait rapporté des taux de grossesses à terme « raisonnables » concluant qu’un taux bas d’AMH ne devrait pas être une raison suffisante pour interrompre de principe un traitement d’infertilité et de diriger les patientes vers des protocoles de dons d’ovocytes.

Néanmoins, il s’agissait d’études limitées par la taille des cohortes.

Critères d’exclusion de l’étude :

Antécédents de chimiothérapie, de traitement contraceptif dans les 3 mois qui ont précédé les mesures d’AMH et infertilité masculine sévère.

Les résultats :

Les résultats ont été analysés sur le taux de grossesses à termes par cycles de fécondation in vitro en comparaison avec les taux de grossesse rapportés par le SART en 2018 (Society Assisted Reproductive Technology) reportés aux taux de grossesses par recueils ovocytaires.

Une cohorte de 978 patientes a été incluse dans l’étude : entre 1 à 3 cycles de FIV ont été réalisés chez les patientes dont les taux d’AMH étaient ≤ 0.3 ng/ml.

Dans la cohorte étudiée, 230 cycles initiés, soit 23,5% des traitements de FIV ont été annulés, la conversion en insémination intra-utérine (IUI) allait de 6,8%
(7 cycles/103) pour des patientes âgées de moins de 35 ans, à 19,4% (49 cycles/250) pour des patientes âgées de plus de 42 ans.

En termes de grossesses, les résultats montrent une diminution notable des taux de grossesses en comparaison des résultats du SART et une diminution au fur et à mesure de l’âge des patientes.

Néanmoins, au vu de « l’insuffisance ovarienne » présentée par les patientes, ces taux peuvent être considérés comme satisfaisants : chez les patientes de moins de 35 ans, les taux de grossesses sont de 26,2% / 55,6% pour la cohorte SART.

Entre 35 et 37 ans, les taux de grossesses sont de 15,9% / 40,8% pour la cohorte SART.

Ces taux de grossesses diminuent ensuite de façon importante puisqu’entre 41 et 42 ans, les auteurs rapportent un taux de grossesses évolutives de 4,7% / 13,4% et au-delà de 42 ans, les taux de grossesses sont de 1,2% / 4,1% pour la cohorte SART.

Les auteurs concluent :

  • que la qualité ovocytaire n’est pas diminuée chez les patientes ayant des taux d’AMH ≤ 0.3 ng/ml,
  • que la diminution des taux de grossesses à terme par cycles initiés de FIV dans toutes les catégories d’âge est probablement plus expliquée par la diminution de dons d’ovocytes recueillis, avec pour corollaire la diminution du nombre d’embryons à transférer,
  • au vu de ces résultats, les auteurs estiment importants qu’une information complète soit donnée aux couples chez les patientes présentant une « insuffisance ovarienne », notamment avant une décision d’indication de don d’ovocytes.

Les limitations de cette étude rapportées par les auteurs sont notamment le caractère rétrospectif de l’étude et le fait que le nombre de cas étudiés selon les tranches d’âges reste limité.

(NDLR : certaines données n’apparaissent pas dans cette étude, notamment les résultats préalables de comptes folliculaires étudiés par échographie pelvienne, qui peut être également un facteur limitant voire discordant avec les taux d’AMH ; on ne connait pas dans cette étude à partir de quel nombre de follicules une ponction ovarienne était soit réalisée soit annulée).

Live-Birth Outcomes Among Women With Infertility and Anti-Müllerian Hormone Levels of 0.3 ng/ml or Lower – Philip A. Romanski, Brady GELWIN, Pietro BORTOLETTO, Zev ROSENWAKS, Hey-Joo KANG

2022 by American College of Obstetrians and Gynecologists Wolters Kluwer Health. Inc.

Bibliographie : http:/links.lww.com/AOG/c822