AMP, endométriose, ponction ovocytaire, information

(arrêt 26 janvier 2022, Cour d’appel de Riom, n° 20/00515)

   Agée de 34 ans, après un bilan d’infertilité, la plaignante s’oriente vers un protocole de PMA après une quinzaine d’années d’endométriose sévère et persistante, malgré les traitements médicaux et chirurgicaux mis en œuvre. Une ponction ovocytaire sous anesthésie générale est réalisée, après laquelle elle présente une pelvi-péritonite infectieuse, nécessitant une cure chirurgicale et une hospitalisation avec arrêt de travail.

   Il est constaté un hémato-salpinx et une majoration des lésions d’endométriose, réalisation d’une ablation des trompes.

   L’expertise conclut que le diagnostic établi et les soins pratiqués ont été consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science, que les différentes interventions pratiquées étaient nécessaires compte tenu des importantes lésions endométriosiques et du désir de grossesse de la patiente, que le choix thérapeutique était conforme aux recommandations. Pas de faute de négligence, d’inattention, d’imprudence, ou de manquement aux règles de l’art imputable au médecin. En revanche, il est constaté une insuffisance d’information, reconnue par le gynécologue, sur tous les risques inhérents à la ponction ovocytaire et l’arrêt du 26 janvier 2022 retient ce qui suit :

« Après avoir précisément exposé que la réalisation d’une ponction ovocytaire sur une patiente atteinte d’endométriose présente un risque d’abcès ovarien et/ou de péritonite dix fois supérieur à la norme, l’expert a néanmoins relevé que les diagnostics établis et les soins pratiqués ont été consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science […].

Il incombe au médecin d’apprécier le risque au regard du bénéfice tiré de l’intervention, lequel était clairement établi pour Mme Y eu égard à sa volonté de débuter une grossesse et à sa parfaite conscience que le seul moyen d’y parvenir était de recourir à une fécondation in vitro, supposant une ponction d’ovocytes.

« L’expert a conclu que compte tenu de la détermination de Mme Y à mener à terme un projet de grossesse, elle ne pouvait se soustraire à une ponction d’ovocytes malgré les risques. […]

« Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme Y de sa demande tendant à voir engager la responsabilité du médecin sur le fondement de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique [responsabilité pour faute].

« Sur le défaut d’information : En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l’établissement de santé d’apporter la preuve que l’information a été délivrée à l’intéressé dans les conditions prévues par l’article L. 1111-2 du code de la santé publique. Cette preuve peut être apportée par tout moyen. […]

« En l’espèce, l’expert a retenu qu’il y avait eu une insuffisance d’information donnée à Mme Y sur tous les risques inhérents à la ponction ovocytaire et relate que le praticien a admis, au cours de la réunion contradictoire, ne pas avoir donné une information spécifique en rapport avec le geste qu’il devait effectuer lors de sa ponction et de ses éventuelles complications.[…]

« Faute d’avoir été correctement informée sur les risques notamment infectieux inhérents à la ponction ovocytaire qui a été directement responsable de la péritonite que la patiente a présentée dans les suites, et sur la majoration de ces risques liée à ses antécédents, Mme Y a été privée d’une chance de refuser l’intervention et donc de voir le risque se réaliser.

« L’indemnité due à la victime d’un accident médical qui a perdu une chance, du fait d’un défaut d’information sur les risques, d’éviter le dommage en refusant définitivement ou temporairement l’intervention projetée correspond à une fraction des préjudices corporels découlant de la réalisation du risque. Cette fraction est déterminée en fonction de la probabilité qu’une parfaite information aurait conduit la patiente à refuser l’intervention. Lors de son entretien avec Mme Y, l’expert a noté que cette dernière avait rempli un dossier de PMA compte tenu de son désir de grossesse depuis 2010 et rencontré le médecin car elle désirait ardemment débuter une grossesse. Depuis, elle avait changé de conjoint et a mis à jour sa demande de FIV.

« L’expert note encore que devant le fort désir de grossesse de Mme Y la seule solution était de recourir à une fécondation in vitro.

« Compte tenu de la détermination exprimée par Mme Y dans son projet de grossesse, la probabilité qu’elle renonce à ce projet si elle avait été parfaitement informée sur les risques de la ponction ovocytaire peut être évaluée à 20 %. […] Il résulte du rapport d’expertise que les complications post-opératoires survenues à la suite de la ponction ovocytaire ont été à l’origine d’un sepsis pelvien avec collections multiples et syndrome subocclusif ayant nécessité une hospitalisation du 13 au 20 novembre et un arrêt de travail jusqu’au 1e février, date de consolidation retenue par l’expert. »

La Cour confirme le jugement qui a débouté Mme Y de sa demande tendant à voir engager la responsabilité pour faute du médecin.

En revanche, l’arrêt retient que le défaut d’information a occasionné une perte de chance de 20 % d’éviter les complications post-opératoires survenues à la suite de la ponction ovocytaire pratiquée et condamne le médecin et son assureur à payer notamment :

  •     1 200 € au titre des souffrances endurées,
  •     3 225 € au titre du déficit fonctionnel permanent,
  •        200 € au titre du préjudice esthétique,
  • et 3 000 € au titre du préjudice moral.

 
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