Valeurs usuelles du spermogramme dans une population d’hommes fertiles selon les références de l’OMS en 2010

Le spermogramme est le premier examen à réaliser chez l’homme dans le cadre de l’exploration du couple infertile. Les valeurs du spermogramme doivent être interprétées en fonction de valeurs de référence et orientent la prise en charge du couple, éventuellement vers une technique d’Assistance Médicale à la Procréation. À ce titre les valeurs de références auxquelles sont comparées les valeurs du spermogramme du patient sont importantes pour une bonne interprétation et une bonne prise en charge.

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) publie régulièrement (1987, 1992, 1999) des valeurs de référence du spermogramme. De nouvelles valeurs de références viennent d’être mises en place récemment (Cooper T G et col, 2010).

La définition de valeurs de référence pour un spermogramme se heurte au problème de la définition d’une population de référence, et à l’extrême variabilité des paramètres du sperme pour un même patient au cours du temps mais également entre les valeurs moyennes des paramètres du sperme pour des populations différentes (Jorgensen N et col, 2001), ces variations étant certainement liées à des conditions de vie et d’environnement différentes.

L’étude ayant permis de mettre à jour les valeurs de référence de l’OMS 2010 a utilisé une population de patients fertiles venant de 8 pays différents, sur 3 continents différents (Cooper TG et col, 2009). Ces patients appartenaient à des couples dont les conjointes avaient eu récemment une grossesse après moins d’un an d’attente entre le souhait de grossesse et la survenue de celle-ci. L’étude compare également ces résultats avec une population générale d’hommes volontaires dont le statut concernant la fertilité n’était pas connu.

Les références données par l’OMS font suite aux techniques d’analyse du sperme telles que notifiées dans le manuel de l’OMS (WHO 2010). Ces techniques sont celles classiquement utilisées en France par la majorité des laboratoires d’AMP, en ce qui concerne la numération, la mobilité et la vitalité. Par contre, le mode d’étude du spermocytogramme (formes typiques et atypiques) selon le manuel de l’OMS n’est pas celui utilisé dans beaucoup de laboratoires français. En effet, le manuel de l’OMS préconise une étude des formes typiques de spermatozoïdes selon des critères plus stricts (Kruger et col, 1986) que la classification de David utilisée par une majorité de laboratoires français (David et col, 1975). Il est donc nécessaire d’interpréter la valeur de référence des formes typiques et atypiques avec prudence.


Spz typique


Spz à flagelle enroulé


Spz avec reste
cytoplasmique


Spz macrocéphale


Spz microcéphale

D’autre part, la nouvelle édition du manuel de l’OMS ne différencie plus les spermatozoïdes mobiles progressifs (ancien type a), lents (ancien type b) et mobiles sur place (ancien type c) pour ne plus parler que de mobilité totale et de mobilité progressive.

Il est important de noter ici que les références du spermogramme selon le manuel de 2010 sont sensiblement différentes de celles de la dernière édition (1999) traduisant une altération des paramètres du sperme dans les populations étudiées ; phénomène suspecté depuis plusieurs années (Auger J et col, 1995).

Au sein de cette population de référence, il est également difficile de choisir les valeurs limites au dessus desquelles un résultat peut être considéré comme normal. Le manuel 2010 de l’OMS choisit de prendre comme valeurs limites basses pour cette population d’hommes fertiles les valeurs du 5e percentile, ce qui correspond aux valeurs suivantes :

 

 

  Volume de l’éjaculat (ml) : 1,5 (1,4 – 1,7)
  Numération/éjaculat (millions) : 39 (33 – 46)
  Concentration spermatozoïdes (millions/ml) : 15 (12 – 16)
  Mobilité totale (%) : 40 (38 – 42)
  Mobilité progressive (%) : 32 (31 – 34)
  Formes typiques (%) : 4 (3 – 4)

 

Le manuel de l'OMS propose donc de considérer comme normales des valeurs de spermogramme supérieurs ou égales à ces valeurs. Il est important de noter que la valeur du 5e percentile pour cette population montre, par définition, que des hommes fertiles (5 % de la population choisie selon les critères ci-dessus) peuvent avoir des valeurs inférieures à ces seuils.

Ces données traduisent bien la difficulté de donner des valeurs seuils pour les paramètres de cet examen, ainsi que l’insuffisance du spermogramme dans l’exploration de l’homme d’un couple infertile, à la fois parce que cet examen n’explore pas la totalité des fonctions des spermatozoïdes dans la fécondation et le développement embryonnaire précoce, mais également parce que les paramètres féminins peuvent compenser des caractéristiques du sperme paraissant insuffisantes.

L’étude du Test de Migration Survie (TMS) est une obligation légale (Guide de Bonne Pratique en AMP) et doit montrer la possibilité d’obtenir après préparation du sperme (migration et centrifugation sur gradient) au moins 1 million de spermatozoïdes mobiles pour réaliser une insémination intra utérine. Le nombre de spermatozoïdes mobiles obtenus après TMS est également un argument pour le choix de la technique de fécondation in vitro avec ou sans micro injection.

Après une étude du spermogramme qui doit rester l’examen de première intention, il peut être utile d’aller plus loin dans les méthodes d’exploration du sperme, comme détaillé dans la manuel de l’OMS ; biochimie du sperme, test de fixation à la zone pellucide, recherche d’anticorps anti-spermatozoïdes, étude de la qualité de l’ADN nucléaire des spermatozoïdes (fragmentation et dispersion de l’ADN), de la qualité des chromosomes par l’étude de l’aneuploïdie des spermatozoïdes. Depuis peu, et pour quelques indications encore mal définies, certaines équipes d’AMP mettent en place une étude de la morphologie des spermatozoïdes à un très fort grossissement afin de visualiser la présence de vacuoles qui peuvent être délétères pour le développement embryonnaire. Ces examens de deuxième intention doivent être demandés dans des contextes particuliers, soit de résultats de spermogrammes très pathologiques, soit d’échecs de tentative d’AMP. Ils doivent être interprétés avec prudence, en fonction de valeurs limites dont certaines sont encore en cours d’évaluation. Comme pour le spermogramme classique, les valeurs limites utilisées pour interpréter ces techniques restent soumises à discussion car des caractéristiques apparemment délétères peuvent être compensées par une bonne qualité ovocytaire.

Il est donc important d’interpréter l’ensemble de ces examens d’exploration masculine dans le contexte d’une exploration de l’infertilité du couple intégrant les examens d’exploration féminine.

Auger J, Kunstmann JM, Czyglik F et col. (1995)Decline in semen quality among fertile men in Paris during the past 20 years. N Eng J Med, 332, 281 – 285.

Cooper T.G., Noona E, Von Eckardstein et col (2009). World Health Oraganization reference value for human semen characteristics. Hum Reprod Update, vol 00 ; 1-15.

David G et col (1975). Anomalies morphologiques du spermatozoïde humain. Proposition pour un système de classification. Journal Gynécologie Obstétrique et Biologie de la Reproduction, 4 (suppl. 1) ; 17-36.

Jorgensen N, Andersen AG, Eustache F et col. (2001) Regional differences in semen quality in Europe. Hum Reprod, vol 16, n°5, 1012 – 1019.

Kruger TF et col (1986). Sperm morphology features as a pronostic factor in in vitro fertilization. Fertil and Steril ; 46 ; 1118-1123.

World Health Organization. Laboratory manual for the Examination and Processing of Human Semen. Fith édition (2010).

 
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