FIV : supplémentation en progestérone pendant la phase lutéale

Résultats de la supplémentation en progestérone pendant la phase lutéale,
suite au transfert d’embryon après vitrification

Deux articles parus, l’un dans Human Reproduction (2021) et l’autre dans RBMO (ELSEVIER) (2021), évoquent le rôle de la supplémentation en progestérone dans les cycles de transferts embryonnaires, après décongélation, pendant la phase lutéale.

L’article de Hakan YARALI et coll. (Anatolia IVF Center ANKARA – Turquie, Fertility Clinic SKIVE – Danemark) analyse le rôle de la supplémentation en progestérone dans la phase lutéale de transfert embryonnaire après décongélation au stade blastocyste.

L’étude menée par YARALI et coll. a inclus 40 patientes pour lesquelles les concentrations en progestérone au 5e jour de la supplémentation en progestérone étaient inférieures à
8,75 ng/ml,  et pour lesquelles une administration de progestérone en sous-cutané (injection sous-cutanée de 25 mg de progestérone) a débuté au 5e jour après l’administration classique de progestérone par voie vaginale.

Le groupe contrôle a consisté en l’analyse des dossiers de 120 patientes, dont les critères de sélection par âge, BMI, nombre de tentatives précédentes et nombre de blastocystes transférés étaient identiques.

Dans le groupe contrôle, la concentration en progestérone, mesurée au 5e jour après le début de la supplémentation classique, était supérieure à un taux de 8,75 ng/ml.

Le critère de résultats significatifs était le taux de grossesses évolutives (ongoing pregnancy rate, OPR).

Les auteurs prennent comme définition d’une OPR par l’examen échographique visualisant un sac ovulaire avec un embryon et une activité cardiaque au-delà de 12 semaines d’âge gestationnel.

Résultats

- L’âge moyen des patientes dans le groupe traité et dans le groupe contrôle était similaire (31,7 +/- 4,8 ans et 31,6 +/- 4,7 ans).

Les données cliniques et biologiques des traitements précédemment subis étaient identiques dans les deux groupes.

- Annulation des cycles

Dans 4 cas où les taux de progestérone étaient inférieurs à 4 ng/ml, dosés à 5 jours de supplémentations en progestérone, par supplémentation standard de progestérone (gel de progestérone administré deux fois par jour), les cycles ont été annulés.

- Concentration en progestérone sérique

Comme cela était attendu, la moyenne du taux sérique de progestérone dosé le jour qui précédait le transfert des blastocystes après dévitrification, était, de façon significative, bas dans le « rescue group » comparé au groupe contrôle (7,84 ng/ml / 15,32 ng/ml).

Dans le « rescue group », les taux de progestérone dosés après 2 injections sous-cutanées de progestérone, étaient significativement augmentés en moyenne de 14,61 ng/ml de progestérone sérique.

Embryologie et résultat de grossesse

Le nombre de blastocytes transférés, l’aspect morphologique des blastocystes, de même que les jours de la vitrification (J5 ou J6) étaient identiques dans le groupe traité par progestérone sous-cutanée (« rescue group ») et le groupe contrôle.

En termes de grossesse évolutive, les résultats sont identiques dans les deux groupes (50 % / 48,3 % dans le groupe contrôle).

Le taux de grossesse multiple retrouvé est de 4,5 % dans le groupe traité / 5,9 % dans le groupe contrôle.

EN CONCLUSION

Les auteurs concluent que dans les cycles de transfert de blastocystes vitrifiés traités par œstrogène et progestatifs de façon standard (gel de progestérone vaginal administré deux fois par jour), lorsque les taux de progestérone sérique mesurés la veille du transfert embryonnaire prévu sont inférieurs à 8,75 ng/ml, l’administration supplémentaire de progestérone sous-cutanée (25 mg sous-cutanés par jour) permet d’améliorer les résultats en termes de grossesse évolutive, résultats comparés au groupe contrôle, chez qui les dosages de progestérone la veille du transfert de blastocystes sont supérieurs à 8,75 ng/ml.

La supplémentation par voie sous-cutanée permet, pour certaines patientes, définies comme le « rescue group », de sauvegarder de cycles de traitement et de placer les patientes dans un meilleur pronostic de grossesse.

Hakan YARALI, Mehtap POLAT, Sezcan MUMUSOGLU, Irem YARAK OZBEK, Murat ERDEN, Gurkan BOZDAG, Peter HUMAIDAN - Subcutaneous luteal phase progesterone rescue rectifies ongoing pregnancy rates in hormone replacement therapy vitrified-warmed blastocyst transfer cycles - RMBO volume 00 Issue 0 2021

L’étude menée par Manuel ALVAREZ et coll. (Dexeus University Hospital, BARCELONE – Espagne) analyse de façon prospective le rôle de la supplémentation en progestérone dans la phase lutéale dans le cadre des transferts d’embryons congelés.

État des connaissances

Le développement de stratégies de transfert après décongélation d’embryons (euploid frozen embryo transfer, FET) par rapport au transfert d’embryons frais après fécondation in vitro, a largement bénéficié depuis plusieurs années des progrès biologiques des cultures prolongées en blastocystes, du PGT (préimplantation genetic testing) et a pu réduire de façon significative les risques des hyperstimulations ovariennes.

De nombreuses questions persistent néanmoins concernant la préparation endométriale dans les FET, notamment en relation avec les taux sériques de progestérone mesurés préalablement aux transferts embryonnaires.

De nombreuses études ont précédemment décrit une diminution des taux de grossesse chez les patientes présentant des taux bas de progestérone, mesurés avant le transfert embryonnaire, considérant que les taux de 10 ng/ml étaient le seuil de référence acceptable pour le transfert embryonnaire.

L’étude prospective

Il s’agit d’une étude prospective menée entre novembre 2018 et janvier 2020 (Département d’Obstétrique, Gynécologie et Médecine de la reproduction DEXEUS – Barcelone) incluant 453 patientes et 574 cycles de traitements de FET après recherche de aneuploïdies (PGT-A).

Le traitement hormonal substitutif est pratiqué pendant la première phase du cycle.

Sur les 574 cycles, les auteurs distinguent 348 cycles de FET présentant un dosage satisfaisant de progestérone le jour précédant le transfert embryonnaire après dévitrification, et 226 cycles ayant un taux bas de progestérone et traités de façon conséquente pour améliorer ce taux le jour du transfert embryonnaire après dévitrification.

Le traitement sur ce 2ème groupe a consisté en des injections quotidiennes de progestérone sous-cutanée, de façon à restaurer un taux de progestérone supérieur à 10,6 ng/ml, ce qui est survenu dans le 2ème groupe (FET Group 2) dans 98,2% des cas.

Résultats de l’étude

Entre le groupe 1 et le groupe 2, tous les paramètres médicaux et biologiques étaient comparables. Les résultats en termes de grossesse étaient très satisfaisants, puisque les taux de grossesse dans le groupe 1, n’ayant pas eu de traitement supplémentaire de progestérone sous-cutanée, étaient de 56,4% / 59,1% dans le groupe FET 2 ayant eu un traitement complémentaire de progestérone sous-cutanée.

Il est en de même pour les taux de grossesse à terme, 49,1% dans le groupe
FET 1 / 52,3% dans le groupe FET 2 ayant eu un traitement complémentaire de progestérone sous-cutanée.

Les auteurs ne retrouvent pas de différence significative en termes de risque de fausse couche.

CONCLUSION

Pour les auteurs, le « rattrapage » par des injections sous-cutanées de progestérone, lorsque les dosages de progestérone réalisés précédemment au jour prévu du transfert embryonnaire après dévitrification, permet de restaurer un pronostic de grossesse clinique et évolutive à terme très satisfaisant, en comparaison au groupe de patientes dont le taux de progestérone reste adéquat.

Il est donc important de monitorer la valeur de la progestérone sérique préalablement au transfert embryonnaire après décongélation, afin d’augmenter les taux de grossesse dans ces protocoles de FIV.

Manuel ALVAREZ, Sofia GAGGIOTTI-MARRE, Francisca MARTINEZ, Lluc COLL, Sandra GARCIA, Inaki GONZALEZ-FORURIA, Ignacio RODRIGUEZ, Monica PARRIEGO, Nikolaos P. POLYZOZ, Buenaventura COROLEU – Individualisez luteal phase support in articifically prepared frozen embryo transfer cycles based on serum progesterone levels : a prospective cohort study – Human Reproduction, Vol.00, N°.0, pp.1-9, 2021

 

 
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