Fin des « puces » d’analyse de réceptivité endométriale ?

(End of endometrial receptivity array ?)

https://doi.org/10.1016/j.fertnstert.2022.07.031
Marika Raff, Emily Jacobs, Brad Van Voorhis,
Department of Obstetrics an Gynécology, University of Iowa
Carver Cooelge of Medecine, Iowa City, Iowa.

Résumé de commentaires

Depuis les débuts de l’Assistance Médicale à la Procréation (AMP), les cliniciens et les biologistes de l’AMP n’ont pas cessé de chercher des solutions afin d’améliorer les résultats en termes de taux de grossesses et d’enfants nés en bonne santé suite aux différents actes de Fécondation In Vitro (FIV, ICSI, transferts d’embryons, congélation et décongélation embryonnaire, etc…).

Ces recherches d’améliorations cliniques et biologiques ont concerné l’exploration de la qualité des gamètes, l’évaluation morphologique de la qualité des embryons transférés à travers la cinétique de développement (Time Lapse), les techniques de fécondations elles même comme la micro-injection intra-cytoplasmique associée au fort grossissement de l’examen du spermatozoïde (IMSI), la vitrification ovocytaire et embryonnaire, etc…

Il faut noter que les techniques d’AMP existantes sont décrites dans une liste validée par l’Agence de la Biomédecine (liste des procédés biologiques autorisés en AMP : www.agence-biomedecine.fr ) et autorisée par le Ministère de la Santé.

En l’absence actuelle de possibilité de recherche sur l’embryon avec transfert de celui-ci chez une patiente, la mise en place d’une nouvelle technique biologique d’AMP est difficile à valider par les professionnels et donc à autoriser par le Ministère. La demande des spécialistes pour la réalisation du DPIa (Diagnostic Pré Implantatoire pour aneuploïdie de l’embryon) dans certaines indications, et le refus récent des pouvoirs publics d’autoriser cette technique en est un exemple.

En l’absence de possibilité d’évaluer des techniques (celles déjà utilisées avant la parution de la liste du Ministère) en amont de leurs mises en place en routine, pour plusieurs d’entre elles, les évaluations se sont faites à postériori.

Une des interrogations des praticiens de l’AMP concerne les échecs d’implantation dans des situations  (infertilités « inexpliquées ») où tous les paramètres biologiques (morphologiques) embryonnaires semblent corrects et où les caractéristiques de l’endomètre selon les méthodes classiques sont également correctes. Ces échecs sont probablement liés à la fois à une qualité morphologique subjective de l’embryon, à une qualité endométriale évaluée uniquement sur des paramètres de dosage de la progestérone et d’image échographique de l’endomètre, mais aussi et surtout à des défauts du dialogue embryon – endomètre ne permettant pas une bonne réceptivité endométriale dans un délai limité (fenêtre implantatoire).

Une nouvelle avancée des techniques d’AMP a donc concerné l’étude de la réceptivité endométriale par des techniques de biologie moléculaire permettant de connaître le profil des transcrits génétiques au niveau de l’endomètre (analyse des ARNm par « puce » : signature transcriptomique) en lien avec la bonne fenêtre d’implantation (Endométrial receptivity array : ERA).

Cette technique a été mise en place depuis plusieurs années (2011) par différentes équipes dans le Monde et a été l’objet de beaucoup d’espoir et de beaucoup de discussions et de controverses. Plus de 150 000 tests ERA ont été réalisés à ce jour. Ces tests ERA devaient permettre de personnaliser la fenêtre d’implantation potentiellement différente pour chaque patiente.

Les auteurs de la réflexion décrite dans ce document    (https://doi.org/10.1016/j.fertnstert.2022.07.031) ont souhaité faire le point sur la pertinence de ces tests en analysant à la fois leurs impacts positifs sur les taux de grossesses et de naissances mais aussi de vérifier qu’ils n’étaient pas nuisible pour les couples (« primum non nocere »). Il est intéressant de noter que ce texte a été écrit par des professionnels de l’AMP qui ont été à l’initiative de la mise en place de ces techniques dans leurs centres d’AMP.

Ainsi un large essai contrôlé randomisé n’a montré aucun bénéfice d’un transfert de blastocystes congelés euploïdes utilisant le guidage de la fenêtre d’implantation par la technique ERA par rapport aux transferts de blastocystes congelés euploïdes utilisant la méthode classique (Doyle N et col, 2021).

Une autre étude rétrospective (Cozzolino M et col, 2022) avec des couples ayant eu des échecs d’implantations précédentes, et incluant des couples avec des donneuses d’ovocytes a même montré une détérioration des résultats de taux de grossesses après utilisation du transfert d’embryons utilisant ERA ; sans qu’il y ait d’explication claire.

Les auteurs pensent qu’il est possible que la signature transcriptomique de l’endomètre présente des variabilités importantes entrainant des recommandations inexactes voir nuisibles pour l’exposition à la progestérone.

Les auteurs de cet article reviennent ensuite sur la validation clinico-biologique des techniques d’AMP et ils insistent sur le fait que cette technique a été mise en place dans les centres d’AMP sans qu’il y ait eu suffisamment de validation de son efficacité et qu’elle n’a pas été approuvé par la FDA (Food and Drug Administration).

Dans un contexte plus général, les auteurs de cet article insistent sur le fait que les cliniciens utilisant de nouveaux tests doivent informer les patientes s’ils ne sont pas validés par la FDA. Ce sujet est sensible car parfois de nouveaux tests sont présentés uniquement par les sociétés qui les mettent en place, et même sur les réseaux sociaux. Ce système entraine une désinformation des patients voir même le fait que les patients peuvent penser que si un centre d’AMP ne leurs propose pas ce type de tests, ils n’ont pas eu accès aux soins les plus avancés.

Les auteurs insistent donc sur l’importance que les cliniciens gardent un esprit critique sur les nouveaux tests qui peuvent être proposés, et qu’il est de leurs responsabilités de savoir dire non à un couple qui le demande.

En ce qui concerne les tests ERA, ils concluent qu’ils ne devraient plus être proposés aux patients même en cas d’échecs inexpliqués d’AMP.

Références 

Simon C, Gomez C, Cabanillas S, Vladmirov I, Castillon G, Giles J, et al. A 5- year multicentre randomized controlled trial comparing personalized, frozen and fresh blastocyst transfer in IVF. Reprod Biomed Online 2020;41:402–15.

ERA® Endometrial Receptivity Analysis. Available at: https: //www.igenomix. com/our-services/era/. Accessed July 27, 2022.

Doyle N, Jahandideh S, Hill MJ, Widra EA, Levy M, Devine K. A randomized controlled trial comparing live birth from single euploid frozen blastocyst transfer using standardized timing versus timing by endometrial receptivity analysis. Fertil Steril 2021:116.

Cozzolino M, Diaz-Gimeno P, Pellicer A, Garrido N. Use of the endometrial receptivity array test to guide personalized embryo transfer after a failed transfer attempt was associated with a lower cumulative and per-transfer live birth rate during donor and autologous cycles. Fertil Steril 2022;118: 724–36.

Klein A. A popular test claims to boost I.V.F. success. The science is unclear. Available at: https: //www.nytimes.com/2021/12/18/health/ivf-era-testigenomix. html. Accessed July 23, 2022.

 

 

 

 

 

 
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