Aspect immunitaire de la réceptivité endométriale

Résumé de la communication du Dr Marie PETITBARAT

Un pourcentage important de tentative d’assistance médicale à la procréation n’aboutit pas à une grossesse et ceci malgré plusieurs transferts d’embryons qui semblent, au moins sur le plan morphologique, de bonne qualité. Ainsi, la réceptivité endométriale est un élément important à prendre en compte dans l’évaluation des chances de grossesses d’une tentative d’AMP. L’exploration de celle doit être réalisée au moment de la fenêtre d’implantation, située entre 7 et 11 jours après le pic de LH. Pendant cette période des conditions particulières sont favorable à l’implantation de l’embryon qui, contenant une partie du matériel génétique paternel, devrait être reconnu comme étranger par la mère. Ainsi le contexte immunitaire est il fondamental afin de permettre une implantation.

L’équipe du Dr PETITBARAT et du Dr Nathalie LEDEE travaille sur l’analyse de cet aspect immunitaire de l’implantation embryonnaire et sur son exploration dans les échecs répétées d’implantation.

Pendant la fenêtre d’implantation, il y a une modification des acteurs immunitaires présents, avec l’apparition de cellules Natural Killer (uNK) spécifiquement utérine, différentes par leur phénotype et leurs fonctions des cellules NK sanguines. Ces cellules uNK ont une fonction pro-angiogénique permettant la formation du placenta et une faible toxicité spontanée protégeant le conceptus. L’équilibre entre les différentes cytokines soit pro-inflammatoires (Th1) soit anti-inflammatoires (Th2) permet l’implantation embryonnaire et le succès de la grossesse.

Différentes InterLeukines (IL) interviennent également pendant cette période. IL15 pour le recrutement et la maturation des cellules uNK, IL18 pour la déstabilisation des artères spiralées et l’angiogenèse locale. Le TNF (Tumor Necrosis Factor) WEAK  (TWEAK) intervient chez las souris dans la protection de l’embryon, et le Fn-14 (Fibroblast growth factor Inductible 14) intervient comme immunomodulateur d’IL15. Ainsi IL-18/TWEAK et IL-15/Fn-14 sont des biomarqueurs de l’environnement cytokinique de l’endomètre, le premier donnant une information sur l’environnement angiogénique local et le second une information sur l’état de maturation des cellules uNK. Des normes d’expression de ces marqueurs ont été définies au sein d’une population fertile.

En pratique, cette exploration endométriale passe par une biopsie d’endomètre en phase implantatoire, puis par une datation histologique des cellules prélevées, un décompte des cellules uNK, une mesure de l’expression des cytokines (extraction des ARN et mesure par PCR temps réel).

À partir de ces éléments, une interprétation est alors possible et permet de distinguer deux types de situations pathologiques. Soit une sous-activation endométriale se traduisant par une insuffisance de sécrétion cytokinique, une insuffisance de migration des cellules uNK et une immaturité de celles ci. Soit une sur-activation endométriale se traduisant par un excès de cytokines avec une migration trop importante des cellules uNK entrainant un défaut d’immuno-régulation locale.

La prise en compte de ces différences permet de proposer à la patiente une personnalisation de la prise en charge de son transfert embryonnaire.

L’équipe du Dr PETITBARAT préconise les prises en charge suivantes en fonction des situations rencontrées.

En cas de sous-activation endométriale, il est souhaitable d’augmenter la réactivité locale :

  • biopsie endométriale à J21 au cours du cycle précédent la FIV,
  • limiter l’hyper-oestrogénie soit par une stimulation minimale pendant la tentative, soit réaliser le transfert au cours d’un cycle de TEC (Transfert d’Embryon Congelé), supplémenter la phase lutéale avec de l’hCG, exposition au liquide séminal (permet une mobilisation des cellules uNK).

En cas de sur-activation endométriale, il est souhaitable de contrôler l’activation des cellules immunitaires :

  • éviter tout geste au niveau de l’endomètre pendant le cycle précédent,
  • rechercher un foyer infectieux et le traiter,
  • réaliser une stimulation ovarienne standard,
  • augmenter les doses d’Utrogestan (rôle immunosuppresseur),
  • pas d’exposition au liquide séminal,
  • ajout d’anti-inflammatoires (corticoïdes), d’héparines de bas poids moléculaire.

L’équipe du Dr PETITBARAT, a montré l’efficacité de ce type de prise en charge, sur une cohorte de 311 patientes, avec échecs répétées d’implantation d’au moins 6 embryons de bonne qualité morphologique. L’équipe rapporte des anomalies immunologiques locales dans 85 % de ces cas, pouvant expliquer ces échecs d’implantation. En fonction de la personnalisation de la prise en charge, comme décrit ci dessus, 40 % de naissances ont été obtenues à partir du premier transfert d’embryons.

La perspective de l’équipe est la mise en place dans un PHRC, d’une étude prospective, randomisée et contrôlée permettant de confirmer l’intérêt de cette prise en charge.

Références :

New pre-conception immune biomarkers for clinical practice: interleukin-18, interleukin-15 and TWEAK on the endometrial side, G-CSF on the follicular side.
Lédée N, Petitbarat M, Rahmati M, Dubanchet S, Chaouat G, Sandra O, Perrier-d'Hauterive S, Munaut C, Foidart JM.
J Reprod Immunol. 2011 Mar;88(2):118-23

Immune regulation at the interface during early steps of murine implantation: involvement of two new cytokines of the IL-12 family (IL-23 and IL-27) and of TWEAK.
Mas AE, Petitbarat M, Dubanchet S, Fay S, Ledée N, Chaouat G.
Am J Reprod Immunol. 2008 Apr;59(4)

Granulocyte-Colony Stimulating Factor related pathways tested on an endometrial ex-vivo model.
Rahmati M, Petitbarat M, Dubanchet S, Bensussan A, Chaouat G, Ledee N.
PLoS One. 2014 Oct 2;9(9):e102286

 
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