Sévérité de la dysménorrhée et risque de cancer de l’ovaire par type histologique : méta-analyse sur données individuelles

Les auteurs ont effectué une méta-analyse des données individuelles publiées dont l'objectif est d'étudier l'association entre dysménorrhée sévère et risque de cancer de l'ovaire. Ainsi, les données de 9 études cas-témoins ont été incluses dans cette méta-analyse : il s’agissait de  7 études américaines, 1 australienne et 1 danoise.
Au total, 10 592 cas, dont 8 275 cancers invasifs, 2 062 "borderline" et 255 autres ont été comparées à 13 320 témoins. Les femmes atteintes de tumeurs non épithéliales ou d'origine indéterminée ont été exclues ainsi que celles dont les informations sur les dysménorrhées étaient manquantes. Les études analysées ont des prévalences de dysménorrhées variables allant de 2.7% à 55.6%. 

Plusieurs catégories histologiques ont été analysées : tumeurs épithéliales invasives séreuses de haut grade, séreuses de bas grade, mucineuses, endometrioïdes, à cellules claires et autres types. Les tumeurs borderline ont été classées en séreuses, mucineuses et autres types.

Dans 4 études, les questions portaient directement sur la présence d’une dysménorrhée sévère. Dans les 5 autres études, la question était indirectement posée, à partir de l’utilisation d’un recours à un moyen médical (médicaments dont AINS, contraception hormonale orale ou DIU) pour pallier à des dysménorrhées, définissant ainsi la dysménorrhée sévère.

Les caractéristiques des femmes étudiées étaient l’âge, l’ethnie, la durée d'utilisation de contraception, la parité, les antécédents familiaux au 1er degré de cancer du sein ou de l'ovaire, le moindre recours à une  ligature des trompes, l'endométriose sur un mode déclaratif, l'IMC 1 an avant le diagnostic pour les cas ou dans l'année précédente pour les femmes témoins, l'IMC à 18 ans, l’âge de la ménarche, l'utilisation régulière d'aspirine ou d'AINS, le statut ménopausique et le tabac.

Les résultats ont été ajustés sur les facteurs de risque de cancer  incluant la parité, l'utilisation de contraception hormonale, les antécédents familiaux de cancer de l’ovaire, la ligature tubaire et l'endométriose.

Cette étude confirme les facteurs de risque classiques de cancer de l’ovaire : nulli-parité, moindre recours à une ligature tubaire,  courte durée d'utilisation de la contraception hormonale, les antécédents familiaux de cancer de l’ovaire et du sein. 
La dysménorrhée sévère, recueillie par la question directe, est associée de façon significative au risque de cancer de l’ovaire tout type histologique confondu : OR : 1,07  (1,01-1,13). Cependant, aucune association n’était retrouvée dans les études analysant de façon indirecte la dysménorrhée - OR : 0,98 (0,89- 1,07)). 
Les auteurs ont donc poursuivi les analyses en se restreignant aux études recherchant la dysménorrhée sévère de manière directe.
Les patientes ayant une dysménorrhée sévère mais rare n'avaient d’augmentation de  risque de cancer de l ‘ovaire contrairement aux patientes ayant dysménorrhée sévère et fréquente -OR : 1,17 (1,00-1,38). Par ailleurs, il semble exister une association avec la durée de la dysménorrhée (p tendance 0,03). 

Les analyses par type histologique montrent une association significative entre dysménorrhée sévère et cancer à cellules claires : OR : 1.48 (1.10-1.99) et tumeur borderline séreuse - OR : 1.31 (1.05-1.83)

Au total, les auteurs rapportent une augmentation de risque de cancer de l'ovaire chez les patientes  reportant directement des dysménorrhées sévères, fréquentes et évoluant de  longues années. Cette association  est significative uniquement pour les cancers à cellules claires et les tumeurs borderline de type séreux.

Cette étude a l’avantage de pooler un nombre de cas important permettant de mettre en évidence ce type d’association et d’effectuer des analyses par type histologique. Cependant, les études restent très hétérogènes. Il s’agit de plus d’auto-déclaration sans apport de méthodologie de type échelle de douleur par exemple, ce qui comporte inévitablement un biais potentiel. Aucune précision n’était apportée sur le type de dysménorrhée primaire ou secondaire. 

Les auteurs évoquent comme hypothèse physiopathologique le processus inflammatoire avec augmentation de la synthèse de prostaglandines à l’origine de ce symptôme. Le lien entre endométriose, dont  un des symptômes majeurs est la dysménorrhée, est difficilement analysable dans cette méta-analyse. En effet,  les données de ces études analysaient l’endométriose auto-déclarée uniquement. Il serait probablement intéressant d’analyser plus précisément les liens entre les caractéristiques de la dysménorrhée, la présence d’une endométriose avérée et le risque de cancer de l’ovaire. 

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Babic A, Harris HR, Vitonis AF et al.
Menstrual pain and risk of epithelial ovarian cancer: results from the ovarian cancer association consortium. International journal of cancer 2017 on line.

 
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