Antécédent de diabète gestationnel et risque de maladie cardio-vasculaire à long terme : cohorte prospective de femmes américaines.

Le diabète gestationnel complique environ 6% des grossesses aux États-Unis avec une prévalence en augmentation au cours de ces dernières années. L’« American Heart Association » identifie le diabète gestationnel comme un facteur de risque de maladie cardiovasculaire en se basant sur des études rétrospectives. Cependant aucune étude prospective n’a encore évalué cette association en tenant compte des facteurs de risque communs tels que l’IMC ou le mode de vie.

La Nurses’Health Study II (NHS II) est une cohorte observationnelle prospective longitudinale ayant débuté en 1989 incluant 116 430 infirmières américaines âgées de 24 à 44 ans. Des questionnaires ont été distribué initialement puis tous les 2 ans jusqu’en 2001. Etaient inclues les femmes ayant déclaré au moins une grossesse lors du questionnaire de base en 1989.

L’antécédent de diabète gestationnel était auto rapporté sur les questionnaires. Le principal résultat d’intérêt était l’apparition d’IDM et d’AVC ischémiques mortels et non mortels survenus entre la date de référence et le questionnaire de 2013.

Les modèles multivariés ont été ajustés selon l’IMC avant la grossesse, la parité, antécédent de HTA gravidique ou DG, antécédent familial d’IDM ou d’AVC, le statut ménopausique et l’ethnie. Les auteurs ont également ajusté les résultats au mode de vie et de comportement incluant le changement de poids par rapport à avant la grossesse, la consommation d’alcool, la dose d’aspirine quotidienne, le tabac, l’activité physique.

89 479 femmes ont été inclues dans l’analyse, de moyenne d’âge initial de 34,9 ans. 5292 femmes (5,9%) ont rapporté un antécédent de DG pour au moins une grossesse au début de l’étude (58%) ou lors du suivi (42%).

Les femmes avec un antécédent de DG avaient généralement au moins 30 ans lors de leur première grossesse et étaient en surpoids ou obèses avant la grossesse. Un antécédent d’hypertension gravidique était plus fréquent chez les femmes avec DG, tout comme les antécédents familiaux de diabète de type 2 et de maladie cardiovasculaire. Les femmes à l’antécédent de DG ont rapporté un peu moins d’activité physique et plus de consommation d’alcool mais pas de différence selon le statut tabagique, l’utilisation quotidienne d’aspirine, antécédent de prise de contraception ou score de qualité alimentaire initialement. Des événements cardio vasculaires, confirmés par dossiers médicaux, sont survenus chez 1161 femmes ayant déjà eu au moins un enfant durant une période médiane de suivi de 25,7 ans (soit 1,1 événement pour 1000 personnes-années), dont 612 IDM et 553 AVC.

En comparaison aux femmes sans DG, celles avec antécédent de DG avaient 60% plus de risque de maladie cardio vasculaire durant le suivi (RR 1,6 ; IC 95% : 1,26-2,04).

Après ajustement des facteurs de risque tels que l’IMC avant la grossesse, la parité, antécédent de HTA gravidique, antécédent familial d’IDM ou d’AVC, le statut de la ménopause, l’âge et de l’ethnie, les patientes avec antécédent de DG avaient également plus de risque de développer une maladie cardiovasculaire que sans antécédent de DG (RR 1,42 ; IC 95% 1,12- 1,81).

L’ajustement additionnel des potentiels facteurs de risque de mode de vie comportementaux tels que la prise de poids depuis le début de la grossesse, le statut tabagique actuel, le score de qualité alimentaire, la consommation d'alcool, l'utilisation d'aspirine et l'activité physique, atténue modérément l'association (HR1,29, IC à 95%, 1,01-1,65).

En considérant les risques d’IDM et d’AVC séparément, l’antécédent de DG était positivement associé au risque d’IDM dans le modèle entièrement ajusté (modèle multivarié et facteurs de mode de vie) (HR, 1,45; IC 95%, 1,05-1,99), mais n'était pas associé au risque d'AVC (HR, 1,10; IC 95%: 0,75 -1,61).

Parmi les femmes ayant des antécédents de DG, 1008 (19%) ont par la suite développé un diabète de type 2 contre 4078 (4,8%) parmi les femmes sans antécédent de DG antérieurs. Le modèle entièrement ajusté indiquait un risque de MCV plus de trois fois plus élevé chez les femmes atteintes de DG et de diabète de type 2 ou uniquement de diabète de type 2 que chez les femmes sans diabète (RR, 3,71; IC à 95%, 1,79-7,67 et RR, 3,74 IC à 95%, 1,85 à 7,53 respectivement).

Les femmes ayant des antécédents de DG sans progression vers un diabète de type 2 n'ont pas présenté de risque plus élevé de MCV après ajustement pour la prise de poids et autres facteurs liés au style de vie (HR, 1,20; IC 95%: 0,91-1,58). Des tendances similaires ont été observées pour les résultats de l'IM et de l'AVC individuellement.

La stratification par des facteurs de risque de comportement sain a suggéré que le maintien d'un mode de vie plus sain à la quarantaine pourrait atténuer l'association entre un antécédent de risque de DG et de MCV.

Le principal point fort de cette étude est le suivi longitudinal prospectif d'une grande cohorte de femmes pour des événements cardiovasculaires confirmés. Les limitations incluent la population d'étude racialement / ethniquement homogène, sans extrapolation possible aux populations minoritaires potentiellement à plus haut risque. De même, la généralisation aux populations plus âgées nécessite d’autres investigations, étant donné l'âge relativement jeune de la cohorte expliquant les faibles taux de CVD incidents.

En conclusion, les auteurs ont constaté que les femmes ayant des antécédents de DG avaient un risque modéré de MCV, en particulier pour les IDM, comparativement aux femmes ayant eu un enfant sans antécédent de DG. Cette association est atténuée chez les femmes sans évolution vers un diabète de type 2 et celles au mode de vie « sain ».

Ces résultats confirment le rôle majeur du mode de vie, en particulier dans cette population, pour éviter la survenue d’un diabète de type 2 et d’accidents cardio-vasculaires.

Références

D K Tobias, J J Stuart, S Li et al. Association of history of gestational diabetes with long-term cardiovascular disease risk in large prospective cohort of US women. Jama Inter Med. Doi: 10.1001/jamainternmed.2017.2790.

 
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