Futur de la cancérologie

La cancérologie gynécologique est particulièrement dépendante de la qualité de l’imagerie initiale et des progrès seront sûrement accomplis dans les prochaines années. Concernant la pathologie ovarienne, elle a non seulement un rôle d’orientation diagnostique (et les dernières recommandations de l’INCA recommandent aux radiologues d’évoquer une histologie) et de stadification.  Désormais dès l’imagerie, pour les lésions les plus suspectes, les patientes pourront être orientées vers des centres experts pour faciliter leur parcours. En plus de l’expertise chirurgicale, anesthésique et oncologique, les centres experts doivent désormais réaliser dès cette étape initiale des analyses génétiques qui désormais changent la prise en charge dès le primo-traitement et non plus lors de la découverte d’une récidive. Ainsi actuellement dès la cœlioscopie diagnostique, sur les biopsies péritonéales une recherche de mutation BRCA somatique est réalisée en cas de tumeur séreuse de haut grade (histologie la plus fréquente) pour que les patientes puissent bénéficier dès le primo-traitement du traitement d’entretien par inhibiteur de PARP. Ces traitements ciblés et autres traitement novateurs comme l’immunothérapie interviendront de plus en plus tôt dans la prise en charge et il faudra donc pouvoir disposer des analyses tissulaires les plus proches des avancées scientifiques. Et par-delà l’imagerie et l’analyse tissulaire, de nouveaux outils biologiques (marqueurs, microARN, DNA circulants) pourraient nous permettre à l’avenir de mieux stadifier et adapter les traitements dès la phase initiale.

Ces dernières années la voie mini-invasive en cancérologie gynécologique s’est imposée dans les stades précoces, et parallèlement s’est développé la technique du ganglion sentinelle. Pour être certain de l’innocuité de ces méthodes, de grandes études randomisées étaient indispensables avec souvent des résultats allant dans le sens attendu (essai LACE sur l’innocuité de la laparoscopie pour les cancers de l’endomètre (1)) mais parfois à l’opposé de ce que les investigateurs eux-mêmes envisageaient (essai  LACC (2) avec impact négatif observé de la laparoscopie sur la survie (2)). A l’avenir, il est donc essentiel de toujours s’interroger sur les bonnes indications de la voie mini-invasive pour chaque patiente. Les avantages de cette voie d’abord sont évidents en termes de qualité de vie, et encore plus chez certaines patientes (patientes âgées, patientes obèses). On a par ailleurs pu observer que la chirurgie par voie robot assistée par sa simplification technique pour les patientes obèses pouvait changer le regard des chirurgiens et par là même le vécu des patientes présentant une obésité morbide (3). L’accès à ces techniques pour les patientes chez qui l’impact est le plus important devra se développer à l’avenir probablement dans des centres spécialisés dans l’obésité car il est évident que l’expertise anesthésique pour ces patientes est aussi importante que l’outil technologique ou l’expertise chirurgicale.

Mini-invasif et ambulatoire vont de pair et les interventions en ambulatoire ne se limitent plus aux gestes les plus simples. L’essai AMBU-ENDO multicentrique coordonné par le Dr Geoffroy (4) compare ambulatoire et hospitalisation classique chez les patientes atteintes de cancer de l’endomètre. Cette étude a permis de lever certains tabous, ainsi une patiente âgée de 80 ans et présentant une obésité a pu être opérée en ambulatoire sans difficulté. Ainsi, nos indications ont évolué et ce qui, au début de notre pratique, était dédié aux patientes les plus jeunes et les plus « simples » techniquement pourra être envisagé chez des patientes qui, plus exposées aux risques péri-opératoires,  seront peut-être celles qui bénéficieront le plus de l’ambulatoire. Cela nécessite encore l’évolution de nos structures (avec un accès facilité en cas de problème) et de la collaboration ville-hôpital. Quant aux patientes, elles sont le plus souvent déjà prêtes pour ces nouvelles pratiques avec une spectaculaire évolution des mentalités concernant l’ambulatoire.

La place et les modalités de l’exploration ganglionnaire dans les cancers gynécologiques se sont modifiées ces dernières années avec par exemple une importante désescalade pour les cancers de l’endomètre de petite taille et une extension de la chirurgie pour les tumeurs biologiquement les plus agressives. La place du ganglion sentinelle est de mieux en mieux définie mais les résultats de grandes études sont encore attendus pour certaines indications (5, 6).

Face à ces innovations, les patientes ont toujours besoin d’être plus informées par leur praticien mais aussi, pour certaines, par d’autres voies comme les associations de patientes. Elles ont aussi besoin de savoir que, dès la phase initiale, il y a eu une réflexion multidisciplinaire entre chirurgiens, radiologues, pathologistes, oncologues pour orienter et décider du meilleur traitement en usant de tout ce que le progrès scientifique nous apporte chaque jour.

  1. Janda M, Gebski V, Davies LC et al Effect of Total Laparoscopic Hysterectomy vs Total Abdominal Hysterectomy on Disease-Free Survival Among Women With Stage I Endometrial Cancer: A Randomized Clinical Trial. JAMA.  317(12):1224-1233.
  2. Ramirez PT, Frumovitz M, Pareja R et al Minimally Invasive versus Abdominal  Radical Hysterectomy for Cervical Cancer. N Engl J Med. 2018 Nov 15;379(20):1895-1904.
  3. Azaïs H, Moawad G, Uzan C, Canlorbe G, Belghiti J. Perceptions, Relationship,  and Management of Morbidly Obese Patients and the Role of Robotic Surgery. Obes Surg. 2019 Dec;29(12):4062-4063.
  4. Cost-utility of Ambulatory Surgery in the Management of Endometrial Cancer(AMBU-ENDO) NCT03580421
  5. Evaluation of Sentinel Node Policy in Early Stage Endometrial Carcinomas at Intermediate and High Risk of Recurrence. (SENTIRAD) NCT02598219
  6. International Validation Study of Sentinel Node Biopsy in Early Cervical Cancer (SENTICOLIII) NCT03386734

 

 
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