Prothèses PIP : Mise à jour des rumeurs !

Un peu d’histoire :

Lancé dans le business des prothèses mammaires dans les années 80, Mr MAS, PDG de PIP (poly implants prothèses), porte aujourd'hui sur ses épaules un scandale sanitaire dont les ramifications sont mondiales.

Au milieu des années 2000, à l'époque où sa société fondée en 1991 à la Seyne-sur-Mer, dans le Var, occupait le troisième rang mondial du secteur, PIP produisait environ 100.000 prothèses par an. Et 84% de son activité étaient destinés à l'exportation, selon le jugement de liquidation judiciaire du tribunal de commerce de Toulon. L'Amérique du Sud totalisait plus de 58% des ventes à l'exportation en 2007 et 50% en 2009. L'Europe de l'Ouest était l'autre grande région d'exportation (27 à 28% de la production y étaient écoulés). Parmi les autres clients de PIP, figuraient l'Europe de l'Est (passée de 5,4% des ventes à l'exportation en 2007 à 10% en 2009), la Chine, l'Iran, la Turquie ou encore les Emirats (8,1% en 2009). Au total, plus de 65 pays. Plus de 400 000 implants ont été vendus dans le monde, dont 30 000 en France, 50 000 en Angleterre, 25 000 en Espagne, Italie, Brésil……

En 2008, PIP emploie 116 salariés et affiche un chiffre d'affaires avoisinant les 10 millions d'euros. Entre temps, en 2003, elle s'attire les faveurs du fonds d'investissement américain GEM, qui rentre au capital. Jean-Claude Mas restait alors président du conseil de surveillance et actionnaire majoritaire.
 

La chute

La descente aux enfers commence en 2007-2008. A cette date, une centaine de Britanniques porteuses de ces implants portent plainte contre PIP pour «prothèses défectueuses (fuites de gel de silicone)». PIP est alors condamné par défaut à 1,4 million d'euros d'indemnités pour «non-représentation» devant le tribunal, selon Me Yves Haddad, avocat des deux principaux dirigeants de la société dont Jean-Claude Mas. Début 2010, l'Agence française du médicament (Afssaps) tire à son tour la sonnette d'alarme. Alertée par des ruptures de l'enveloppe de ces implants, «de l'ordre du double en termes de fréquence», elle décide de retirer le produit du marché. Une inspection dans les locaux de l'entreprise révèle qu'«un gel différent de celui qui avait été déclaré dans les dossiers de conception et de fabrication du produit» est utilisé. Les porteuses doivent «consulter leur chirurgien» et un numéro vert est créé.

L'Afssapsalerte le parquet de Marseille qui dans la foulée ouvre une enquête préliminaire pour «tromperie sur les qualités substantielles du produit, publicité mensongère, et mise en danger de la vie d'autrui». Placée en procédure de sauvegarde en 2009, l'entreprise, en cessation de paiement, est mise en liquidation judiciaire en mars 2010.

Procès prévu fin 2012, début 2013

Malgré la réunion d’expert du 23 Décembre 2011, en France, le gouvernement a appelé les 30.000 femmes portant ces prothèses défectueuses à se les faire retirer à titre préventif.

Les recommandations de la réunion d’expert du 23 Décembre 2011 dont je faisais parti :
 

1. Par rapport au risque de cancer :

¤ Pour les lymphomes anaplasiques à grandes cellules :

Le lymphome anaplasique à grandes cellules est une pathologie extrêmement rare.

Le groupe retient, sur la base des données disponibles, qu’il existerait un sur-risque chez les femmes porteuses d’un implant mammaire quels que soient la marque et le contenu de l’implant (sérum physiologique ou gel de silicone).

Il n’existe pas de donnée à ce jour pour conclure à un sur-risque des lymphomes anaplasiques à grandes cellules spécifique à la prothèse PIP en comparaison aux autres implants.

¤ Pour les cancers du sein (adénocarcinomes) :

Le cancer du sein est une pathologie fréquente.

Le groupe retient que les données disponibles aujourd’hui permettent de conclure à l’absence de sur-risque d’adénocarcinome mammaire chez les femmes porteuses d’implants en comparaison avec la population générale.

Il n’existe pas de donnée à ce jour pour conclure à un sur-risque d’adénocarcinome mammaire spécifique à la prothèse PIP en comparaison aux autres implants.
 

2. Avis concernant la décision d’explantation

Le groupe de travail retient que les éléments justifiant une explantation sont la présence de signes cliniques et/ou radiologiques évocateurs d’une altération de l’implant et/ou la demande de la patiente.

Il n’existe pas d’argument à ce jour justifiant une explantation en urgence.

Chez une femme asymptomatique (absence de signe clinique et/ou radiologique), les risques liés à la non explantation à visée préventive sont : risque de rupture, risque d’imagerie faussement rassurante (faux négatif), risque d’une réintervention plus compliquée (préjudice esthétique, augmentation du risque de complications post opératoires), et la toxicité potentielle, à ce jour mal connue, de ce gel non conforme des prothèses PIP.

Les risques liés à une explantation sont : risque lié à une réintervention (anesthésique et lié au geste), et risque lié à un résultat morphologique différent.

Le groupe rappelle qu’en l’absence de sur-risque démontré de cancer chez les femmes porteuses de prothèses PIP par rapport aux autres implants, l’avis concernant l’explantation est lié au risque de rupture de l’implant et à ceux de la non-conformité du gel.

Devant l’absence d’éléments nouveaux concernant le gel non conforme ou de données cliniques nouvelles sur des complications spécifiques, les experts considèrent ne pas disposer de preuves suffisantes pour proposer le retrait systématique de ces implants à titre préventif. Ils rappellent néanmoins le risque de rupture prématurée et les incertitudes concernant les complications liées au caractère irritant de ce gel.

Le groupe d’experts précise qu’il est nécessaire de mettre en place une étude épidémiologique prospective sur les implants rompus avec documentation des données cliniques, radiologiques et histopathologiques.
 

3. Surveillance des femmes porteuses d’une prothèse PIP

En l’absence de tout symptôme :

Concernant le risque de cancer du sein, il n’y a pas lieu de modifier chez une femme porteuse d’implants les modalités actuellement recommandées de dépistage et de surveillance de cette pathologie.

Du fait du risque accru de rupture des prothèses PIP, le groupe maintient le suivi tel que recommandé par l’Afssaps, à savoir « un examen clinique et une échographie tous les six mois, en ciblant pour chacun de ces examens les seins et les zones ganglionnaires axillaires ».

Le groupe retient qu’une IRM mammaire n’est pas indiquée en première intention.

En cas de signes cliniques et/ou radiologiques anormaux :

Une consultation spécialisée est préconisée pour une prise en charge.
 

4. Modalités à suivre en cas d’explantation

Avant toute explantation, quel que soit son motif, un bilan d’imagerie (incluant une mammographie et échographie mammaire et axillaire) récent doit être disponible.

Dans tous les cas d’explantation :

¤ En présence d’un épanchement périprothétique anormal (sur son aspect ou son abondance), il est nécessaire de réaliser une aspiration du liquide pour analyse cytologique.

¤ Il est nécessaire de réaliser une biopsie systématique de la capsule et du tissu périprothétique.

La capsulectomie la plus large doit être réalisée lorsqu’elle est raisonnablement possible, à l’appréciation du chirurgien. Le groupe préconise une analyse histologique systématique des pièces de capsulectomie.

En cas d’anomalie du creux axillaire, une analyse histologique ou cytologique est souhaitable. Le groupe précise qu’un curage axillaire n’est pas indiqué.

Les biopsies et les pièces opératoires seront fixées dans le formol pour permettre des investigations complémentaires.

Une congélation des prélèvements doit être réalisée en cas de lésion périprothétique suspecte. En cas de diagnostic ou de suspicion de lymphome après analyse anatomo-cytopathologique, un envoi au réseau LYMPHOPATH est nécessaire.

La pose immédiate d’un nouvel implant est envisageable si les conditions locales le permettent. Dans le cas contraire, elle peut alors être proposée à distance de l’explantation. Elle est discutée avec la patiente avant tout geste opératoire.
 

5. Surveillance après explantation

En cas d’explantation, il n’y a pas de suivi spécifique préconisé compte tenu de l’absence de sur-risque de cancer lié aux prothèses PIP démontré à ce jour.

Les recommandations habituelles de dépistage du cancer du sein ou de surveillance sont applicables en fonction du niveau de risque de la femme et indépendamment de l’antécédent d’implant.

Malgré cet avis, le ministre décide pour la France de proposer, sans urgence, l’explantation et ce contrairement a l’avis des autres pays européens qui n’ont pas donné les mêmes recommandations. En particulier : l’Angleterre, l’Espagne, l’Italie … et  dernièrement la Suisse.

Les bruits qui courent sont ils justifié :

¤ Risque accru de cancer du sein ou de récidive :

Il n’existe aucun éléments pouvant justifier cette affirmation pour l’instant, le nombre de cas de cancer du sein déclaré a l’AFFSAPS est d’une trentaine à ce jour, ce qui semble être similaire aux autres patientes.

¤ Risque de Lymphome a cellule T :

Ce risque légèrement supérieur à la normale pour les femmes porteuses d’implant mammaire d’après les spécialistes, reste très faibles (une soixantaine de cas dans le monde) et non spécifique aux implants PIP. Des études complémentaires sont en cours, mais ce risque est infime.

¤ Toutes les prothèses sont rompues :

D’après les premiers chiffres de 8 à 12 % de tous les implants posés sont retrouvés rompus lors de l’explantation. Ces chiffres sont plus important pour les implants après 2006 et plus faibles avant 2004.

¤ Les implants contiennent des produits chimiques « dangereux » :

Ceci est démenti par le groupe et pour l’instant nous n’avons pas les informations sur le contenu exact du gel. L’affsaps a fait des examen in vitro qui pour l’instant ne retrouve pas de risque carcinogène de ce gel.

¤ Le gel de Silicone va partout :

Le gel reste longtemps intra capsulaire (dans la coque qui se forme autour de la prothèse à son contact après introduction), il diffuse facilement dans les ganglions, beaucoup plus rarement ailleurs.

¤ Le gel est irritant :

Oui, c’est un des signes cliniques, avec l’existence de volumineux ganglions axillaire, qui doit faire évoquer la rupture.

¤ La repose d’un implant est impossible dans le même temps opératoire :

Il n’en est rien, dans la plupart des cas, la repose d’un implant dans le même temps est possible, après toilette locale et éventuellement ablation de tout ou partie de la coque péri prothétique. Ce geste évite les interventions à répétition.

¤ La prise en charge par la SECU est totale :

Elle l’est pour la chirurgie de reconstruction, seule la dépose est prise en charge en cas de chirurgie esthétique (la repose d’un implant a un coût variable selon les établissements)

¤ L’intervention est urgente :

En cas de bilan radiologique normal, l’explantation n’est pas urgente, elle sera pratiquée dans l’année à venir. En cas de doute sur la rupture , l’intervention doit être effectuée dans un délai de 1 à 3 mois.

¤ Que faire en cas de refus d’explantation de la patiente :

Si les prothèses semblent intactes, une surveillance par échographie semestrielle sera instaurée.

 

Au total, le taux de ruptures semble élevé, plus de 10 % (versus 2 à 3 % à 10 ans pour les autres implants). Les complications graves sont pour l’instant extrêmement rares. La repose est le plus souvent possible dans le même temps opératoire. Un suivi clinique et radiologique sera nécessaire à long terme pour ces patientes.

Il convient donc de rassurer ces patientes anxieuses sur les risques réels de ce gel et le taux de rupture. Des informations complètes doivent leurs être fournies. Un avis spécialisé et une prise en charge globale est souhaitable dans les meilleurs délais.

 
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