Prise en charge et suivi à long terme des patientes présentant un adénocarcinome in-situ du col de l’utérus

Tan et coll. ont publié cette semaine une étude de cohorte australienne portant sur plus de mille patientes prises en charge pour un adénocarcinome in-situ (AIS) du col de l’utérus entre 1992 et 2010 (1). Les objectifs de cette étude étaient d’évaluer si un traitement conservateur pouvait être proposé à des patientes ayant eu une exérèse in-sano de la lésion et si l’hystérectomie devait être proposée, dans ce contexte, après accomplissement du projet parental.

Pour répondre à ces questions, les auteurs ont inclus toutes les patientes ayant eu un diagnostic d’AIS du col de l’utérus. Les critères d’exclusion étaient : un diagnostic de lésion invasive associée sur la biopsie ou sur la première pièce de traitement par conisation ; un diagnostic d’AIS porté fortuitement sur une pièce d’hystérectomie ; un antécédent de cancer du col de l’utérus ; une patiente avec un diagnostic d’AIS sur biopsie, mais non retrouvé sur la pièce de conisation. L’échec de traitement conservateur était défini comme une exérèse initiale in sano, avec un diagnostic d’AIS dans le suivi. Une maladie résiduelle était définie par la présence d’AIS, dans les 12 mois suivant un traitement conservateur non in-sano, sur une nouvelle conisation ou sur une pièce d’hystérectomie.

Au final, 1010 patientes ont été incluses, avec un âge moyen au diagnostic de 35,1 ans. Le traitement initial a consisté en une électroconisation à l’anse diathermique dans 27,8% des cas et en une conisation au bistouri froid dans 72,2% des cas. La profondeur moyenne des pièces d’exérèse était de 16,1mm (DS 7,4mm). La qualité des berges de résection a été rapportée pour 589 patientes, et parmi elles, l’exérèse était in sano dans 78,1% des cas.

Parmi les patientes avec une exérèse initiale non in-sano, 51,2% ont une une hystérectomie et 18,6% une nouvelle exérèse par traitement conservateur. Parmi les patientes avec une exérèse initiale in-sano, 24,8% ont eu une hystérectomie et 5,4% une nouvelle exérèse par traitement conservateur.

Avec un suivi médian après la conisation initiale de 8,8 ans (rang : 0,03-22,6 ans), les taux de persistance/récidive de l’AIS étaient de 28,7% après une exérèse initiale non in-sano et de 4,3% après une exérèse initiale in-sano.  A noter que ce diagnostic était porté majoritairement dans l’année suivant l’exérèse initiale : dans 91,9% des cas dans le groupe exérèse non in-sano et dans 65,0% des cas dans le groupe exérèse in-sano.

Chez les patientes de moins de 40 ans, une profondeur d’exérèse de moins de 10mm (par rapport à une profondeur de plus de 20-25mm) était associée à un sur-risque de berges envahies : OR 5,02 (IC 95% : 1,45-17,37). Chez les patientes de plus de 40 ans, une profondeur d’exérèse de moins de 10mm, ainsi que de 10-15mm (par rapport à une profondeur de plus de 20-25mm) étaient associées à un sur-risque de berges envahies : OR 7,15 (IC 95% : 1,43-35,87) et OR 7,86 (IC 95% : 1,59-38,82).

Le risque d’évolution vers un cancer était de 2,3% en cas de berges initiales non in-sano et de 1,3% en cas de berges initiales in-sano.

Ces résultats ont permis aux auteurs de conclure qu’il était indispensable d’obtenir une exérèse in-sano des lésions d’AIS pour limiter le risque de récidive ou de persistance des lésions. En cas d’exérèse in-sano, une surveillance, sans hystérectomie, pouvait être proposée  aux patientes.

Ces résultats viennent conforter les recommandations émises par l’INCa en 2016 concernant les patientes présentant un AIS (2). Une exérèse cylindrique (ou cylindrectomie), associé à un curetage endocervical, est ainsi indiqué dans ce contexte. Si les marges sont saines, il sera proposé à la patiente une surveillance active jusqu’à l’accomplissement du projet parental. Une fois ce projet accompli, ou en l’absence de désir de grossesse, une hystérectomie doit être pratiquée. Si les marges sont non saines ou le curetage positif, une nouvelle exérèse cylindrique est indiquée, afin d’éliminer une éventuelle lésion invasive résiduelle.

En cas d’AIS, la réalisation optimale de l’exérèse cylindrique initiale (3) est donc essentielle pour limiter au maximum le risque de deuxième exérèse, car cette seconde intervention serait plus difficile à mettre en œuvre. Des marges d’au moins 15mm doivent être proposées pour les patientes les plus jeunes, mais peuvent aller jusqu’à 25mm (4), notamment pour les patientes de plus de 40 ans.
 

  1. Tan JHJ, Malloy MJ, Thangamani R, Gertig D, Drennan KT, Wrede CD, Saville M, Quinn M. Management and long-term outcomes of women with adenocarcinoma in situ of the cervix: A retrospective study. Aust N Z J Obstet Gynaecol. 2019 Oct 3. doi: 10.1111/ajo.13047. [Epub ahead of print] PubMed PMID: 31578727.
  2. Conduite à tenir devant une femme ayant une cytologie cervico-utérine anormale, Thésaurus, Collection recommandations et référentiels, INCa, décembre 2016.
  3. Azaïs H, Canlorbe G, Belghiti J, Nikpayam M, Mergui JL, Uzan C. [How I do… a cylindrical excision for in situ adenocarcinoma of the cervix]. Gynecol Obstet Fertil Senol. 2017 Jul - Aug;45(7-8):439-440. doi: 10.1016/j.gofs.2017.06.004. Epub 2017 Jul 12. French. PubMed PMID: 28711365.
  4. Graesslin O, Dedecker F, Collinet P, Jouve E, Urbaniack D, Leroy J-L, et al. [Management of in situ cervical adenocarcinoma]. Gynecol Obstet Fertil 2006;34(12):117884.

 
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