Les auto-tests HPV semblent dans le principe très séduisants : le prélèvement est fait par la patiente chez elle, sans nécessité d’examen gynécologique, accès plus facile au dépistage pour les plus réticentes, sensibilité presqu’équivalente au prélèvement réalisé par un clinicien pour la détection des CIN2+….
Cependant les auteurs de cette étude de modélisation étudiant l’introduction plus large des auto-prélèvements (c’est-à-dire même à celles qui vont habituellement faire leur « frottis » chez leur praticien) montre que l’effet peut-être dans certaines conditions, contreproductif et aboutir si l’on n’y prend garde à une réduction du dépistage des CIN2+.
Tout d’abord les études montrent que seules 10 à 30 % des populations réfractaires répondent à l’autotest : au Danemark (autotest possible depuis 2017) seules 17 % renvoient leur test effectué ce qui a augmenté le taux de couverture de 73 à 77 % seulement, en Australie où le test est disponible depuis 2018, la couverture a augmenté de moins de 0.5 %, aux Pays-Bas où l’autotest est proposé seules 8 % avant la pandémie COVID et 16 % des femmes depuis l’ont choisi (29 % parmi les non répondeuses et 12 % parmi celles qui vont chez leur praticien) sans que le taux global de couverture en soit véritablement augmenté alors que le test est proposé au choix pour toutes…
Les raisons invoquées sont semblables à celles du dépistage du cancer colo-rectal… Le dégout à pratiquer elles-mêmes leur test, sentiment partagé par les non répondeuses et même par les répondeuses (« frottis » chez les praticiens) !
D’autre part si la sensibilité au dépistage des CIN2+ (dans la plupart des études) est identique (en cas d’utilisation d’une amplification par PCR), les études menées en Ecosse en population réelle semblent montrer des résultats en fait inferieurs passant d’une sensibilité relative de 91 % à 79 % soit une perte de 10 %...
Les auteurs indiquent qu’il y a donc un éventuel risque de contre productivité à élargir trop vite le champ d’application des autotests en raison :
- d’un risque de faible adhésion à la réalisation du prélèvement lui-même et du suivi nécessaire des HPV positives par un triage cytologique qui nécessite une consultation médicale,
- du risque de la perte de sensibilité des tests en population réelle ;
et jettent les bases d’autres pistes pour le triage des patientes HPV positives sans recours à un acte médical par la réalisation de tests biologiques complémentaires sur l’auto-prélèvement (génotypage, méthylation des HPV, détection des protéines de transformation cellulaire…) qui permettraient d’adresser directement en colposcopie et conseillent de se hâter lentement à l’utilisation de son élargissement pour toutes.
Références
Rebolj M, Sargent A, Njor SH, Cuschieri K.Int J Cancer. 2022 Nov 17. doi: 10.1002/ijc.34358. Online ahead of print.PMID: 36385698 Review.