Alors, le nouveau terme, c’est 39SA ?

Auteurs

En août 2018, une publication qui modifie profondément nos croyances en obstétrique a est parue dans le New England Journal of Medicine sur la gestion de fin de grossesse chez les patientes nullipares à bas risque. (1)

L’induction du travail, terme générique utilisé en anglais, englobe le déclenchement du travail et la maturation cervicale. Si le déclenchement du travail, avec des conditions locales favorables, n’est pas accusé d’augmenter la morbidité maternelle et néonatale, la maturation cervicale, en revanche, l’est.

Des métaanalyses récentes ont tenté d’étudier la morbidité de la maturation cervicale et leurs conclusions ne semblent pas accabler cette maturation de complications supplémentaires par rapport à l’expectative. (2-3) Cependant, la maturation cervicale n’était réalisée que sur indication médicale. L’expectative comportait les risques de l’indication médicale. Par exemple, il nous semble raisonnable de proposer une maturation cervicale en cas de prééclampsie, de diabète gestationnel nécessitant de l’insuline, ou de terme dépassé, avec des seuils d’âges gestationnels variables d’un centre à l’autre.

Chez une patiente à bas risque, le CNGOF et la HAS considéraient qu’il pouvait être raisonnable de réaliser un déclenchement du travail en cas de conditions locales favorables, après 39SA, sur demande maternelle. (4)

L’étude ARRIVE étudie les risques de l’induction du travail chez les patientes nullipares, à bas risque, à 39SA, comparés à l’expectative (1).

Cette étude randomisée portant sur plus de 6000 patientes avait comme critère de jugement principal un critère néonatal composite.

Les patientes étaient randomisées dans le groupe « induction », qui comportait soit un déclenchement (40%) soit une maturation cervicale (60%). L’étude était réalisée dans 41 hôpitaux différents aux États-Unis et chaque centre réalisait les déclenchements et maturations cervicales selon ses protocoles locaux.

Les résultats ont surpris tout le monde et sont en train d’influencer profondément l’obstétrique des patientes à bas risque.

En effet, les auteurs décrivent une diminution significative de la morbidité néonatale dans le groupe induction (4,3% versus 5,4%, RR 0,80 (IC95% 0,64–1,00) p=0,049), mais surtout une réduction du taux de césariennes (18,6% versus 22,2%, RR 0,84 (IC95% 0,76–0,93) p<0,001) et de pathologies hypertensives de la grossesse (9,1% versus 14,1%, RR 0,64 (IC95% 0,56–0,74), p<0,001) dans le groupe induction par rapport au groupe expectative.

L’induction à 39SA de ces patientes nullipares à bas risque implique un allongement de la durée de l’hospitalisation et soulève des questions de coûts. Des analyses secondaires, présentées pour la première fois le 14/02/2019 au congrès de la SMFM à Las Vegas semblent montrer que l’expectative comporte des coûts également, notamment liés au taux plus élevé de césarienne ainsi qu’aux complications maternelles et néonatales plus fréquentes.

Ces dernières présentations ont également porté sur les patientes multipares à bas risque et les données vont dans le même sens que pour les nullipares.

Au total, l’induction du travail à 39SA chez des nullipares ou primi/multipares semble réduire la morbidité tant maternelle que néonatale.

Ces données sont issues de grosses bases de données et sont probablement solides.

Doit-on pour autant induire toutes les grossesses à 39SA ?

Probablement pas et pour de multiples raisons, dont la gestion du flux de travail en salle ne naissance qui ne le supporterait pas. En revanche, il est important d’informer les patientes de ces données et nous n’avons pas de raison de refuser une demande d’induction du travail après 39SA, autre que les difficultés logistiques.

Ces données arrivent en même temps que de profonds changements culturels en médecine et dans la relation médecin-patient. Légalement, le patient peut choisir son traitement après que le soignant l’a informé des options et des risques/bénéfices de ces options. En obstétrique, ces règles s’appliquent désormais directement à l’accouchement.

Ces nouvelles pratiques suivent les recommandations sur l’utilisation de l’oxytocine dans le travail spontané, largement appliquées à tous types de travail. Nos recommandations sur la maturation cervicale sont beaucoup plus floues et moins codifiées. C’est l’occasion pour nos services de se poser à nouveau la question des modalités techniques de maturation cervicale et de continuer la transition vers les méthodes mécaniques, mieux tolérées par les fœtus et les patientes. Mais c’est un sujet différent.

 

  1. Labor Induction versus Expectant Management in Low-Risk Nulliparous Women. Grobman WA, Rice MM, Reddy UM, Tita ATN, Silver RM, Mallett G, Hill K, Thom EA, El-Sayed YY, Perez-Delboy A, Rouse DJ, Saade GR, Boggess KA, Chauhan SP, Iams JD, Chien EK, Casey BM, Gibbs RS, Srinivas SK, Swamy GK, Simhan HN, Macones GA; Eunice Kennedy Shriver National Institute of Child Health and Human Development Maternal–Fetal Medicine Units Network. N Engl J Med. 2018;379:513-523. doi: 10.1056/NEJMoa1800566.
  2. Induction of labor at full term in uncomplicated singleton gestations: a systematic review and metaanalysis of randomized controlled trials. Saccone G, Berghella V. Am J Obstet Gynecol. 2015;213:629-36. doi: 10.1016/j.ajog.2015.04.004.
  3. Use of labour induction and risk of cesarean delivery: a systematic review and meta-analysis. Mishanina E, Rogozinska E, Thatthi T, Uddin-Khan R, Khan KS, Meads C. CMAJ. 2014;186:665-73. doi: 10.1503/cmaj.130925.
  4. https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/declenchement_artificiel_du_travail_-_recommandations.pdf accédé le 14/02/2019.

 
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