Le Vaccin HPV Quadrivalent est-il dangereux ?

Le Vaccin HPV quadrivalent a obtenu son autorisation de mise sur le marché en 2006, depuis cette date près de 136 millions de doses ont été administrées dans le monde. Des études prospectives randomisées (portant sur plus de 20.000 patientes pour le quadrivalent et près de 16.000 pour le bivalent), ont permis de mettre en évidence à la fois leur efficacité sur la prévention des infections persistantes par les virus du cocktail vaccinal, sur les précurseurs des cancers du col (CIN2+) et leur innocuité en particulier vis-à-vis des maladies auto-immunes.

Toutefois, la taille des échantillons de patientes incluses ne permettait pas à ces études d’avoir la puissance nécessaire pour mettre en évidence des évènements indésirables survenant à des taux extrêmement faibles et naturellement en particulier les plus rares d'entre eux, ce qui justifie le maintien d'une vigilance commandée par les instances sanitaires nord-américaines, européennes et françaises ("plans de gestion de risque, essais de phase IV de pharmacovigilance…").

Des études épidémiologiques menées en population permettent d'apporter sur ce sujet des données de tolérance complémentaires évidemment indispensables.

De nombreuses rumeurs (notamment en France) ont fait état de risques particuliers notamment en raison de l’association temporelle d’événements indésirables et vaccination chez de toutes jeunes filles.

Une revue récente des déclarations d'effets secondaires recueillis à l'échelle des Etats Unis signale une plus grande fréquence de syncopes et d’accidents thromboemboliques, mal expliquée sinon par une possible sur-déclaration de ces effets [1], sans mentionner un sur-risque de maladies autoimmunes.

Une deuxième étude de pharmaco-vigilance portant sur une distribution de plus de 600,000 doses a mis en évidence elle-aussi une plus grande fréquence d'accidents thromboemboliques : sur les 8 accidents déclarés, 5 seulement entraient dans la définition clinique de thromboses et toujours chez des patientes ayant des facteurs de risque thrombo-emboliques [2].

Une autre étude californienne [3] avait montré, de façon surprenante et non confirmée par d’autres études, une association significative pour la thyroïdite d’Hashimoto mais sans relation temporelle ou explication causale ou plausibilité  biologique en faveur d'une véritable association entre thyroïdite d’Hashimoto et vaccination HPV.

L’étude présentée ici [4] représente les données cumulées et exhaustives de la totalité de la  population vaccinée de 2 pays européens : la Suède et le Danemark qui bénéficient d’un système de santé assez similaire et d’un registre systématique et personnalisé permettant de connaitre tous les événements médicaux survenus pour chaque sujet grâce à un système d’identification.

L’étude porte donc ici sur près de 1.000.000  de jeunes filles ce qui représente 49% de la population cible du Danemark et 18% des Suédoises, avec 690,000 doses vaccinales distribuées. Ont été retenus les événements survenus au plus tard 181 jours après la dernière dose reçue ce qui est le plus long écart de surveillance attribuable publié à ce jour. Il s’agit également d’une étude indépendante financée par des fondations suédoise et danoise sans l’aide, ni intervention de l’industrie.

Parmi 40 maladies auto-immunes prédéfinies seules 3 ont montré une possible et significative association : la maladie de Behcet (RR=3.37, 95% CI 1.05 to10.80), le syndrome de Raynaud (RR=1.67, CI 1.14 to 2.44) et le diabète de type 1 (RR=1.29, CI 1.03 to 1.62)., cependant pour la maladie de Behcet seuls 5 cas ont été décrits dans la population vaccinée ce qui fait dire aux auteurs que, bien que le risque relatif soit élevé (3.37), il est possible que l’association soit due à une répartition liée au hasard, d’autant que pour les 2 autres affections, Raynaud et diabète, l’association est également retrouvée après les fameux 181 jours de surveillance ce qui peut, étant donné le RR assez faible , retirer du poids au lien de causalité. Les auteurs concluent d’ailleurs à l’absence probable de lien de causalité entre la vaccination quadrivalente et ces 3 affections.

En revanche aucune association avec une affection neurologique, auto-immune, lupique ou thromboembolique n’a été retrouvée.

Les limites de cette étude, selon l’avis même des auteurs, sont liées :

 -à la possibilité  de surévaluation des affections décrites dont les patientes vaccinées seront plus sensibles à décrire les symptômes en raison de la temporalité vaccin/symptôme mais également et peut-être surtout de l’accès récent à un médecin, plus à même de découvrir une affection qui serait passée inaperçue, avant un certain temps en l’absence de cet événement vaccinal,

- à la possibilité également de sous-évaluation des affections qui surviendraient après les 180 jours de délai d’association, où qui seraient silencieuses pendant cette période.

-de sélection d’une population particulière du fait que seules 49% des Danoises et 18% des Suédoises ont été concernées par la vaccination au moment de l’étude ce qui est une faible proportion de la population et qui peut donc comporter des biais de sélection.

Cependant si les études nord américaines n’ont retrouvé aucun effet secondaire majeur, cette étude sur une population européenne de près d’un million de jeunes filles, vient confirmer l’absence d’association de causalité avec une affection neurologique, auto-immune, neurologique ou thromboembolique, ce qui demandera bien évidemment à être confirmé sur de plus longues périodes, d’autres pays et sur des populations plus globales.

Autoimmune, neurological, and venous thromboembolic adverse events after immunisation of adolescent girls with quadrivalent human papillomavirus vaccine in Denmark and Sweden: cohort study.

Arnheim-Dahlström L, Pasternak B, Svanström H, Sparén P, Hviid A.

BMJ. 2013 Oct 9;347:f5906. doi: 10.1136/bmj.f5906.

Pour en savoir plus :

  1. Slade BA, Leidel L, Vellozzi C, Woo EJ, Hua W, Sutherland A, Izurieta HS, Ball R, Miller N, Braun MM, Markowitz LE, Iskander J. Postlicensure safety surveillance for quadrivalent human papillomavirus recombinant vaccine. JAMA : the journal of the American Medical Association 2009;302: 750-7.
     
  2. Gee J, Naleway A, Shui I, Baggs J, Yin R, Li R, Kulldorff M, Lewis E, Fireman B, Daley MF, Klein NP, Weintraub ES. Monitoring the safety of quadrivalent human papillomavirus vaccine: findings from the Vaccine Safety Datalink. Vaccine 2011;29: 8279-84.
     
  3. Chao C, Klein NP, Velicer CM, Sy LS, Slezak JM, Takhar H, Ackerson B, Cheetham TC, Hansen J, Deosaransingh K, Emery M, Liaw KL, Jacobsen SJ. Surveillance of autoimmune conditions following routine use of quadrivalent human papillomavirus vaccine. Journal of internal medicine 2012;271: 193-203.
     
  4. Arnheim-Dahlstrom L, Pasternak B, Svanstrom H, Sparen P, Hviid A. Autoimmune, neurological, and venous thromboembolic adverse events after immunisation of adolescent girls with quadrivalent human papillomavirus vaccine in Denmark and Sweden: cohort study. BMJ 2013;347: f5906.

 
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