Propositions d’Agnès BUZYN conséquences pour la filiation

La prochaine discussion des lois de Bioéthique promet quelques bons moments. Dans l’immédiat la ministre de la Santé, Madame Agnès Buzyn a fait des propositions. La légalisation de l’AMP pour les couples lesbiens (sans oublier le tiers donneur), le remboursement par la sécurité sociale des actes y afférant ce qui est effectivement une condition pour la non-discrimination de son accès sur les moyens financiers de chacune, l’utilisation des gamètes post mortem et l’ouverture de l’accès aux origines pour les enfants issus de don, à leurs 18 ans.

Certains points ne posent pas de problème. L’ouverture de l’AMP aux couples de femmes par exemple. Cela fera augmenter la demande de sperme de donneur, mais des donneurs d’un nouveau type sont apparus après l’ouverture du don aux personnes sans enfants. Ce sont des hommes plus jeunes, étudiants, volontiers « geek »et épris d’altruisme. Nuls doutes non plus que les couples lesbiens sauront mobiliser leurs amis masculins. Faire une place à ces derniers pose par contre le problème de l’éventuelle intrusion d’un père dans un couple qui n’en veut pas ? Ou alors il faudra garder ce donneur dans l’anonymat ?

Le problème se pose également pour l’accès aux origines. Ce sont les parents qui choisissent l’anonymat du donneur et c’est l’enfant qui 20 ans après demande à le rencontrer. Dans les pays ou la levée de l’anonymat a déjà eu lieu on a assisté à deux choses :

- la commercialisation des gamètes par des firmes qui ne s’embarrassent pas trop de problèmes éthiques. Elles peuvent vous garantir l’exclusivité d’un donneur par exemple si vous y mettez le prix, ou un donneur avec des caractères particuliers (éventuellement en omettant de citer ceux qui poseraient problème).

- La seconde conséquence est que les parents qui préfèrent l’anonymat du donneur ne disent plus à leurs enfants le secret de leur conception pour éviter de le voir débarquer dans le cercle familiale 20 ans après avec éventuellement ses autres progénitures demi-frères de demi-sœurs génétiques de l’enfant. Or c’est le secret beaucoup plus que l’anonymat du donneur qui pose problème. Tous les enfants issus de don le disent volontiers : apprendre brutalement à un âge avancé un tel secret (car c’est toujours ce qui finit par arriver) provoque un choc majeur et une crise de confiance que l’on comprend bien. Il en ressort que la volonté d’ouverture de l’accès aux origines provoque précisément l’inverse du but recherché et risque d’aggraver la situation en augmentant le secret.  C’est la raison pour laquelle les CECOS préconisent un dialogue rapide entre les parents et l’enfant de façon à ce que celui-ci ait toujours su le mécanisme de sa conception. Quand il est petit cela ne veut pas dire grand-chose pour lui, mais la signification change avec l’âge bien évidemment et au moins l’aura-t-il toujours su. C’est alors qu’il faut rajouter un dialogue entre les parents et l’enfant, lorsque celui-ci est en âge de tout comprendre, à trois donc, pour dissiper tous les questionnements qu’inévitablement un adolescent se pose.

L’utilisation des gamètes post-mortem soulève le problème du rôle de la médecine dans la société. Que des enfants soient orphelins de père cela arrive malheureusement. Mais est-ce bien le rôle de la médecine d’en faire naitre volontairement ? Je ne le pense pas. Et la projection de l’amour d’une femme, sur son enfant et son amoureux défunt, dans la même personne, pose inévitablement un problème psychologique.

Un dernier mot pour conclure. Comme tout change, un jour nous aurons les gamètes artificiels.  Des souris sont déjà nées grâce à ce type de cellules. Adieu donc les donneurs et les donneuses de gamètes. Les généticiens nous promettent même qu’avec les techniques modernes d’analyse du génome l’anonymat n’existera plus. On pourra même savoir si notre mère a eu, par hasard, une aventure et éventuellement si, comme c’est le cas quelque fois, le donneur de sperme n’avait pas beaucoup plus de charmes et de séduction que d’anonymat.

 
Les articles sont édités sous la seule responsabilité de leurs auteurs.
Les informations fournies sur www.gyneco-online.com sont destinées à améliorer, non à remplacer, la relation directe entre le patient (ou visiteur du site) et les professionnels de santé.