BEST OFF Congrès ESHRE 2022

La 28ème édition de l’ESHRE s’est déroulée à Milan. Voici le résumé des dernières études ou posters traitant de trois sujets particuliers de la médecine et de la biologie de la reproduction : l’andrologie, l’embryologie et de la bactériologie (étude du microbiote).
 

ANDROLOGIE

Des nouvelles avancées dans la sélection des spermatozoïdes ont été abordées.

Une équipe brésilienne (P-010) a présenté une étude utilisant la biréfringence comme marqueur de sélection des spermatozoïdes pour l’ICSI (injection intracytoplasmique des spermatozoïdes).

Il s’agit d’une étude rétrospective cas-témoin entre janvier 2018 et Aout 2020.

181 spermatozoïdes ont été sélectionnés :74 par la méthode de biréfringence versus 107 par la méthode conventionnelle.

Les résultats sont les suivants : dans le groupe d'étude utilisant la biréfringence, on observe un meilleur taux de clivage embryonnaire (p=0,04), un meilleur taux de grossesses cliniques par transfert (p=0,03) et un meilleur taux de grossesse clinique par cycle initié (p=0,02) versus la méthode conventionnelle. Ces données bien que préliminaires semblent prometteuses pour améliorer les chances de succès pour les patientes en AMP.

De nombreuses études se sont intéressées aux systèmes micro fluidiques comme méthode de sélection des spermatozoïdes.

Ainsi, une équipe espagnole (P-028) a comparé la sélection des spermatozoïdes par les méthodes conventionnelles (double gradients et migration ascendante) versus l’utilisation de la sélection via des systèmes micro fluidiques.

Ils ont mené une étude prospective entre février 2021 et janvier 2022 sur 111 échantillons de sperme de patients et de donneurs. De meilleurs résultats en termes de qualité spermatique (concentration, vitalité, morphologie, taux de fragmentation) ont été obtenus avec les techniques micro fluidiques versus la technique du double gradient. Cette amélioration n'a pas été retrouvée versus la technique de migration ascendante (sauf pour le taux de fragmentation qui est plus bas). Cependant le nombre d’échantillons de sperme utilisés par la technique de migration ascendante étaient trop faible N= 10 pour que les résultats soient significatifs.

Cette méthode de sélection utilisant les systèmes micro fluidiques présente l'avantage d'un gain de temps technique au laboratoire, une baisse de consommation des milieux de lavage et permet de réduire les variations intra laboratoire ainsi que la manipulation des gamètes. Cette étude bien que prometteuse a été menée sur des spermes provenant majoritairement de « donneurs » et les résultats doivent être confirmés sur un plus grand nombre d’échantillons de sperme d’une part et avec des spermes déficitaires, qui correspond au recrutement des laboratoires d’AMP.

Une équipe américaine (P-117) a testé un nouveau dispositif EPPS (membrane électrophorétique de tri des spermatozoïdes). Ce dispositif a pour objectif de sélectionner les spermatozoïdes en fonction de leur morpho cinétique mais également en tenant compte de l’intégrité génomique des spermatozoïdes. Il s'agit d'une étude préliminaire, les résultats bien que satisfaisants doivent être confirmés sur des spermes déficients.

Une équipe italienne (P-009) a proposé une méthode de sélection « plus physiologique » pour les spermatozoïdes utilisant un gradient de progestérone comme critère. Cette sélection permettrait d’abaisser le taux de fragmentation de l’ADN, d'améliorer la morphologie et d'augmenter le nombre de spermatozoïdes rapides progressifs.

Une équipe japonaise (P-215) a étudié l’utilisation d’une solution contenant de l'acide hyaluronique (composant naturel de la matrice extracellulaire du complexe cumulo-ovocytaire) pour améliorer la sélection des spermatozoïdes en ICSI.

Il s'agit d'une étude rétrospective menée sur 411 patientes entre décembre 2019 et août 2021.

2 groupes : 1909 ovocytes injectés avec la solution contenant l’acide hyaluronique versus 2093 sans.

Les résultats montrent des taux de fécondation (75,5%versus 74,3%) non différents significativement par les 2 méthodes mais des taux de formation de blastocystes significativement augmentés avec l’usage de la solution contenant l’acide hyaluronique (52,3%versus 48,1%), cette différence est encore plus marquée pour les blastocystes de hauts grades (41% versus 36,9%). Les taux de grossesses cliniques ainsi que les taux de fausses couches après transfert d'embryon n'étaient pas significativement différents entre les 2 méthodes. L'étude a été menée chez des patientes toutes âgées de moins de 39 ans, il serait intéressant de connaitre les résultats chez des patientes plus âgées.
 

EMBRYOLOGIE

Nouvelles avancées dans la sélection des embryons.

Une nouvelle approche (O-077) a été présentée par un Anglais Peter He. Il a généré des images en 3D des embryons au stade clivé. Pour ce faire, il compile des mises au point d’images des embryons extraites du Timelapse et les standardise. A l’avenir, les images 3D pourront probablement servir d’outil complémentaire pour affiner la sélection embryonnaire, d’autant que cette approche est non invasive.

En Italie, une équipe a étudié (O-074) comme critère de sélection de l’embryon la présence d’ADN dans la blastocèle. L’étude prospective a porté sur 142 cycles. Les résultats obtenus montrent un taux de grossesse clinique significativement plus important dans le groupe où l’ADN était absent du fluide blastocoelique. Une des hypothèses pourrait être que cet ADN apporte des informations sur la génétique du blastocyste notamment sur sa ploïdie.

Au Japon, ils ont testé l’effet de l’ajout d’une cytokine le GM-CSF dans le milieu de réchauffement des blastocystes vitrifiés sur les résultats de grossesse et de naissance.

Il s'agit d'une étude rétrospective (P-395), entre février 2018 et février 2019, sur 566 cycles de transfert de blastocyste issus de patientes âgées de 30 à 39 ans. Les taux de grossesses cliniques (54,3 % versus 42,6 %) et les taux de naissances étaient respectivement (42,9% versus 31,1 %) significativement plus élevés dans le groupe GM-CSF. De plus les taux de blastocystes étaient significativement plus élevés même quand ils étaient de bas grade. Il n'y avait pas de différence significative entre les 2 groupes sur la durée de la grossesse, le nombre de césariennes, le poids à la naissance, ou encore sur les taux d'anomalies congénitales. Cette étude encourage l'usage du GM-CSF, cytokine naturellement présente et sécrétée par les cellules épithéliales du tractus féminin, pour améliorer les taux de grossesses cliniques et de naissances.

 

BACTERIOLOGIE : le microbiote

De nouvelles études, ont mis en évidence le rôle du microbiome endométriale à la fois dans les fausses couches répétées et dans les échecs d’implantation. En Espagne, une équipe a montré (P-431) que chez des patientes présentant des échecs d’implantation, leurs microbiotes sont fonctionnellement actifs (profil d’expression des gènes spécifiques) et utilisent des voies métaboliques distinctes par rapport à un groupe témoin.

En Suède, une équipe (0-303) a trouvé une différence dans le microbiome chez les femmes présentant des fausses couches répétées : une baisse du Lactobacillus cripatus et une augmentation relative de Gardnerella vaginalis dans la flore de l'endomètre et du vagin. Ces résultats suggèrent que ces types de microbiomes défavorables pourraient constituer un facteur de risque pour les fausses couches répétées.

Une équipe japonaise a testé(P-384) l’efficacité d’un traitement associant antibiotique et probiotique chez des patientes avec des dysbioses endométriales. Ils ont conclu à l'efficacité des traitements sur le temps d'obtention de la grossesse.

Une équipe russe (P-097) a comparé le microbiote dans le sperme chez des hommes ayant des paramètres altérés comparativement à des spermes compris dans les normes.

Ils ont mené étude rétrospective portant sur 825 échantillons de sperme (groupe 1 : 475 spermes avec des paramètres altérés versus 350 spermes « normaux » groupe 2). L’ADN des bactéries a été plus souvent détecté dans le groupe 1 : 79,6% versus 73,4% pour le groupe 2 avec p=0,045. Concernant les bactéries anaérobies strictes, leur taux était plus important dans le groupe 2 versus le groupe 1 (44% versus 36,3%  p=0,0 26).  Il n’a pas été retrouvé de différence significative concernant les autres familles de bactéries entre les 2 groupes (mycoplasmes, bactéries gram positives anaérobies facultatives, bactéries gram négatives anaérobies facultatives). Ces résultats sont une piste pour mieux comprendre la contribution apportée par ces micro-organismes spécifiques aux maladies, ce qui pourrait potentiellement conduire au développement de nouvelles options thérapeutiques ou à améliorer celles existantes.

Pour conclure, un mot sur l'effet du COVID et des vaccins sur la fertilité.

L'altération de la qualité spermatique est démontrée pendant la phase aiguë de l’infection à COVID 19 et un état inflammatoire des voies génitales persiste pendant au moins 3 mois après la guérison. Mais cette altération est réversible.

Concernant le vaccin, ni la réponse ovarienne à la stimulation ni la qualité du sperme ne semblent être affectées par l’administration des vaccins contre le Covid 19. La vaccination reste une forte recommandation chez les couples qui planifient une grossesse avec ou sans AMP.