L’AP-HP a été condamnée, par un arrêt de la Cour administrative d’appel de Versailles, rendu le 5 juillet 2016, dans les conditions ci-après :
« 1. Considérant que Mme A., dont les échographies prénatales ont été réalisées à l’hôpital Antoine Béclère à Clamart, a donné naissance le 27 décembre 2007 à un garçon prénommé Tony, présentant une agénésie à partir des métacarpes de la main droite ; que ses parents, estimant qu’une erreur de diagnostic avait été commise et qu’ils n’avaient pas été informés des limites des examens pratiqués, ont recherché la responsabilité de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ; qu’ils relèvent appel du jugement du 17 mars 2015 par lequel le Tribunal a rejeté leur demande ;
« Sur la responsabilité :
« 2. Considérant qu’aux termes du troisième alinéa de l’article L. 114-5 du code de l’action sociale et des familles : « Lorsque la responsabilité d’un professionnel ou d’un établissement de santé est engagée vis-à-vis des parents d’un enfant né avec un handicap non décelé pendant la grossesse à la suite d’une faute caractérisée, les parents peuvent demander une indemnité au titre de leur seul préjudice. Ce préjudice ne saurait inclure les charges particulières découlant, tout au long de la vie de l’enfant, de ce handicap. La compensation de ce dernier relève de la solidarité nationale.
« 3. Considérant qu’il résulte de l’instruction que les comptes rendus des échographies du deuxième et du troisième trimestre de la grossesse de Mme A. mentionnent que les différents segments de membres du fœtus étaient en position normale et que le squelette a été visualisé sans anomalie décelable ; que si l’expert commis par le Tribunal administratif de Cergy Pontoise a relevé, dans son rapport du 26 juin 2013, que les anomalies fines affectant l’extrémité des membres d’un fœtus, telles que l’absence d’un doigt, peuvent être difficiles à détecter, il a indiqué que le défaut de diagnostic de l’absence de la main droite de Tony à l’occasion de l’échographie morphologique résultait soit d’une erreur d’inattention, soit d’une réalisation inadaptée de l’examen, une analyse systématique des quatre membres devant conduire, à tout le moins, à suspecter l’anomalie en cause ; que les comptes rendus d’échographie, qui indiquent que les examens se sont déroulés dans de bonnes conditions, ne font état d’aucune difficulté à réaliser le contrôle visuel de l’ensemble des membres du fœtus ; que, dès lors, dans les circonstances de l’espèce, le défaut de vérification adaptée de la conformité des quatre membres du fœtus constitue une faute qui, par son intensité et sa gravité, est caractérisée au sens du troisième alinéa de l’article L. 114-5 du code de l’action sociale et des familles ;
« Sur le préjudice :
« 4. Considérant que Mme A. et M. C. font valoir que, du fait de l’absence de diagnostic prénatal de l’agénésie dont souffre leur fils, ils ont été privés de la possibilité de se préparer à la naissance d’un enfant souffrant d’un handicap ; que le préjudice moral invoqué est la conséquence directe de la faute caractérisée commise dans la réalisation de l’échographie ; qu’il convient d’accorder à chacun des parents une indemnité de 2 000 € en réparation de ce préjudice ;
« Sur les intérêts :
« 5. Considérant que Mme A. et M. C. ont droit aux intérêts sur les sommes qui leur sont dues à compter du 5 janvier 2010, date de réception de leur première demande indemnitaire présentée à l’hôpital Antoine Béclère ;
« Sur les frais d’expertise :
« 6. Considérant que les frais de l’expertise ordonnée par le jugement avant dire droit du Tribunal administratif de Cergy Pontoise du 12 juin 2012 ont été chiffrés à la somme de 1 500 € et mis à la charge de Mme A. et M. C. par une ordonnance du Président de ce Tribunal du 16 mars 2015 ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de faire supporter par l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris la charge définitive de ces frais ;
« Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
« 7. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris une somme globale de 1 500 € au titre des frais exposés par Mme A. et M. C. et non compris dans les dépens.
Décide
Article 1er : le jugement n° 1105544 du 17 mars 2015 du Tribunal administratif de Cergy Pontoise est annulé.
Article 2 : l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris est condamnée à verser à Mme A. et M. C. une somme de 2 000 € chacun en réparation de leur préjudice moral. Ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 5 janvier 2010.
Article 3 : les frais d’expertise, d’un montant de 1 500 €, sont mis à la charge de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris.
Article 4 : l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris versera à Mme A. et M. C. une somme globale de 1 500 € au titre de l’article L 761-1 du code de la justice administrative. »
Autre condamnation, par un arrêt de la Cour administrative d’appel de Nancy, rendu le 7 avril 2016, dont les alinéas utiles sont reproduits ci-après :
« 1. Considérant que Mme E. a donné naissance au centre hospitalier de Mulhouse, le 21 février 2007, à son second enfant, C., atteint du syndrome de Silver Russel ; que Mme E., tout en continuant à être suivie par son médecin gynécologue libéral, a été prise en charge, à partir du cinquième mois de sa grossesse, par le centre hospitalier de Mulhouse où les investigations conduites à partir de novembre 2006 ont mis en évidence un retard de croissance du fœtus ; que M. et Mme E., estimant avoir été insuffisamment informés des risques liés à ce retard de croissance fœtale et avoir été privés de la possibilité de recourir à une interruption volontaire de grossesse pour motif médical, ont sollicité la désignation d’un expert auprès du Tribunal administratif de Strasbourg ; qu’après le dépôt du rapport de l’expert commis par celui-ci, M. et Mme E. ont recherché la responsabilité, d’une part, du médecin gynécologue libéral et, d’autre part, du centre hospitalier de Mulhouse, sur le fondement de l’article L. 114-5 du code de l’action sociale et des familles à raison de l’existence d’une faute caractérisée ; que, par un arrêt du 2 avril 2015, la cour d’appel de Colmar a condamné le médecin libéral, Mme N., à verser à M. et Mme E. la somme de 30 000 € chacun au titre de leur préjudice moral ; que, par un jugement du 20 mai 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné le centre hospitalier de Mulhouse à ne réparer que le préjudice résultant d’une atteinte au droit à l’image par le versement à chacun des parents d’une indemnité de 500 € et a rejeté leurs conclusions tendant à la réparation des préjudices qu’ils estiment avoir subis, ainsi que leur fils mineur H., du fait d’une faute caractérisée du médecin praticien du centre hospitalier de Mulhouse ainsi que d’un signalement au Procureur de la République de la situation de déshydratation de leur enfant ; que M. et Mme E., agissant en leur nom propre et au nom de leur fils H., relèvent appel de ce jugement ; que le groupement hospitalier de la région Mulhouse et Sud Alsace, venant aux droit du centre hospitalier de Mulhouse, demande, par la voie de l’appel incident, la réformation du jugement en tant qu’il a partiellement retenu sa responsabilité ;
« Sur la responsabilité du groupe hospitalier de la région Mulhouse et Sud Alsace du fait de la faute caractérisée :
« 2. Considérant qu’aux termes du troisième alinéa de l’article L. 114-5 du code de l’action sociale et des familles : ²Lorsque la responsabilité d’un professionnel ou d’un établissement de santé est engagé vis-à-vis des parents d’un enfant né avec un handicap non décelé pendant la grossesse à la suite d’une faute caractérisée, les parents peuvent demander une indemnité au titre de leur seul préjudice. Ce préjudice ne saurait inclure les charges particulières découlant, tout au long de la vie de l’enfant, de ce handicap. La compensation de ce dernier relève de la solidarité nationale.² ;
« En ce qui concerne la recevabilité de la demande indemnitaire en tant qu’elle est présentée au nom de H. E. ;
« 3. Considérant qu’il résulte des dispositions précitées de l’article L. 114-5 du code de l’action sociale et des familles que seul le préjudice propre des parents est susceptible d’être réparé du fait de l’existence d’une faute caractérisée ; que ces dispositions font obstacle à ce que M. et Mme E. demandent réparation du préjudice subi par leur fils aîné H. ; qu’il s’ensuit que leur demande présentée à ce titre doit être rejetée comme irrecevable ;
« En ce qui concerne la régularité de l’expertise :
« 4. Considérant qu’il résulte de l’instruction que l’expert a, en méconnaissance de l’ordonnance du juge des référés du 19 novembre 2007, déposé son rapport au greffe du tribunal sans avoir au préalable communiqué ses conclusions aux parties et recueilli leurs dires éventuels ; que, par suite, les opérations d’expertise ont été irrégulières ; que toutefois, cette irrégularité ne fait pas obstacle à ce que le rapport d’expertise soit retenu à titre d’élément d’information et à ce que, l’établissement défendeur ayant pu présenter ses observations au cours de la procédure écrite qui a suivi le dépôt du rapport d’expertise et la Cour disposant maintenant des éléments d’informations nécessaires à la solution du litige, il soit statué sans qu’il soit besoin de recourir à une expertise ;
« En ce qui concerne la responsabilité :
« 5. Considérant qu’aux termes de l’article L. 2213-1 du code de la santé publique : ²L’interruption volontaire d’une grossesse peut, à toute époque, être pratiquée si deux médecins membres d’une équipe pluridisciplinaire attestent, après que cette équipe a rendu son avis consultatif (…) soit qu’il existe une forte probabilité que l’enfant à naître soit atteint d’une affection d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic. / (…) / Lorsque l’interruption de grossesse est envisagée au motif qu’il existe une forte probabilité que l’enfant à naître soit atteint d’une affection d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic, l’équipe pluridisciplinaire chargée d’examiner la demande de la femme est celle d’un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal. Lorsque l’équipe du centre précité se réunit, un médecin choisi par la femme peut, à la demande de celle-ci, être associé à la concertation. / Dans les deux cas, préalablement à la réunion de l’équipe pluridisciplinaire compétente, la femme concernée ou le couple peut, à sa demande, être entendu par tout ou partie des membres de ladite équipe.² ;
« 6. Considérant aussi qu’aux termes de l’article R. 4127-35 du code de la santé publique : ²Le médecin doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille, une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’il lui propose. Tout au long de la maladie, il tient compte de la personnalité du patient dans ses explications et veille à leur compréhension. / Toutefois, lorsqu’une personne demande à être tenue dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic, sa volonté doit être respectée (…)² ;
« 7. Considérant qu’il résulte de l’instruction que le retard de croissance du fœtus a été diagnostiqué pour la première fois le 2 novembre 2006, lors de l’échographie réalisée sur Mme E. au centre hospitalier de Mulhouse à 24 semaines du terme de la naissance ; que le Dr. J., médecin chef de l’unité d’échographie et de médecine fœtale du centre hospitalier, a rencontré M. et Mme E. le 3 novembre 2006 et leur a signalé, lors de cet entretien, l’existence de ce retard ; que le praticien hospitalier a fait procéder à des examens complémentaires et a soumis le dossier de Mme E. au centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal de Strasbourg, dont dépend le centre hospitalier de Mulhouse, le 10 novembre 2006 ; que le dossier a de nouveau été discuté avec ce même centre pluridisciplinaire le 15 décembre 2006 ; que les investigations et échographies conduites par le centre hospitalier de Mulhouse ainsi que par le centre de diagnostic prénatal de Strasbourg et le centre médical chirurgical et obstétrical de Strasbourg auxquels Mme E. a été adressée ont confirmé l’existence d’un très sévère retard de croissance du fœtus, inférieur au troisième centile ; que l’hypothèse que l’enfant à naître soit atteint du syndrome de Silver Russel a été évoquée par le médecin échographiste du centre médical chirurgical et obstétrical de Strasbourg dans un courrier daté du 8 décembre 2006 adressé au Dr J. faisant le compte-rendu d’une échographie réalisée ce même jour ;
« 8. Considérant, en premier lieu, que le syndrome de Silver Russel est une maladie génétique d’une particulière gravité ; que, notamment, un tiers des enfants atteints de cette affection ont un développement très perturbé, une toute petite taille et un retard intellectuel sévère ; que si le syndrome de Silver Russel est une maladie très rare et si son diagnostic ne pouvait pas être posé avec certitude avant la naissance de l’enfant, l’hypothèse avait été sérieusement envisagée par les médecins lors de la grossesse ainsi qu’il a été dit au point précédent ; que l’expert indique par ailleurs qu’un retard de croissance au troisième centile représente une maladie fœtale d’une particulière gravité ; que le retard de croissance intra-utérin mis en évidence par les examens pratiqués sur Mme E. était suffisamment sévère et inquiétant pour considérer qu’il existait une forte probabilité que l’enfant à naître soit atteint d’une affection d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic au sens de l’article L. 2213-1 du code de la santé publique ; que la grossesse de Mme E. était susceptible de relever du cas où peut être pratiquée l’interruption volontaire de grossesse pour motif médical prévue par les dispositions de cet article ;
« 9. Considérant, en second lieu, d’une part, que si le médecin du centre hospitalier de Mulhouse a informé M. et Mme E. de l’existence d’un retard de croissance du fœtus, il résulte de l’instruction qu’il ne leur a pas donné une information claire, complète et précise portant sur le caractère très sévère de ce retard de croissance et sur les risques encourus par l’enfant ; qu’il n’a notamment jamais remis à Mme E les comptes rendus des différentes échographies réalisées au centre hospitalier et au centre médical chirurgical et obstétrical de Strasbourg ; qu’il ne lui a pas non plus restitué le contenu et les conclusions des discussions médicales qui ont eu lieu au sein du centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal de Strasbourg, ainsi que de celles qu’il a eues avec ses confrères du centre hospitalier ; qu’il ne ressort d’aucune pièce versée au dossier que Mme E. aurait manifesté la volonté de ne pas être tenue informée des risques qui se présentaient pour son enfant à naître ; que si le Dr J. devait tenir compte dans ses explications de la personnalité de Mme E. et des inquiétudes qu’elle exprimait, aucune circonstance ne justifiait qu’il ne remplisse pas ses obligations déontologiques, résultant des dispositions précitées de l’article R. 4127-35 du code de la santé publique, de délivrer à sa patiente une information loyale, claire et appropriée à son état ;
« 10. Considérant, d’autre part, qu’il résulte de l’instruction, plus particulièrement de la retranscription par le Dr. J. de l’entretien du 3 novembre 2006, que Mme E. avait envisagé de recourir à une interruption volontaire de grossesse pour motif médical dans le cas où le fœtus serait atteint d’une maladie grave et qu’elle l’avait clairement énoncé devant le médecin du centre hospitalier de Mulhouse ; que, toutefois, celui-ci n’a jamais soumis cette demande au centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal de Strasbourg, ni lors de la discussion du dossier le 10 novembre 2006, ni à aucun moment ultérieur ; qu’il ne ressort pourtant d’aucune pièce versée au dossier que Mme E. avait renoncé à la demande qu’elle avait exprimée le 3 novembre 2006 et fait part au praticien hospitalier d’un refus de subir une interruption volontaire de grossesse ; que, par ailleurs, si le Dr J. avait indiqué à Mme E., lors du premier entretien, que des examens complémentaires devaient être réalisés avant de prendre toute décision, il ne l’aurait jamais informée de ce que, compte tenu de la gravité du retard de croissance du fœtus, une interruption volontaire de grossesse pour motif médical pouvait être envisagée, ni qu’une demande en ce sens pouvait être soumise au centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal de Strasbourg ;
« 11. Considérant que le manquement du médecin du centre hospitalier de Mulhouse à son obligation d’information du patient et son refus de donner une quelconque suite à la demande de Mme E. de recourir à une interruption volontaire de grossesse pour motif médical constituent une faute qui, par son intensité et sa gravité, est caractérisée au sens du troisième alinéa de l’article L. 114-5 du code de l’action sociale et des familles ; que la faute caractérisée du centre hospitalier de Mulhouse a privé les requérants de la possibilité de recourir, dans les conditions prévues à l’article L. 2213-1 du code de la santé publique, à une interruption volontaire de grossesse justifiée par une affection de l’enfant à naître d’une particulière gravité et reconnue comme incurable ;
« En ce qui concerne le préjudice :
« 12. Considérant que M. et Mme E. ont subi un préjudice moral résultant de ce qu’ils ont été privés de la possibilité de recourir à une interruption volontaire de grossesse pour motif médical et de l’anxiété générée par l’état de leur enfant et la lourdeur de son handicap ; que la Cour d’appel de Colmar, qui a condamné le Dr. N. à verser à M. et Mme E. la somme de 30 000 € chacun, n’a entendu réparer, ainsi qu’il résulte des termes de son arrêt du 2 avril 2015, que la part du préjudice moral résultant de la faute caractérisée commise par le médecin libéral ; qu’il y a lieu de réparer la part du préjudice moral résultant de la faute caractérisée commise par le médecin hospitalier ; que, contrairement à ce que soutient le défendeur, ce préjudice ne peut être limité au seul préjudice de la mère de l’enfant ; qu’il en sera fait une juste appréciation en condamnant le groupement hospitalier de la région Mulhouse et Sud Alsace à verser à M. et Mme E. la somme de 20 000 € chacun ;
« Sur la responsabilité du groupement hospitalier de la région Mulhouse et Sud Alsace du fait du signalement au Procureur de la République :
« 13. Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article R. 4127-43 du code de la santé publique : ²Le médecin doit être le défenseur de l’enfant lorsqu’il estime que l’intérêt de sa santé est mal compris ou mal préservé par son entourage² ; que l’article R. 4127-44 du même code, dans sa version alors applicable, prévoit que ²Lorsqu’un médecin discerne qu’une personne auprès de laquelle il est appelé est victime de sévices ou privations, il doit mettre en œuvre les moyens les plus adéquats pour la protéger en faisant preuve de prudence et de circonspection. S’il s’agit d’un mineur de quinze ans (…), il doit, sauf circonstances particulières qu’il apprécie en conscience, alerter les autorités judiciaires, médicales ou administratives² ;
« 14. Considérant, d’autre part, qu’aux termes du premier alinéa de l’article 434-3 du code pénal : ²Le fait, pour quiconque ayant eu connaissance de privations, de mauvais traitements ou d’atteintes sexuelles infligés à un mineur de quinze ans ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d’une maladie, d’une infirmité, d’une déficience physique ou psychique ou d’un état de grossesse, de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende² ; qu’aux termes de l’article 40 du code de procédure pénale : ²Le procureur de la République reçoit les plaintes et les dénonciations et apprécie la suite à leur donner conformément aux dispositions de l’article 40-1. Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs² ;
« 15. Considérant que, par lettre du 10 décembre 2007, deux médecins du centre hospitalier de Mulhouse ont adressé un signalement au procureur de la République en l’alertant de l’état de santé particulièrement préoccupant de C. et en mettant en doute la qualité de la prise en charge de l’alimentation de l’enfant par ses parents ; qu’ils demandaient que ceux-ci acceptent une prise en charge pluridisciplinaire par une diététicienne, une infirmière à domicile et une puéricultrice ; qu’il résulte de l’instruction que l’enfant a été hospitalisé en urgence le 2 décembre 2007 pour déshydratation sévère et présentait une perte de poids de 13 %, au-delà du seuil de 10 % engageant le pronostic vital ; que la communication entre M. et Mme E. et l’équipe soignante du centre hospitalier de Mulhouse était alors mauvaise et que les parents étaient réticents à suivre les recommandations des médecins ; que, dans les circonstances de l’espèce, le centre hospitalier de Mulhouse n’a pas commis de faute en procédant au signalement, alors même que le juge des enfants a rendu le 4 février 2008 un jugement de non-lieu en assistance éducative ; que, dès lors, les conclusions de M. et Mme E. tendant à la réparation du préjudice résultant de ce signalement doivent être rejetées ;
« Sur la responsabilité du groupe hospitalier de la région Mulhouse et Sud Alsace du fait d’une atteinte au droit à l’image :
« 16. Considérant qu’aux termes de l’article 9 du code civil : ²Chacun a droit au respect de sa vie privée² ; qu’aux termes de l’article L. 1110-4 du code de la santé publique dans sa rédaction alors applicable : ²Toute personne prise en charge par un professionnel, un établissement, un réseau de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations la concernant. (…)² ;
« 17. Considérant qu’il résulte de l’instruction que, lors d’une présentation générale du syndrome de Silver Russell à l’intention du personnel soignant, qui s’est tenue le 10 avril 2007 au centre hospitalier de Mulhouse, des photographies du jeune C. ont été utilisées et projetées sur écran ; que ces clichés ont été pris par un membre du personnel de l’hôpital et montrent les différentes malformations dont l’enfant est atteint ; que, quand bien même ces images n’ont été diffusées qu’au sein de l’établissement hospitalier à des fins pédagogiques pour le personnel médical, le centre hospitalier de Mulhouse n’établit pas qu’il avait reçue l’autorisation de M. et Mme E. de réaliser ces photographies et les exploiter ; qu’il a ainsi commis une faute ; qu’il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par M. et Mme E., compte tenu de l’atteinte au respect de leur vie privée, en portant le montant de ce chef de préjudice de 500 € chacun à 1 000 € chacun. »