Complications chirurgicales de l’endométriose recto-sigmoïdienne : analyse comparative de 364 cas traités par « Shaving », résection discoïde, résection segmentaire digestive

Carole ABO, Horace ROMAN et coll. (CIRENDO, IHU ROUEN, France) ont analysé les complications post-opératoires et l’impact sur la fertilité de 364 procédures opératoires distinctes de chirurgie colo-rectale dans l’endométriose recto-sigmoïdienne :

I - « Shaving » rectal n=145

II - Résection discoïde n = 80

III - Résection segmentaire colo-rectale n = 139.

 

L’endométriose digestive atteinte 5 à 12% des femmes présentant une endométriose profonde et, dans une majorité de cas (70 à 93%), l’atteinte est située sur le rectum ou la jonction recto-sigmoïdienne.

Les traitements médicaux ont une efficacité limitée en dehors des phénomènes algiques, et ne permettent de freiner l’évolution de la maladie.

La prise en charge chirurgicale est complexe tant en termes d’indications que de risques encourus.

Les complications les plus fréquentes sont :
- des fistules recto-vaginales,
- des abcès pelviens,
- des hémopéritoïnes ou péritonites,

et à titre d’information, il est nécessaire d’évoquer aux patientes les possibilités per-opératoires de colostomies.

Une fois le bilan d’endométriose effectué (interrogatoire, recherche de symptomatologie digestive, échographie pelvienne, IRM pelvienne, endo-échographie recto-sigmoïdienne…), 3 types d’intervention sont préconisés :

1/ l’excision du nodule rectal par « shaving » sans ouverture de la lumière rectale,

2/ la résection discoïde de la paroi antérieure du rectum,

3/ la résection segmentaire colo-rectale qui semble offrir le plus de chance de moindres récidives, mais au prix d’un risque post-opératoire plus important.

 

Cette étude rétrospective a été menée entre juin 2009 et décembre 2015, à l’Institut Hospitalo-Universitaire de ROUEN, la stratégie opératoire a été discutée au cas par cas avec la patiente et a été choisie en fonction de la localisation et du nombre de nodules d’endométriose, et en tenant compte du contexte d’infertilité.

Les patientes ont été soumises à des questionnaires standardisés, évaluant les troubles gastro-intestinaux, les troubles d’incontinence fécale, la qualité de vie (questionnaire KESS, GIQLI, FIKL et échelle de BRISTOL).

 

Résultats

Le suivi s’est étalé sur une période moyenne de 40 mois.
une colostomie provisoire a été effectuée chez 111 patientes (30,5 %) qui ont subi une résection rectale et vaginale associée, chez 67 patientes qui ont subi une résection colo-rectale, et chez 44 patientes en cas de résection discoïde. 
Aucune patiente traitée par « shaving » n’a eu à subir de colostomie per-opératoire ,
les complications post-opératoires ont été notées selon la classification de CLAVIEN 3b et ont retenues chez 43 patientes dont 2/3 avaient subi une résection segmentaire colo-rectale.

(NDLR : la classification de CLAVIEN-DINDO permet de gradifier les complications, le grade 3 notifie les complications ayant nécessité un acte invasif, entraîné une incapacité physique ou une symptomatologie invalidante. La distinction entre grade 3a et grade 3b se fait selon qu’il y ait eu nécessité ou pas d’une anesthésie générale secondaire.) 
- 14 cas de fistules recto-vaginales (3,8 %) sont survenues, 3 dans le groupe « shaving », 3 dans le groupe de résection discoïde et 8 dans le groupe de résection segmentaire recto-colique ;
- 24 patientes, soit 6,6 %, ont présenté un abcès pelvien ;
- 2 patientes, soit 0,5 %, ont présenté une péritonite post-opératoire liée à une effraction colique. ;
- En termes de grossesse, un an après la procédure chirurgicale, 37 % des patientes présentant une infertilité et préalablement opérées ont été enceintes, dont la moitié ont eu une grossesse spontanée.
- Dans les 3 ans qui ont suivi l’acte chirurgical, les taux de grossesse étaient de 66 % dont la moitié de grossesses spontanées ;
- Selon la classification de CLAVIEN-DINDO, les auteurs ont retrouvé 8 cas de sténose de l’anastomose colo-rectale (5,8 %), dont 6 ont pu être traités par dilatation endoscopique et 2 par chirurgie colo-rectale secondaire.

 

CONCLUSION

Pour les auteurs, le choix de la résection partielle de la paroi rectale par « shaving » devrait être prioritaire quand elle est possible, du fait du moindre risque de complications.

La résection discoïde qui permet de retirer jusqu’à 4 cm, voire plus, de la lésion endométriosique, est une technique prometteuse dont les suites sont favorables, notamment chez les femmes jeunes ayant un projet parental.

Les résultats à venir de l’étude randomisée ENDORE permettront de juger des suites entre les deux groupes comparés, chirurgie conservatrice ou résection colo-rectale.

 

Références
Post-operative complications after bowel endometriosis surgery by shaving, disc excision or segmental resection :  a three-arm comparative analysis of 364 consecutive cases   – Carole Abo, Horace Roman et coll. – Fertility and Sterility Vol. 109, n°1 – Janvier 2018

 
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