Quelle évolution et quels facteurs de risque pour les lésions intraépithéliales de bas grade du col uterin non traitées

Cette étude rétrospective italienne s’est intéressée à l’évolution des lésions de bas grade et à la durée de suivi optimale de ces lésions. Il s’agit d’une étude multicentrique rétrospective qui a inclus, sur une période de 3 ans de 2010 à 2013, 286 patientes avec un diagnostic histologique de lésion de bas grade, quel que soit le frottis d’entrée, avec une évaluation colposcopique adéquate (jonction vue). La moyenne d’âge était de 37 ans +/-9,1. Tous les frottis avaient été réalisés dans un des 3 centres retenus. Etaient exclues de l’étude les patientes présentant :

  • des anomalies endocervicales au frottis,
  • des antécédents de pathologie cervicale traitée ou non,
  • des lésions vaginales associées ou des antécédents de pathologie vaginale
  • une immunodépression.

Les anatomopathologistes et les colposcopistes étaient tous reconnus comme étant experts dans leur domaine respectif. Les caractéristiques habituelles des patientes étaient enregistrées (profil socio-économique, âge, tabagisme (>5cig/j), statut hormonal, contraception…). Le suivi reposait sur un frottis tous les 6 mois pendant au moins 2 ans. En cas de nouveau frottis pathologique, une colposcopie était réalisée avec biopsie en cas d’anomalie visible. A 1 an, un test HPV était effectué et s’il était positif, il était répété à 24 mois.

La régression était définie par une normalisation des frottis pendant toute la durée du suivi ; la persistance par la persistance d’anomalies cytologiques au premier frottis du suivi avec histologie de bas grade ; et l’aggravation par la constatation d’un frottis anormal, quel que soit le résultat, avec une histologie de haut grade. Une electroresection était réalisée à 24 mois en cas de persistance de bas grade ou dès la constatation d’une aggravation.

Résultats : 88,5% (n=253) des frottis à l’entrée étaient ASCUS ou LSIL, contre 11,5 % (n=33) d’HSIL ou ASC-H. Il n’y avait aucun AGC. Il était retrouvé un pourcentage plus élevé de fumeuses dans le 2è groupe (p=0,005). La régression était constatée dans 88,5% des cas, et ce majoritairement la première année de suivi (78 % des cas) ; la persistance dans 10,8% (n=31) et l’aggravation dans 0,7% des cas (n=2). Les chances de régression étaient particulièrement élevées dans le groupe ASCUS/LSIL (92,1 %) contre 60,6 % dans le groupe ASC-H/HSIL (p<0,001). Le risque de persistance-progression était plus important dans ce dernier groupe : 39,4 vs. 7,9 % (p<0,001). Il était retrouvé 48,5% de fumeuses dans le groupe persistance–aggravation contre 18,6% dans le groupe régression (p=0,0002). 33 résections furent réalisées. Sur les 2 cas d’aggravation, il fut confirmé 2 haut grade. Parmi les 31 cas de persistance, il fut constaté : 2 conisations blanches (6,5%), 16 bas grades (51,6%) et 13 cas de haut grades (41,9%). Aucune lésion invasive n’était à déplorer.
 

En conclusion, les auteurs retenaient qu’un frottis ASC-H ou HSIL et un tabagisme en cours étaient identifiés comme des facteurs de risque de persistance-aggravation, contrairement à l’âge , le statut hormonal, la contraception orale ou même la persistance d’un test HPV-HR positif à 24 mois. Le rythme de surveillance proposé était celui d’un examen annuel avec co-testing.

Commentaires : Cette étude ne fait que confirmer les données de la littérature sur le faible potentiel évolutif des bas grades histologiques et le principe d’une surveillance dont le rythme est à moduler en fonction du frottis initial selon les dernières recommandations de l’INCa : à 1 an par cytologie ou test HPV (non remboursé dans cette indication) si ASCUS ou LSIL au départ ; et à 6 mois en cas de ASC-H ou HSIL. La colposcopie avec nouvelle cytologie est alors indiquée ainsi que l’examen du vagin dans cette situation de discordance. En aucun cas, il n’est recommandé de réaliser une conisation d’emblée devant une histologie de bas grade. Cette attitude non interventionniste doit être maintenue au moins 2 ans, sauf en cas de persistance de résultats contradictoires, cytologie de haut grade et histologie de bas grade.

Le risque de négliger une lésion invasive est quasi nul dans les situations avec une colposcopie satisfaisante. On peut s’étonner, dans cette étude, de la non identification comme facteur de risque d’un test HPV toujours positif à 2 ans, mais ceci s’explique sans doute par le trop faible effectif (n=80). Enfin, on regrettera que les auteurs n’aient pu disposer du double immunomarquage qui pourrait confirmer à l’avenir sa valeur de marqueur de risque d’évolution. Elément intéressant de cette étude, c’est que toutes les patientes ayant une lésion « persistante » ont été conisées et qu’il fut retrouvé au final 41,9 % de haut grade sur les pièces opératoires, soulignant si besoin est, la nécessité absolue de « repérer » ces patientes finalement peu nombreuses, mais chez qui le suivi doit être maintenu afin d’éviter absolument les perdues de vue, surtout chez celles dont le frottis initial est ASC-H ou HSIL. Si le risque d’évolution vers le haut grade est faible, il n’est pas nul : de l’art de la communication sur le potentiel évolutif de ces anomalies le plus souvent bénignes et transitoires : informer sans affoler ni minimiser, avec des nuances à apporter à notre discours selon les facteurs de risque identifiés , frottis de haut grade et tabac. Enfin, espérons que dans un avenir proche, le double immunomarquage puisse nous aider dans les situations les moins confortables : cytologie de bas grade / histologie de bas grade et jonction non vue.

 

 
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