Rôle de la supplémentation en progestérone de la phase lutéale dans les traitements de fécondation in vitro après transfert embryonnaire

 

 

Deux articles parus dans le numéro de janvier 2018 de la revue « Fertility and Sterility » évoquent le rôle de la supplémentation en progestérone de la phase lutéale après transfert embryonnaire dans le cadre des traitements d’assistance médicale à la procréation (AMP).

 

L’article écrit par Jun GAO et coll. (Sun Yat-Sen Université de GUANGZHOU – Chine) analyse dans une étude prospective randomisée le début optimal de la supplémentation en progestérone dans le cadre de transferts d’embryons après fécondation in vitro (FIV) et les résultats en terme de taux d’implantation, de grossesses cliniques, et de grossesses menées à terme.

Plusieurs effets biologiques et hormonaux expliquent le déséquilibre de la phase lutéale et la diminution de la sécrétion de progestérone dans les traitements de FIV : désensibilisation hypothalamo-hypophysaire par l’emploi des agonistes de la Lh-Rh, dérégulation des cellules de la granulosa liée à la ponction folliculaire, lutéinisation prématurée du fait de l’inhibition de la LH en cours de traitement.

De ce fait, la supplémentation en progestérone est une partie intégrante du traitement de FIV lors du transfert embryonnaire.

 

Plusieurs questions sont encore sujettes à débat :
quand commencer l’administration de progestérone ?
quel mode d’administration ?
quelles doses optimales utiliser ?

 

L’étude randomisée menée par GAO et coll. entre octobre 2014 et janvier 2015 a concerné 233 patientes dont les critères d’inclusion étaient : cycles réguliers, âge inférieur ou égal à 35 ans, taux de FSH sérique inférieur ou égal à 15 UI/l, absence de traitement de gonadotropine dans les 3 mois qui ont précédé l’étude.

Ont été exclus les cas de malformation utérine, de syndrome d’ovaire polykystique, d’endométriose ou de tumeur ovarienne.

Toutes les femmes ont eu un traitement de désensibilisation hypophysaire par l’administration d’agonistes de la Lh-Rh en phase lutéale (J20-J22) du cycle précédant la FIV, soit par Diphereline 3,75 mg par voie parentérale, soit par injection quotidienne sous-cutanée de Diphereline 0,1 mg.

 

La randomisation a porté sur le jour d’administration de la progestérone (administration quotidienne par voie intra-musculaire de 60 mg de progestérone naturelle) :
Groupe A (n=117) : traitement le jour du recueil ovocytaire,
Groupe B (n=116) : traitement administré le lendemain du recueil ovocytaire.

 

RÉSULTATS
les taux de grossesses cliniques (groupe A : 55,3 % / groupe B : 55,5 %),
les taux d’implantation embryonnaire (38,4 % / 38 %),
les taux de fausses couches spontanées (7,7 % / 7,5 %),
les taux de grossesses à terme (45,7 % / 46,6 %),

étaient identiques dans les deux groupes A et B.

 

 

 

CONCLUSION
 

Pour les auteurs, la supplémentation en progestérone débutée un jour après le recueil ovocytaire ne modifie pas le succès des tentatives de FIV en termes de taux de grossesses.

 

Les études de KASER et SILVERBERG, rapportées dans l’article, évoquent :
l’effet identique d’administration de gel vaginal de progestérone par rapport à l’administration intra-musculaire de progestérone,
dans l’article de SILVERBERG, les résultats de grossesses sont en faveur d’une administration par voie vaginale de la progestérone au 2e jour après le recueil ovocytaire par rapport à la voie parentérale.

 

Dans le commentaire paru dans la même revue sur la supplémentation en progestérone de la phase lutéale, Dominique DE ZIEGLER et coll. (Hôpital Foch – SURESNES, France) évoque les bénéfices et « risques » d’une administration trop précoce de la progestérone.

- Des études précédentes de l’auteur ont comparé l’intensité et le rythme des contractions utérines en fin de phase folliculaire de cycle spontané et de stimulations ovariennes contrôlées (COS) le jour du pic de LH ou de l’administration d’HCG : aucune différence significative n’a été retrouvée en termes de contractions utérines.

- Néanmoins, la contractilité musculaire de l’utérus diminue 4 jours après le pic de LH lors d’un cycle menstruel physiologique, plus de 2 jours après, soit le moment d’un transfert de blastocystes dans les traitements de FIV après COS.
 

- Les travaux de DE ZIEGLER et R. FANCHIN ont aussi montré que la supplémentation précoce en progestérone permettait d’inhiber l’effet des taux élevés d’oestradiol sur la contractilité utérine.

Ces données posent néanmoins, selon l’auteur, deux problèmes :

1/ l’administration de progestérone le jour du recueil ovocytaire pourrait être bénéfique sur la contractilité utérine,

2/ mais cette supplémentation, trop précoce, pourrait avoir un effet délétère sur la « fenêtre d’implantation » dans les transferts de blastocystes.

 

La critique de l’article de GAO et coll. repose sur le fait que les auteurs ne différencient pas les transferts embryonnaires à J3 et les transferts à J5 de blastocystes.

L’effet bénéfique ou délétère d’une administration trop précoce de progestérone ne peut donc être réellement analysé.

DE ZIEGLER évoque également la question restée à ce jour sans réponse : quand interrompre la supplémentation en progestérone une fois le début de grossesse connu ?

 

 

Références

Effect of the initiation of progesterone supplementation in in vitro-fertilization-embryo transfer outcomes : a prospective randomized controlled trial – Jun GAO, Fang GU, Ben-Yu MIAO, Ming-Hui CHEN, Can-Quan ZHOU, Yan-Wen XU (Guangdong Provincial Key Laboratory of Reproductive Medicine, First Affiliated Hospital Sun Yat-Sen University, Guangzhou, People’s Republic of China) – Fertility and Sterility – Vol 109 N°1, January 2018 0015-0282

Dominique de ZIEGLER, Jean-Marc AYOUBI, René FRYDMAN, Renato FANCHIN (Department of Obstetrics and Gynecology and Reproductive Medicine, Hôpital Foch, Faculté de Médecine PARIS OUEST, SURESNES, France)  - Fertility and Sterility – Vol 109 N°1, January 2018 – https://www.fertsterdialog.com/users/16110-fertility-and-sterility/posts/21522-25176

 

 
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