Congélation sociale d'ovocytes

Auteurs

Les taux de survie récemment obtenus à l’aide de la technique de vitrification ovocytaire ainsi que les taux de fécondation annoncés risquent bien de modifier fondamentalement la donne concernant la conservation ovocytaire en routine.
Jusqu’à présent, seule, l’autoconservation des gamètes mâles étaient couramment réalisée dans les laboratoires spécialisés dans la reproduction. Depuis peu, la littérature s’épaissit sur les capacités à conserver les ovocytes. Les taux de survie par congélation ovocytaire, en particulier par la technique de vitrification, approchent 90 % avec 75 % de fécondation après fécondation in vitro.

Cette technique ouvre de nouveaux horizons aux femmes, non seulement dans le cadre d’une indication médicale avant traitement gonadotoxique par exemple, mais également dans le cadre sociétal pour lutter contre le déclin de la fertilité féminine liée à l’âge. C’est dans cette deuxième approche qu’une étude belge, issue du célèbre centre de l’AZBUV, la première à notre connaissance, a eu pour but d’interroger 1 914 femmes en âge de reproduction (entre 21 et 40 ans) concernant leur avis sur les possibilités d’autoconservation ovocytaire. Un questionnaire a été adressé par voie électronique à 1 914 femmes sélectionnées, toutes classes sociales et toutes appartenances géographiques confondues. Les patientes recevaient, outre le questionnaire précis sur leur choix dans cette situation, une notice d’information les informant de la technique et de ses résultats. Les adresses e-mails ont été prises au sein d’une base de données de patientes qui acceptent de participer à des enquêtes statistiques nationales. Le taux de réponse de l’enquête est de 55 % soit 1049 femmes. 31,5 % d’entre elles se considèrent comme appartenant potentiellement à la population en faveur de l’autoconservation ovocytaire dite sociale ; 3,1 % d’entre elles sont définitivement acquises à la procédure et 51,8 % d’entre elles ne sont pas intéressées. 16,7% se déclarent sans opinion sur le sujet.

Les motivations des femmes qui optent pour la technique sont de deux types :
- d’une part, l’autoconservation dans une optique d’avoir de nombreux enfants,
- d’autre part, l’auto conservation dans le cadre du don d’ovocytes.

Deux conditions cependant sont unanimement évoquées :
1 - ne pas altérer la fertilité ultérieure par le geste,
2 - et ne pas affecter la santé des enfants à venir.

Au plan scientifique, les deux grands avantages de la vitrification ovocytaire sont, d’une part, la conservation de la fertilité ultérieure, d’autre part, d’éviter la présence de spermatozoïdes le jour de la ponction ovocytaire. 
À noter que le questionnaire prenait en compte les caractères suivant :
l’âge, le niveau d’éducation, le statut social et relationnel, l’existence ou non d’enfant, la religion, l’ethnie, l’expérience d’une période d’infertilité entre autre.
Aucune différence significative n’est retrouvée entre les groupes, celui potentiellement en faveur de l’autoconservation ovocytaire et celui qui n’est pas intéressé, concernant l’appartenance ethnique, les orientations sexuelles ou religieuses et le niveau d’éducation.
À l’inverse, une différence significative est retrouvée dans l’âge des populations qui se considèrent comme potentiellement favorables à l’autocongélation comparé à celles qui n’ont pas d’opinion ou sont contre la technique. Les patientes en faveur de l’autocongélation sont plus jeunes, entre 21 et 29 ans, et les autres plus âgées. Concernant l’activité professionnelle, les patientes du groupe qui se posent la question de l’autocongélation appartiennent plutôt au groupe des salariées employées qu’au groupe des autodidactes ou des travailleurs manuels. Les patientes qui optent pour le refus de la congélation sont plus des travailleurs de force. Les patientes qui n’envisagent pas l’auto congélation ont un salaire moyen inférieur à celles qui envisagent potentiellement la technique. Les partenaires masculins des patientes qui n’envisagent pas l’autocongélation à l’inverse ont plutôt un haut salaire comparé à ceux qui sont les partenaires de femmes qui sont potentiellement en faveur de la congélation ou qui n’ont pas d’opinion. Par ailleurs, la majorité des patientes interrogées, 77,9 % soit 798 patientes, sont plutôt pessimistes sur leur potentiel de reproduction. 14,3 %, soit 146 patientes, sont plutôt réalistes sur leur potentiel reproductif, et 7,8 %, soit 80 patientes, sont plutôt optimistes sur leur potentiel reproductif. Les patientes qui vivent dans la partie allemande de la Belgique sont plus en faveur de l’autoconservation ovocytaire par congélation que les patientes qui vivent dans la région de langue française.

En conclusion, les auteurs déclarent que les succès récents de la congélation ovocytaire, en particulier par la technique de vitrification, laissent à prévoir qu’une proportion significative de la population jeune féminine devrait considérer que la technique est sûre et apporte potentiellement la possibilité d’une conservation de la fertilité pour lutter contre le déclin inéluctable de l’âge. Une majorité de la population féminine devrait être ouverte à l’idée de la congélation ovocytaire dite « sociétale ».

(D. Stoop, J. Nekkebroeck, P. Devroey. Human Reprod (2011), 26(3) ; 655-661)
http://humrep.oxfordjournals.org/content/26/3/655.full

 
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