Hormone anti-müllerienne (AMH) : valeur predictiveen termes de resultats de grossesse en fecondation in vitro (FIV)

David E. REICHMAN, Zev ROSENWAKS et coll. (Cornell Medical Center New York - USA) analysent dans cet article, les valeurs d’hormone anti-müllerienne (AMH) prédictives dans le cadre de la FIV, du recueil ovocytaire, d’annulation de cycles d’induction d’ovulation et de résultats de grossesse.

Il s’agit d’une étude rétrospective menée entre avril 2010 et janvier 2013.

Parmi les marqueurs conventionnels évaluant la « réserve ovarienne », à savoir le dosage au 3e jour du cycle de l’hormone FSH, le décompte des follicules pré-antraux, et l’hormone AMH, cette dernière prend une place de plus en plus importante comme élément pronostique des résultats d’assistance médicale à la procréation.

L’étude a intéressé une cohorte de 2760 patientes et un total de cycles initiés de FIV de 4072, dans le cadre d’une FIV.

Tous les dosages d’AMH ont été réalisés au Cornell Medical Center ; les taux minima de dosages d’AMH réalisables rapportés ont été de 0,17 ng/ml, la technique utilisée était le GEn2 BECKMAN ELISA ASSAY.

Plusieurs types de protocoles d’induction d’ovulation ont été réalisés : protocole agoniste de la Lh/Rh associé aux gonadotropines, ou protocole antagoniste de la Lh/Rh associé aux gonadotropines.

Dans tous les cas, l’induction d’ovulation a été menée de façon à obtenir une réponse folliculaire maximale en contrôlant le risque d’hyperstimulation ovarienne : les doses de départ de traitement d’induction d’ovulation ont été évaluées en fonction de l’âge des patientes, des taux d’hormone AMH, du compte des follicules pré-antraux, du poids des patientes et des réponses antérieures au traitement de stimulation de l’ovulation.

Les patientes ayant une maturation de 3 follicules ou de moins de
3 follicules ont été conseillées en mettant en alternative les avantages et les inconvénients d’une poursuite de traitement ou d’annulation du traitement.

D’une façon générale, les patientes ayant au moins 3 follicules maturants ont été encouragées à poursuivre le traitement de FIV, les patientes présentant 1 ou 2 follicules ont été encouragées, soit à une annulation de protocole, soit à une alternative vers l’insémination avec sperme de conjoint, mais chaque décision étant prise en regard du cas particulier des patientes.

Les transferts embryonnaires après recueil ovocytaire et mise en culture étaient réalisés, soit au 3e jour après ponction des follicules ovariens, soit lorsque les conditions de culture et le nombre d’embryons estimé raisonnable, poursuivis au stade blastocyste.

Résultats :

Il existe une corrélation positive entre l’augmentation de l’AMH et le nombre total d’ovocytes recueillis ; le nombre maximal d’ovocytes recueillis chez des patientes présentant une AMH entre 0,17 à 0,30 ng/ml, était de 13 avec un maximum de 16.

L’AMH était plus corrélée avec le nombre d’ovocytes recueillis que le compte de follicules pré-antraux, et ce pour chaque groupe individuel selon l’âge.

Les patientes présentant un taux bas d’AMH, inférieur à 0,17 ng/ml, présentaient dans 37,3 % des cas un risque d’annulation du traitement.

Quel que soit l’âge des patientes, les taux d’annulation ont été respectivement de 30,8 % avec un taux d’AMH à 0,30 ng/ml, de 15 % avec un taux d’AMH de 0,7 ng/ml, de 4,6 % avec un taux d’AMH de
1 ng/ml et de 4,3 % lorsque le taux d’AMH était de 1 à 2 ng/ml.

Lorsque l’on associe dans l’analyse les taux d’AMH et le taux de FSH au 3e jour du cycle, il s’avère que quelle que soit la valeur de l’AMH, une élévation de la FSH entraînait une diminution du nombre d’ovocytes recueillis, le « cut-off » était estimé à une valeur de FSH supérieure à 10 mIU/ml.

En termes de grossesse, le taux d’AMH est moins prédictif d’un résultat de grossesse puisque même avec des taux bas d’AMH (inférieurs à 0,5 ng/ml) 23,5 % des patientes âgées de moins de 40 ans ont été enceintes et ont accouché après traitement de FIV.

Chez les patientes de plus de 40 ans, présentant un taux d’AMH équivalent à celui de patientes plus jeunes, la réponse en termes de maturation folliculaire était plus faible, de même que le nombre d’ovocytes recueillis : ces résultats laissent penser que le taux d’AMH ne doit pas être interprété de façon isolée mais doit être corrélé au contexte clinique, notamment à l’âge des patientes, aux mesures du taux de FSH, au compte de follicules pré-antraux et aux résultats des traitements antérieurs d’induction d’ovulation.

En accord avec la majorité des études : il n’y a pas de relation entre le taux d’AMH et la qualité ovocytaire ; le fait que l’étude montre des taux d’implantation embryonnaire plus élevés lorsque l’AMH est élevée, est probablement lié au nombre plus importants d’ovocytes recueillis et aux possibilités plus importantes de transfert embryonnaire au stade blastocyste.

Quel est le « cut-off » que l’on doit retenir pour le taux d’AMH en termes prédictifs de résultats ? : certaines études l’ont estimé à 1,26 ng/ml, d’autres à 0,48 ng/ml. Dans une étude récente, il a été estimé que chez les patientes de plus de 42 ans, lorsque l’AMH était inférieure à 0,29 ng/ml, il n’y avait jamais de grossesse évolutive : mais la plupart de ces études présentaient des échantillons de faible importance, donc une interprétation limitée.

Les résultats de l’étude du Cornell Medical Center sont en contradiction avec ces données.

Les auteurs insistent sur le fait que chez des patientes jeunes, présentant des taux bas d’AMH, il y avait un pourcentage d’annulation de cycles plus faible que chez les patientes âgées et de ce fait, les informations à donner à ces couples devaient être plus « optimistes » que ce qui est conseillé habituellement dans le cadre de la FIV.

Les auteurs insistent sur le fait que l’hormone AMH ne doit pas être prise isolément, comme seul critère « de réserve ovarienne », mais doit être associée aux autres marqueurs, notamment la FSH et le décompte de follicules pré-antraux.

Les auteurs concluent qu’un taux bas d’AMH est souvent associé avec une réponse ovarienne pauvre, mais pas forcément avec un taux bas de grossesse, notamment chez les patientes de moins de 40 ans.

Les auteurs récusent la notion de « cut-off » et estiment qu’il ne faut pas trop vite dissuader les patientes de poursuivre un traitement, et donc de se diriger trop rapidement vers le don d’ovocytes.

 

Value of antimüllerian hormone as a prognostic indicator of in vitro fertilization outcome  - David E. Reichman, Dan Goldschlag, Zev Rosenwaks -  Fertility and Sterility - Volume 101 - n°4 - April 2014

 
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