Prudence concernant l’utilisation de la pilule chez les jeunes femmes atteintes de mutation du gène BRCA1 ?

Chez les femmes porteuses d’une mutation du gène BRCA1, le risque de développer un cancer du sein au cours de sa vie est de 70% avec environ 50% des cancers diagnostiqués avant l’âge de 40 ans. Des premières règles tardives, un allaitement et une ovariectomie bilatérale prophylactique diminuent ce risque contrairement à l’âge à la première grossesse ou à la parité dont l’impact est plus discuté. Des études d’observation semblent évoquer l’absence d’incidence d’un traitement hormonal après l’ovariectomie.

Toutes ces données suggèrent, bien sûr, un rôle important de l’exposition aux stéroïdes sexuels en particulier avant la ménopause. L’adolescence pourrait être une période particulièrement sensible aux carcinogènes mammaires du fait de la prolifération cellulaire rapide.

Par ailleurs, le risque pour les femmes mutées de développer un cancer de l’ovaire est de 40% et l’on connait le rôle protecteur attribué à la contraception orale pour ce risque. L’initiation d’une contraception hormonale chez les patientes porteuses d’une mutation des gènes BRCA doit donc faire l’objet d’une évaluation précise notamment en ce qui concerne le risque potentiellement augmenté de cancer du sein chez les femmes mutées pour BRCA1 comme cela a pu être évoqué dans certaines études antérieures.

Une étude cas-contrôles multinationale a été conduite pour déterminer le risque de cancer du sein sous contraception orale chez des femmes mutées pour BRCA1 (1). Ainsi, 2 492 patientes atteintes de cancer du sein ont été appariées à autant de femmes mutées non atteintes selon l’année de naissance et le lieu de résidence.

L’utilisation de la contraception orale était associée à un risque accru de cancer du sein chez les femmes qui l’avaient utilisée avant l’âge de 20 ans (OR 1.45 ; IC à 95% 1.20-1.75). Cette association était retrouvée uniquement pour les cancers diagnostiqués avant l’âge de 40 ans (OR 1.40 ; IC à 95% 1.14-1.70). Ainsi, le risque de cancer du sein jeune apparaissait augmenté de 11% pour chaque année d’utilisation de la pilule avant l’âge de 20 ans (OR 1.11 ; IC à 95% 1.03-1.20). En revanche, il ne semblait pas exister de relation lorsque le cancer était diagnostiqué après l’âge de 40 ans.

Il semblerait donc que l’utilisation d’une contraception orale puisse augmenter le risque de cancer précoce du sein lorsqu’elle est utilisée avant l’âge de 20 ans, avec un effet durée. Ces résultats corroborent ceux de métaanalyses antérieures chez les femmes non mutées où un léger sur-risque de cancer du sein apparait pour les cancers survenant avant la ménopause, en cas de prise avant l’âge de 20 ans (RR=1.22 +/- 0.04) ou si la contraception orale avait été utilisée plus de 4 ans avant la première grossesse menée à terme (OR=1.52 ; IC à 95% : 1.25-1.82) (2-3).

La prescription d’une contraception hormonale doit toujours faire l’objet d’une évaluation de la balance bénéfices/risques ; chez les jeunes filles, l’absence de besoin contraceptif devrait toujours faire préférer des traitements symptomatiques s’ils peuvent être suffisants.
 

  1. Kotsopoulos J, Lubinski J, Moller P et al. Timing of oral contraceptive use and the risk of breast cancer in BRCA1 mutation carriers. Breast cancer Res Treat 2014; 143:579-586.
     
  2. Collaborative group on hormonal factors in breast cancer. Breast cancer and hormonal contraceptives: collaborative reanalysis of individual datas on 53 297 women with breast cancer and 100 239 women without breast cancer from 84 epidemiological studies. Lancet 1996; 347:1713-27.
     
  3. Kahlenborn C, Modugno F, Potter DM, Severs WB. Oral contraceptive use as a risk factor for premenopausal breast cancer: a metaanalysis. Mayo Clin Proc 2006; 81:1290-302.

 
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