Le traitement de l’hypothyroïdie frustre n’est pas utile en l’absence de stigmates d’auto-immunité !

L’impact des dysfonctionnements thyroïdiens subcliniques ou de l’auto-immunité thyroïdienne sur l’évolution de la grossesse reste un sujet très controversé. Une des principales raisons des divergences d’opinion réside en l’hétérogénéité de la définition des anomalies subcliniques et du seuil de détection des auto-anticorps (Ac anti-peroxydase et anti-thyroglobuline) définissant la thyroïdite chronique de Hashimoto. Depuis 2012, les sociétés d’endocrinologie avaient fixé le cut off à 2,5mUI/L  pour la TSH. Dans des recommandations plus récentes de l’Américain Thyroid Association, il fut proposé d’augmenter  la limite supérieure acceptable de TSH jusqu’à 0,5 en dessous de la limite supérieure des femmes non enceintes et de ne pas traiter par L-thyroxine si la TSH se situait entre 2,5 et 4 en cas d’Ac négatifs.

Dans cette nouvelle étude belge, les auteurs ont exclu les TSH en dehors des normes du laboratoire, les femmes ayant des Ac antiperoxydase positifs et celles déjà traitées par L thyroxine. Le but était de vérifier si des variations de TSH et T4 dans les normes (des personnes non enceintes) étaient associées à des anomalies de la grossesse selon que la TSH serait inférieure ou supérieure ou égale à 2,5.

Ainsi, 1321 grossesses simples, non stimulées dont la TSH était dans les normes du laboratoire lors de la première consultation prénatale, ont été analysées. 2 groupes ont été définis selon leur taux de TSH ; ainsi 90% des femmes avait une TSH<2,5 et 10% supérieure ou égale à 2,5. La TSH moyenne était de 1,47 +/- 0,73 et celle de la T4 était de 13,64 +/-1,80. L’âge moyen plus élevé dans le premier groupe (30 +/-5,8) versus (28,7+ /-4,9) dans le second. La parité était plus élevée dans le premier groupe.

La T4 était inversement corrélée à l’âge, à l’IMC, au timing de la première visite, et il était retrouvé une corrélation positive avec le statut en fer.

Le tabagisme était associé à une TSH plus élevée OR=1,38 (1,08-1,74). Une première consultation après 12 SA corrélée avec une TSH plus haute OR 1,35(1,15-1,36).

L’analyse des complications de grossesse ne montrait pas de différence entre les groupes pour le risque de : diabète gestationnel (19%),  pré éclampsie (5,3%), RCIU (2,9%), accouchements prématurés avant 37semaines (4,8% dans le premier groupe et 6,8% dans le second avec une différence non significative),  petit poids de naissance (avec un PN identique en moyenne : 3,3 +/- 0,5 kg),  hémorragie du post-partum.

L’auto-immunité antithyroïdienne est la cause principale de TSH haute et d’hypothyroïdie subclinique et donc l’exclure d’emblée de cette étude permettait de vérifier le seul impact de la TSH. Le taux de TSH <2,5 était de 90% et, malgré la négativité des Ac, 10% était quand même au-dessus de 2,5. Mais les anticorps anti-thyroglobuline n’avaient pas été réalisés dans cette étude.  Or, ils sont associés, tout comme la carence martiale à des taux plus élevés de TSH avec risque d’hypothyroïdie subclinique indépendamment des ATPO.

Finalement, ces données semblent confirmer les nouvelles recommandations un traitement par L thyroxine non utile même pour des TSH supérieures à 2,5 si elles restent dans les normes du laboratoire et ne sont pas associées à des stigmates d’auto-immunité.

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Veltri F, Kleynen P, Grabczan L et al. Pregnancy outcomes are not altered by variation in thyroid function within the normal range in women free of thyroid disease. European Journal of Endocrinology (2018) 178 :189-197.

 

 
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